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Moyen Orient et Monde - Témoignages

Trump réussit l’exploit de réunir tous les Syriens contre lui

Qu’ils soient pro ou anti-Assad, l’intégrité du territoire syrien et la restitution du Golan sont à leurs yeux deux éléments primordiaux.

Des druzes réunis dans le village de Majdel Chams, dans le Golan occupé par Israël, en octobre 2018. Ammar Awad/File Photo/Reuters

Pour les Arabes, la guerre des Six-Jours reste aujourd’hui encore synonyme d’humiliation. Du côté syrien, les stigmates sont encore plus vifs. En 1967, lors de la guerre-éclair qui l’oppose à ses voisins de la région, Israël s’empare d’une partie du Golan. Ce territoire annexé par l’État hébreu en 1981 ne sera jamais reconnu par la communauté internationale. Un consensus qu’entend rompre Donald Trump qui prévoit de signer prochainement un texte officialisant la reconnaissance par les États-Unis de la souveraineté israélienne sur le plateau du Golan. Alors que la Syrie entre dans sa neuvième année de guerre civile, la question du Golan est parvenue à faire l’unanimité dans les deux camps qui s’opposent sur le terrain. Pour Damas, les déclarations de M. Trump « confirment une nouvelle fois le parti pris aveugle des États-Unis en faveur de l’occupation sioniste (...) ». Mais elles « ne changeront rien au fait que le Golan est et restera arabe et syrien », ajoute-t-il. La coalition des principaux groupes de l’opposition syrienne en exil a également dénoncé l’annonce du président américain, qui « va détruire toutes les chances pour rétablir la stabilité et la paix dans la région et provoquer plus de guerres et de destructions ». Si des dizaines de milliers de Syriens ont fui le Golan lors de la guerre de 1967, une partie d’entre eux est restée, soit environ 23 000 druzes. « C’est une décision imbécile, de la part d’un imbécile lui-même, qui fait cadeau de quelque chose qui ne lui appartient pas à un autre imbécile encore plus corrompu que lui », a confié à l’AFP Ghassan Abou Jabal, un médecin de Majdel Chams, localité druze d’environ 10 000 habitants touchant à la zone-tampon onusienne séparant la partie occupée et non occupée du Golan syrien.


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Se soucier d’Idleb

De l’autre côté de la zone, l’annonce américaine a provoqué de vives réactions parmi des Syriens contactés par L’Orient-Le Jour via WhatsApp. Qu’ils soient pro ou anti-Assad, l’intégrité du territoire syrien et la restitution du Golan sont à leurs yeux deux éléments primordiaux. « Il s’agit de notre terre, de notre histoire et de notre culture », soutient Lou’ay*, un activiste de l’opposition basé en Turquie. « Nous tenons au Golan, comme nous tenons à Deir ez-Zor, Idleb ou Deraa. Les États-Unis et Israël misent sur le fait que ce sujet n’est pas primordial pour les Syriens dans le contexte actuel de guerre », estime de son côté Abou Ghiath, un activiste originaire de Deraa, réfugié en Europe. Pour les Syriens restés dans leur pays, la question divise toutefois. « C’est le cadet de nos soucis », estime Fareed Al, un habitant de la région d’Idleb, aujourd’hui en proie à des bombardements intensifs des forces de Bachar el-Assad et de son allié russe. « On ferait mieux de se soucier de notre sort, alors que des enfants meurent sous les bombes, que de soulever maintenant la problématique du Golan », fustige-t-il. À Khan Cheikhoun, où les raids aériens se faisaient intenses hier soir, Ala’, un jeune activiste, dresse de son côté le parallèle avec l’occupation russo-iranienne qui « confisque les ressources syriennes pour permettre à Assad de se maintenir au pouvoir ». « Nous ne faisons aucune distinction quel que soit le territoire, et la déclaration de Trump sur le Golan occupé est une grande provocation qui heurte les sentiments des Syriens », poursuit Ala’. Parmi les dizaines de milliers de personnes qui ont été chassées par les Israéliens du Golan, figurent de nombreux réfugiés palestiniens. Ammar Codsi, un activiste et journaliste, ancien habitant de Yarmouk et descendant de réfugiés palestiniens après la guerre israélo-arabe de 1948, est particulièrement affecté par l’annonce de Donald Trump qu’il compare à la Déclaration de Balfour. « Le contrôle du Golan syrien par l’entité sioniste est une occupation indéniable et comparable à l’occupation de la Palestine », dit-il.


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« Jamais je ne me battrais contre les soldats de Bachar »

Chez certains partisans du régime, récupérer le Golan des mains israéliennes est la priorité absolue. Pour Pierre*, un habitant d’Alep, cette région constitue avant tout l’héritage chrétien de la Syrie. « Le Golan représente pour moi les miracles de Jésus-Christ dans le lac de Tibériade, et le Golan sans ce lac est un homme sans cœur », confie-t-il. « Le Golan est un morceau de notre cœur, et s’il faut combattre pour le récupérer, je serai le premier dans les rangs », surenchérit Ziad*, originaire de Raqqa. « Il faut que la Syrie fasse la guerre pour récupérer le Golan jusqu’au lac de Tibériade, mais avant cela, il faut arriver à la parité stratégique avec Israël, soit acquérir l’arme nucléaire », ajoute Pierre, qui concède que le régime a aujourd’hui d’autres priorités, qui sont celles de reprendre Idleb et l’est de l’Euphrate. « Que l’État en finisse avec cette guerre avant de s’atteler à la question du Golan », estime Haïtham*, également originaire de la région de Raqqa. Difficile en effet, dans les circonstances actuelles, d’imaginer une quelconque initiative de la part du régime syrien contre l’État hébreu autre qu’un bombage de torse. « Le régime se fiche totalement du Golan puisque Hafez (el-Assad) l’a vendu aux Israéliens. Il n’adopte qu’une posture de façade, mais n’a jamais rien fait de concret pour le récupérer, ce n’est pas aujourd’hui qu’il va le faire », estime Lou’ay. « Malheureusement, tout le monde sait que le régime Assad est l’un des partisans de l’occupation du Golan en échange de la paix avec l’entité israélienne et qu’il ne veut pas que son armée libère ce territoire », abonde en ce sens l’activiste palestinien. Si les deux camps s’accordent à dire que l’ennemi numéro un des Arabes en général et des Syriens en particulier reste Israël, l’opposition ne voit pas aujourd’hui le régime ouvrir un nouveau front pour récupérer le Golan. Certains laissent toutefois entendre qu’ils pourraient accepter l’impossible : se battre aux côtés des forces du régime contre Israël, comme Iyad* et Amer*, interrogés sur un groupe réunissant activistes de l’opposition et journalistes arabes. Une éventualité qui laisse d’autres... pantois. « Même s’il fallait se battre contre les koufar de Khoreiche (pires ennemis de l’islam, en référence à la tribu dont est issu le prophète Mahomet), jamais je ne me battrais contre les soldats de Bachar », écrit quant à lui un journaliste syrien. « Quand bien même le miracle se produirait et que le régime entrerait en guerre contre Israël, je vois mal les rebelles s’allier avec l’armée criminelle car nous ne pouvons pas combattre un occupant avec d’autres forces d’occupation (Russie-Iran) », poursuit de son côté Ala’. « Pour les jeunes Syriens, la libération du Golan commencera après la chute de ce régime », conclut Ammar Codsi.

*Les prénoms ont été modifiés pour des raisons de sécurité.


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Pour les Arabes, la guerre des Six-Jours reste aujourd’hui encore synonyme d’humiliation. Du côté syrien, les stigmates sont encore plus vifs. En 1967, lors de la guerre-éclair qui l’oppose à ses voisins de la région, Israël s’empare d’une partie du Golan. Ce territoire annexé par l’État hébreu en 1981 ne sera jamais reconnu par la communauté internationale. Un consensus...

commentaires (1)

Oh pauvres rebelles! Hahahaha. C'était pas qu'ils ne savaient pas, mais qu'ils ont été démasqués d'avoir été roulés dans la farine. Hahahaha.

FRIK-A-FRAK

02 h 06, le 23 mars 2019

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Commentaires (1)

  • Oh pauvres rebelles! Hahahaha. C'était pas qu'ils ne savaient pas, mais qu'ils ont été démasqués d'avoir été roulés dans la farine. Hahahaha.

    FRIK-A-FRAK

    02 h 06, le 23 mars 2019

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