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Liban - Congrès sur les réfugiés

Joumblatt : Les déplacés ne rentreront pas tant que le régime syrien n’en voudra pas

« Cinq pour cent seulement d’entre eux ont l’intention de retourner en Syrie dans l’année à venir », affirme le ministre de l’Éducation, Akram Chehayeb, lors de son intervention.

Walid Joumblatt, hier, au cours du congrès organisé par le PSP. Photo Hassan Assal

Le chef du Parti socialiste progressiste (PSP), Walid Joumblatt, a déclaré hier que le retour des déplacés syriens ne pourra s’effectuer tant que le régime de Damas refuse ce retour, soulignant être en faveur de l’initiative russe de rapatriement (proposée en juillet dernier), à condition, a-t-il dit, qu’elle comporte « des garanties assurant la sécurité de ceux qui retournent ».La déclaration de M. Joumblatt, en marge du congrès organisé par le PSP sous le thème « Le Liban et les déplacés de Syrie : droits, inquiétudes et diplomatie du retour », intervient dans une conjoncture tendue en raison de la division des responsables au sujet de l’organisation du retour, certains prônant la coopération avec le régime de Damas, d’autres s’y opposant.

« Les réfugiés syriens ont peur de rentrer », a dit M. Joumblatt, affirmant que « depuis le début du conflit en Syrie, le régime a emprisonné et fait disparaître des milliers d’innocents », et que « les arrestations et les actes de torture se poursuivent ». Et le leader du PSP de s’interroger : « Qui pourra assurer aux réfugiés un retour en toute sécurité et garantir qu’ils ne rentrent pas pour se faire torturer et tuer ? »

Le congrès du PSP s’est déroulé à l’hôtel Radisson Blu (Verdun), en présence notamment du ministre de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur Akram Chehayeb, de la représentante au Liban du Haut-Commissariat aux réfugiés de l’ONU Mireille Girard, du ministre d’État pour les Affaires sociales Richard Kouyoumjian, du ministre de l’Industrie Waël Bou Faour, des députés joumblattistes, Marwan Hamadé, Henri Hélou, Bilal Abdallah et Hadi Abou el-Hosn, d’experts et de personnalités du monde politique, éducatif et social.

Dans son intervention, M. Chehayeb a souligné que « le régime syrien a édicté des lois et règlements qui confirment son rejet du retour », martelant que « l’avenir des réfugiés syriens n’est pas au Liban, mais en Syrie, et tout le monde est d’accord là-dessus ». « Le problème ne réside pas seulement dans la reconstruction et les infrastructures, ni dans la réalité économique et sociale : l’obstacle majeur est le climat de peur et d’injustice qui règne en Syrie », a observé M. Chehayeb, ajoutant en outre qu’« avec la confiscation des terres, les lois sur le service militaire obligatoire et le système judiciaire partisan, les sondages révèlent que 5 % seulement des personnes déplacées ont l’intention de retourner en Syrie dans l’année à venir ».

Le ministre de l’Éducation a estimé que « la seule initiative sérieuse pour un retour sûr est l’initiative russe », précisant cependant qu’« il faut davantage de garanties au niveau sécuritaire, psychologique et juridique, pour que les personnes déplacées soient convaincues de retourner ».


(Lire aussi : La Syrie d’Assad fustigée lors de la commémoration de l’assassinat de Kamal Joumblatt)


Trois constantes

Et M. Chehayeb de mettre l’accent sur « trois constantes », à savoir que « la Constitution libanaise est claire en termes de rejet de l’implantation sous toutes ses formes, (que) toutes les forces politiques libanaises refusent l’implantation et sont d’accord sur le droit au retour sûr, et (que) le droit au retour du peuple syrien est un droit sacré si l’on veut préserver le tissu social et l’unité territoriale de la Syrie ».

L’intervenant a par ailleurs affirmé que selon le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR), « 175 000 naissances syriennes au Liban ont été enregistrées ». « Quant au nombre d’enfants âgés de moins de 18 ans, il est d’environ 450 000, alors que 215 000 d’entre eux sont dans les écoles officielles et 60 000 dans l’enseignement privé », a encore rapporté M. Chehayeb, s’inquiétant des conséquences que pourrait générer l’absence de scolarisation des autres jeunes Syriens au Liban.

Le ministre de l’Éducation a assuré dans ce cadre que son ministère « poursuit ses efforts en vue d’obtenir des donateurs un soutien plus grand, ceci afin d’être en mesure de prodiguer un bon enseignement », car, a-t-il dit, « éduquer les enfants déplacés est un devoir humain et social dans l’intérêt du Liban et des personnes déplacées ». « À travers l’éducation, nous consolidons la culture du dialogue et les valeurs de reconnaissance de l’autre, et contribuons à éloigner les jeunes de l’extrémisme et de la violence, ce qui favoriserait à l’avenir l’édification d’une Syrie démocratique et pluraliste, loin du règne du parti unique. »


« Délimiter les facteurs de retour »

Mireille Girard a, pour sa part, affirmé dans son intervention que « la situation est toujours fragile au Liban, même si ce pays a obtenu beaucoup de financement », notant que « la conférence de Bruxelles a confirmé que les pays hôtes ne seront pas abandonnés et que les gouvernements donateurs continueront à les soutenir pour alléger leurs charges ».

Au sujet du rapatriement, la représentante du HCR a estimé que « la reconstruction de la Syrie n’est pas suffisante pour pousser les réfugiés au retour », appelant à « œuvrer pour délimiter les facteurs qui contribueraient à ce retour ».

Prenant la parole, M. Kouyoumjian ne s’est pas empêché de critiquer « les surenchères et le populisme » au sujet du règlement du dossier des réfugiés syriens, sans toutefois nommer le ministre des Affaires étrangères Gebran Bassil, qui avait estimé jeudi dernier que les conférences, dont celle de Bruxelles, donnent de l’argent « pour que les déplacés restent sur place ». « Le financement est en place depuis huit ans et les conférences précédentes s’étaient tenues avec l’accord de gouvernements dont vous faisiez partie », a-t-il rappelé, avant d’interroger : « Que faites-vous pour soulager le Liban du fardeau des personnes déplacées et du soutien de ses communautés hôtes ? » « Oui, nous sommes allés à Bruxelles et avons demandé le retour des déplacés chez eux avec les plus hauts responsables internationaux. Mais qu’avez-vous fait en dehors des enchères et du populisme, à part exploiter la misère et le chômage, et jouer sur les instincts sectaires ? » a-t-il enchaîné.

« Toutes les menaces de faire éclater le gouvernement (M. Bassil avait brandi jeudi la menace d’une chute du gouvernement en cas de non-retour des réfugiés) et tous les tapages ne peuvent occulter la réalité que connaissent plus que d’autres les alliés du régime de Damas, à savoir que les conditions du retour sont en Syrie, et ne se trouvent ni au Liban, ni aux Nations unies, ni dans la Communauté européenne », a martelé M. Kouyoumjian, avant d’ajouter : « Ne laissez pas le régime syrien obtenir de vous la normalisation des relations en contrepartie d’un faux retour, voire d’un non-retour. »


(Lire aussi : À Bruxelles, Hariri appelle à faire pression sur le régime syrien pour le retour des réfugiés)


Recommandations

Le congrès du PSP s’est achevé par la lecture de recommandations, notamment « la nécessité pour le gouvernement d’adopter un plan national global sur le retour des Syriens déplacés et de reprendre en charge le dossier en mettant fin à toutes sortes d’ingérences ».

Les participants à l’événement ont par ailleurs affirmé que « les Nations unies et le HCR ont un rôle dans la gestion du retour et l’examen de la question des garanties et des critères de sécurité avec les autorités syriennes concernées ». Ils ont estimé dans ce cadre que « la Syrie doit prendre des mesures réelles en supprimant tous les obstacles », jugeant à cet égard que « l’initiative russe doit fournir les garanties et exercer des pressions pour garantir les conditions de retour ».

Pour eux, « ce retour nécessite une solution politique juste en Syrie, fondée sur des garanties internationales et sur une déclaration explicite des autorités syriennes montrant qu’elles accueillent et facilitent le retour des personnes déplacées ». « En l’absence de solution politique, les Nations unies doivent poursuivre leur rôle en tant qu’autorité chargée de communiquer avec les autorités syriennes ou avec la Russie », ajoute le texte, affirmant par ailleurs que « la diplomatie libanaise doit appliquer les résolutions internationales dans toutes les plates-formes et instances internationales qui traitent de cette question ». Et de conclure que « l’intérêt stratégique du Liban réside dans une solution politique véritable et globale en Syrie, qui s’attaquerait aux effets de la guerre et à ses répercussions, et qui croirait en un retour de tous les réfugiés afin de préserver la pluralité et le tissu social ».


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commentaires (7)

Il y a environ 1.5 à 2 millions de syriens du Liban qui ne veulent pas trop voir de près leur « héros » assad . Sans compter ceux de Jordanie et de Turquie . Tout comme assad n’a pas trop envie de revoir ses compatriotes vu le défaut d’empressement de ce dernier. Pas trop héroïque tout ça !

L’azuréen

22 h 39, le 19 mars 2019

Tous les commentaires

Commentaires (7)

  • Il y a environ 1.5 à 2 millions de syriens du Liban qui ne veulent pas trop voir de près leur « héros » assad . Sans compter ceux de Jordanie et de Turquie . Tout comme assad n’a pas trop envie de revoir ses compatriotes vu le défaut d’empressement de ce dernier. Pas trop héroïque tout ça !

    L’azuréen

    22 h 39, le 19 mars 2019

  • Je pense que Bachar el Assad ne les veut pas c'est un beau cadeau pour le Hezbollah , la Syrie ne veut pas la paix elle est bien comme ça même pour Israel

    Eleni Caridopoulou

    17 h 59, le 19 mars 2019

  • Vous croyez vraiment que Assad va les prendre de si tot? Actuellemet cest son arme pour semer la zizanie a l'interne... Aoun and co se mettent un doigt dans l'oeil, ils pensent que avoir une relation normale avec lui va aider...il a rien a cirer, il veut detruire le Liban, et il utilise Aoun and co. pour cela.

    Jack Gardner

    13 h 41, le 19 mars 2019

  • Qu'il les prenne tous chez lui tanChouf!

    Tina Chamoun

    13 h 00, le 19 mars 2019

  • - Les déplacés syriens depuis 8 ans ne rentreront pas en Syrie tant que le régime syrien n'en voudra pas. - Les réfugiés palestiniens depuis 71 ans ne rentreront pas en Palestine tant qu'Israél n'en voudra pas. - Les armes les plus sophistiquées du Hezbollah ne rentreront pas en Iran, tant que l'Iran n'en voudra pas. - Mais à part ça, tout va très bien Madame la Marquise.

    Un Libanais

    11 h 07, le 19 mars 2019

  • On n a rien a faire avec les problèmes, et le suivi et la politique des Syriens ici chez nous au Liban! c est un processus classique:on introduit le virus dans un pays,puis on leur fait réclamer des droits,on invente des causes et raisons que la raison ne connaît pas, et on les implante chez nous,comme invasion dormante. GVNT Libanais,ça suffit 8 ans d occupation chez nous,ces syriens sont pour leur Syrie,les libanais deviennent des réfugiés démunis sur leur propre TERRE.

    Marie Claude

    10 h 09, le 19 mars 2019

  • TOUT LE MONDE SAIT QUE LE REGIME SYRIEN N,EN VEUT PAS. IL N,Y AURA PAS DE RECONSTRUCTION SANS UNE SOLUTION POLITIQUE EN SYRIE, DES REFORMES ET LE RETOUR DES REFUGIES. QUAND ? C,EST LA LE PROBLEME. CA PEUT PRENDRE UNE A DEUX DECENNIES AU MOINS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    06 h 38, le 19 mars 2019

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