Rechercher
Rechercher

Liban - Comptes publics

Siniora rend au Hezbollah la monnaie de sa pièce

L’ancien Premier ministre a tenu sa conférence de presse entouré des députés du courant du Futur et de certaines figures du 14 Mars

« Est considéré corrompu politique quiconque établit un État au sein de l’État, en contrôle les grands services, empêche la loi d’atteindre qui ce soit, où que ce soit, bloque les échéances constitutionnelles et barre la voie à l’application des lois qu’il exploite en fonction de ses besoins », a martelé Fouad Siniora durant sa conférence de presse. Photo Dalati et Nohra

L’ancien Premier ministre Fouad Siniora a procédé à une contre-attaque frontale en règle contre le Hezbollah, au cours de la conférence de presse qu’il a tenue hier au siège du syndicat de la presse, pour répondre à la procédure judiciaire déclenchée par le député hezbollahi Hassan Fadlallah, dans l’affaire dite des irrégularités dans la comptabilité publique entre 1993 à 2010.

Plus important peut-être que la contre-attaque est le niveau de participation politique à la conférence qui s’est déroulée en présence des députés du bloc parlementaire du Futur, et de plusieurs figures du 14 Mars, dont les députés Marwan Hamadé (bloc Joumblatt) et Nadim Gemayel (bloc Kataëb), les anciens députés Boutros Harb, Farès Souhaid et Nabil de Freige, ainsi que l’ancien ministre Ibrahim Najjar.

Si un doute persistait sur une éventuelle motivation politique derrière l’initiative de Hassan Fadlallah de soumettre au procureur financier, Ali Ibrahim, les documents en rapport avec la comptabilité publique, la présence massive des députés du bloc parlementaire du Premier ministre, Saad Hariri, et des figures du 14 Mars est venue le balayer hier et cautionner, à la même occasion, le discours anti-hezbollahi que Fouad Siniora a tenu, après avoir longuement disséqué, tableaux à l’appui, la valse des chiffres durant la période mise en cause par M. Fadlallah.


(Lire aussi : Gestion des comptes publics : les principaux arguments de Fouad Siniora)


Le premier effet de la démarche du député hezbollahi auprès du parquet financier a été ainsi de reconstituer le groupe du 14 Mars autour de Fouad Siniora, un faucon du courant du Futur qui a tenu tête au Hezbollah, un an et demi durant, en 2006-2007, lorsque ce parti avait assiégé le centre-ville de Beyrouth pour obtenir la démission de son gouvernement. Cette démarche a en outre généré une réapparition des lignes de fracture entre deux camps qui divergent fondamentalement sur le mécanisme d’édification de l’État. Avant même que Fouad Siniora ne tienne sa conférence de presse, le bloc parlementaire du courant du Futur avait violemment dénoncé, mardi, une tentative de régler de vieux comptes dans laquelle elle a également vu une atteinte directe au fondateur du parti, Rafic Hariri.

La virulence du ton employé aussi bien par le courant du Futur que par Fouad Siniora, qui ont tous deux dénoncé en substance un comportement sélectif, douteux et déplacé, ne s’inscrivant pas dans une perspective véritable de lutte contre la corruption, laisse supposer que la confrontation est maintenant ouverte avec le Hezbollah.

Longuement applaudi, M. Siniora a employé la même tactique que Hassan Fadlallah. À aucun moment dans sa diatribe contre le Hezbollah il n’a nommé ce parti ou son député qui prenait soin dans ses interventions de préciser que son initiative s’inscrit dans le cadre de la lutte que le Hezb a décidé de mener contre la corruption et que ce n’est pas M. Siniora qui était visé. Ce dernier a articulé son discours sur le thème de la corruption, accusant donc sans le nommer le parti de Hassan Nasrallah de « distraire la population et de l’empêcher de suivre les dossiers fondamentaux, pour pouvoir s’assurer que personne ne mènera la véritable bataille contre la corruption ».


(Lire aussi : Le Hezbollah joue sur un terrain du CPL... sans le CPL)


Corruption politique

« Les campagnes de dénigrement et les supercheries auxquelles s’emploient certaines personnes malintentionnées provoquent en définitive une tension, des discordes et une instabilité. Elles barrent la voie dans le même temps à des solutions, comme c’est le cas avec l’affaire des 11 milliards de dollars qui n’est en définitive qu’une tempête dans un verre d’eau et qui aurait pu être réglée pour peu qu’on applique les procédures en vigueur dans le domaine de la comptabilité publique », a-t-il affirmé, avant de lancer : « La corruption politique reste la plus grande des corruptions et le plus grand fléau. Est considéré corrompu politique, quiconque établit un État au sein de l’État, en contrôle les grands services, empêche la loi d’atteindre qui ce soit, où que ce soit, bloque les échéances constitutionnelles et barre la voie à l’application des lois qu’il exploite en fonction de ses besoins. »

Poursuivant sur sa lancée, il a fulminé contre « ceux qui s’érigent en responsables de la comptabilité publique sans avoir l’autorité morale ou légale nécessaire pour juger les autres et qui refusent absolument de se soumettre à la loi de la comptabilité en se réfugiant derrière leur rhétorique bilieuse et la grossièreté de leur verbe afin de pouvoir se maintenir en place ». « Ceux-là resserrent dans le même temps leur emprise sur le reste des Libanais, mettant en cause en permanence leur patriotisme, leur honneur et leur intégrité », a ajouté Fouad Siniora, accusant le Hezbollah d’agir comme s’il procédait à des « exécutions sommaires, s’érigeant en maître absolu qui se permet de disposer des recettes et des taxes douanières de l’État, lequel devient de ce fait une ferme dont il récolte les fruits sans rien y planter ».

« Celui qui s’est embourbé dans sa propre impasse politique, qui s’est impliqué dans des conflits régionaux et internationaux, mettant en danger les intérêts du Liban, des Libanais et de l’État et bloquant leurs institutions et leurs échéances constitutionnelles, qui a empêché la vie économique de suivre son cours normal, détourné les recettes douanières à travers des taxes douanières qui lui sont propres, hypothéqué la décision de paix et de guerre, lancé des guerres destructrices pour le Liban qui s’est vu incapable, à cause d’elles de réaliser une croissance durable, qui n’a pas voulu déclarer à l’État les montants des dons iraniens, qui se comporte en agent d’un régime étranger, qui a agressé des civils, qui essaye d’entraîner le Liban dans une politique des axes et qui viole la politique officielle de distanciation ne peut pas, pour sortir de son impasse, se réfugier derrière un nuage de fumée parce que nous avons la capacité de le dissiper », a-t-il encore martelé. « Ces gens-là n’ont pas le droit de porter de jugements et de lancer des accusations », a ajouté Fouad Siniora.

Il a insisté sur la nécessité d’une neutralité de l’État et dénoncé « une tentative de fabriquer de faux dossiers », en s’abstenant cependant de préciser s’il compte ou non comparaître devant le procureur financier si jamais ce dernier le convoque dans le cadre de l’enquête relative au dossier qui lui a été remis par Hassan Fadlallah.


Lire aussi

Corruption, mode d’emploi, l'éditorial de Issa GORAIEB

Corruption : Hassan Fadlallah parle de documents qui vont "mener de nombreuses personnes en prison"

CEDRE : le gouvernement attendu au tournant pour le budget 2019

Kanaan va demander une enquête à la Cour des comptes

Recrutements abusifs dans la fonction publique : le point sur les chiffres

Les responsables politiques au défi de la lutte contre la corruption


L’ancien Premier ministre Fouad Siniora a procédé à une contre-attaque frontale en règle contre le Hezbollah, au cours de la conférence de presse qu’il a tenue hier au siège du syndicat de la presse, pour répondre à la procédure judiciaire déclenchée par le député hezbollahi Hassan Fadlallah, dans l’affaire dite des irrégularités dans la comptabilité publique entre 1993 à...

commentaires (11)

Est-ce que Hassan Nasrallah paie ses impôts?

M.E

07 h 23, le 08 mai 2019

Tous les commentaires

Commentaires (11)

  • Est-ce que Hassan Nasrallah paie ses impôts?

    M.E

    07 h 23, le 08 mai 2019

  • Tous ces gens la sont contre la corruption et en sont les ténors, ils sont tous patriotes et dépendent de pays étrangers, ils sont tous pour l'application de l'accord de Taef qui est devenu partie de la constitution et tous la bafoue journellement... Inutile de perdre sont temps a espérer en voir des résultats car c'est en effet pour éviter de discuter des vrais problèmes du pays dont l'essentiel sont les armes du Hezbollah. Çà réglé, le reste le sera très vite...

    Pierre Hadjigeorgiou

    15 h 07, le 04 mars 2019

  • Des milliards ont été volés par toutes les formations. C’est un secret de polichinelles. Le temps est venu aux réformes et au travail d’arrache-pied ...donc bougez vous et n’oubliez pas l’essentiel.

    L’azuréen

    22 h 29, le 02 mars 2019

  • DANS TOUS LES CAS, TOUT CE BEAU MONDE - JE DIS BIEN TOUS- peuvent dormir sur leurs 2 oreilles. le temps que ce fameux tribunal special pour juger bla bla - soit véritablement opérationnel - SI JAMAIS il le serait - bcp de ces protagonistes seraient deja seniles, ou alors ds le meilleur des cas -prescription oblige - devenus intouchables. Visiblement je vise TOUT LE MONDE qui aura participe directement, indirectement, par correspondance, via un ou plusieurs tiers( pour mieux chacher tte association au vol),Y COMPRIS leur famille directe . A DIEU NE PLAISE BIEN SUR, puisque probablement on ne trouvera aucune Irrégularité durant ces 20- 25 ans ! NO foul play! tout le monde il beau, tout le monde il est gentil quoi.

    Gaby SIOUFI

    13 h 37, le 02 mars 2019

  • DE GRACE METTEZ-VOUS AU TRAVAIL SUR LES REFORMES. QUE CEUX QUI ONT DES PREUVES CONCRETES SUR DES CORROMPUS LES COMMUNIQUENT DIRECTEMENT A LA JUSTICE ET LAISSEZ LA JUSTICE S,EN OCCUPER. UNE COMMISSION DE LA CORRUPTION SERAIT LA BIENVENUE EN COLLABORATION AVEC LA JUSTICE. HONTE DE SE LA BALANCER VIA LES MEDIAS CAR C,EST UNIQUEMENT PECHER EN EAU TROUBLE POUR EMPECHER LES REFORMES... QUE DIEU ECLAIRE LES CERVEAUX... LA OU IL Y EN A... POUR LE BIEN DU PAYS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 27, le 02 mars 2019

  • En somme nous devons conclure que Mr Siniora est une innocente victime de la hargne du Hezbollah a son egard.

    Cadige William

    10 h 31, le 02 mars 2019

  • C'est de son droit de se défendre par tous les moyens légaux dans un cadre legal mis à sa déposition, il n'empêchera qu'il devra répondre de ses actes délictueux ÉVIDENTS durant sa mandature. Il ne pourra plus jamais noyer le poisson, il doit répondre de ses actes encore sous le coup de la loi du NOUVEAU LIBAN LIBRE ET INDÉPENDANT. Ou alord s'il est un délinquant intelligent, il plaide coupable et demande une transaction qui attenuerait la peine. Sinon , il se rendra très vite compte que les preuves contre lui affleurent le sol. Mr signora signera. Vous verrez bientôt !

    FRIK-A-FRAK

    09 h 36, le 02 mars 2019

  • Vous n'avez pas participé à la mise à mort de la Syrie par son boucher et n'avez pas de sang sur les mains Mr Siniora, c'est votre honneur de patriote libanais; pour le reste, la corruption étant endémique et généralisée et la justice et les médias "aux ordres" dans ce pays, il serait temps que le volet économique en soit confié à un "gendarme" international.

    Christine KHALIL

    09 h 29, le 02 mars 2019

  • Qu'il commence par rendre les pièces sonnantes et tellement trébuchantes volatilisées lors de son triste mandat! Ce n'est un secret pour personne, je dirai même plus, c'est un secret de polichinelle.

    Tina Chamoun

    09 h 09, le 02 mars 2019

  • Selon moi, l'OLJ se trompe de bataille en prenant fait et cause pour "le 14 mars": il ne faut pas transformer ce scandale en conflit politique. laissez faire la justice. Reconstituer le 14 mars autour de Fouad Siniora ne peut qu'entraver le travail de la justice.

    Marionet

    08 h 54, le 02 mars 2019

  • Ceux qui peuvent mettre à la disposition de la justice des cas de corruption avérées preuves à l'appui. qu'ils le fassent le plus rapidement. Mais de grâce qu'on cesse de balancer des accusations de part et d'autres dont le seul but serait la neutralisation de toute actions gouvernementales... En attendant le peuple attend les réformes les infrastructures, les solutions pour les déchets, une centrale électrique, une vraie digne de ce nom etc.... Un gouvernement d'aspiration nationale est une équipe plus solidaire, plus homogène dans ses réflexes.

    Sarkis Serge Tateossian

    04 h 42, le 02 mars 2019

Retour en haut