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Lifestyle - Beyrouth Insight

Les festins de Joanna (Debbas)

La terre, les produits, la cuisine. Et les gens. Quatre mots d’ordre et sa philosophie.

Joanna Debbas. Photo DR

Trois ans déjà qu’elle a déposé ses saveurs et son sourire au musée Sursock. « Comme le temps passe vite », constatons-nous en chœur, à l’heure et au mois des bilans. Trois ans que Joanna Debbas a contribué à ajouter à ce lieu magique d’autres raisons de rester, celles de venir étant ce magnifique rendez-vous avec la culture et l’élégance. Depuis qu’elle a créé le Sursock Museum Resto, toutes les occasions sont bonnes pour revenir, rester, après avoir dégusté des nourritures culturelles, se remplir de saveurs réinventées. Traîner sur la terrasse en été, tard dans l’après-midi ou le soir, souvent, pour déguster un vin pétillant. Écouter de la musique live, Rama Tibi à la guitare et au oud pendant un an, Marilynn & the Band, Roya Semaan & Side B, les sœurs Papin, Zeid Hamdan & the Wings ou encore Arthur Satyan et son groupe. Amuser les enfants en sculptant des citrouilles, respirer enfin un vent de légèreté dépaysant qui dépoussière la mélancolie des dimanches.

Elle l’avait dit, en 2015, au lendemain de l’ouverture de son restaurant : « Le plus dur reste à venir. Garder le niveau et s’améliorer sans cesse. Il ne faut pas avoir peur de prendre des risques. Je suis persuadée que lorsqu’une personne est déterminée, elle finit par atteindre son objectif. »

En cette matinée de janvier pluvieuse, les visiteurs, libanais et étrangers, se retrouvent pour déjeuner à l’intérieur du restaurant, dans une belle intimité. Dehors, les deux pleureuses veillent en versant une larme sur ce pauvre pays qui est le leur. Et Joanna veille, avec le sourire, un sourire qui ne la quitte jamais, à ce que ce lieu qui lui ressemble, imprégné de ses parfums, fonctionne bien. En vraie pro. Et pourtant, ce métier, elle l’a appris sur le tard même si elle en rêvait depuis longtemps. Même, si, comme elle le précise : « À quinze ans, je savais déjà que je voulais ouvrir un restaurant! » et que, toute jeune également, elle troquait ses poupées contre une terre généreuse qu’elle pétrissait à souhait pour créer des poteries. « Tout est relié! » En effet, cet amour de la terre va la rattraper, en dépit d’études de communications and arts à la LAU. Un peu, beaucoup, « par instinct », par passion aussi, Joanna Debbas travaille la terre de son père, plante, cueille, vend à Souk el-Tayeb et dans certains restaurants des produits sous le label Joanna’s Fresh Greens. Pour les mettre dans une assiette, il suffisait d’un pas qu’elle a rapidement franchi. « Très tôt, je cuisinais à la maison, je testais des recettes. J’aime aussi beaucoup manger ! » dit-elle en riant. En 2012, elle installe sa cuisine à Kitsch, un concept store à Gemmayzé, apprend tout ou du moins l’essentiel. « C’était dur, je me sentais à l’étroit. »

Du beau et du bon

Quelques courtes années plus tard, elle plie son tablier et l’embarque avec elle dans une nouvelle aventure au musée Sursock où, précise-t-elle, « c’était très difficile, encore plus difficile… » « L’équipe était plus grande, j’ai dû gérer deux cuisines, prendre de nouvelle habitudes et m’adapter à d’autres conditions », ajoute-t-elle. Pour ce premier véritable restaurant dans un musée à Beyrouth, il lui a fallu aussi créer de nouvelles habitudes aux citadins, qui sont immédiatement devenues de belles habitudes. « Ma priorité est le client. Qu’il reparte satisfait, heureux. Je suis, dit-elle, très attentive à ce que les gens ont envie d’avoir dans leur assiette.»

Elle propose donc une carte « de musée, des plats comme à la maison, avec les saveurs que j’aime partager et faire découvrir ». Elle offre aussi des expériences musicales, artistiques, ludiques, en dépoussiérant au grand dam des conservateurs le concept un peu vieilli de musée, en y ajoutant de la vie, des couleurs, des parfums. « C’est une très belle expérience qui m’a appris à mettre mes émotions et ma sensibilité de côté. J’y suis presque tout le temps, et c’est important. Important aussi de pouvoir accepter les remarques, les plaintes des clients frustrés ou déçus, et gérer les difficultés quotidiennes. » Et pourtant, pour ces quelques heures de libres qui lui restent par semaine, Joanna Debbas vient de (re)lancer son service catering, The New Kitchen by Joanna Debbas, pour une personne, une famille, un groupe ou un établissement. « Le travail ne m’effraie pas, j’aime préparer de belles tables et de bons plats. » En 2019, elle espère pouvoir continuer, tout en précisant, abandonnant un court instant son sourire – arme de défense : « Ce pays est frustrant. Continuer est une façon de résister. » Dans ses projets proches, des soirées de jazz, la première aura lieu le 18 janvier – le restaurant sera transformé en lounge, pour un soir –, et des rêves : « La seule chose que je n’ai pas faite : apprendre et cuisiner en Europe. »


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commentaires (1)

Cet article donne envie d'aller essayer une fois ce restaurant et de visiter ce musée fameux ...

Stes David

14 h 00, le 10 janvier 2019

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Commentaires (1)

  • Cet article donne envie d'aller essayer une fois ce restaurant et de visiter ce musée fameux ...

    Stes David

    14 h 00, le 10 janvier 2019

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