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Culture - À l’affiche

Colette : charmant, mais sans émotion(s)

Des acteurs très britanniques pour l’histoire très française d’une écrivaine française qui a combattu toutes les normes relatives au genre et a milité pour le droit des femmes. Biopic ou simplement extrait de vie ?


Keira Knightley dans le rôle de Colette. Photo prise du site du Festival de Sundance

De son vrai nom Sidonie-Gabrielle Colette, l’écrivaine, née en 1873, passe une enfance heureuse à Saint-Sauveur en Puisaye, avant d’épouser à 20 ans son premier mari, Henry Gauthier-Villars, un homme bien plus âgé, au charme viril, reconnu comme un écrivain et libertin parisien sous le pseudonyme de Willy. La jeune provinciale suit son époux à Paris et découvre un monde qui lui est totalement inconnu où libertés sexuelles et artistiques sont expérimentées comme un art de vivre. Dans les cercles mondains et littéraires de la capitale où Willy l’introduit, sa beauté et son esprit se font remarquer. Dépensier, son mari ne gagne suffisamment pas d’argent pour assurer son train de vie. Il demande donc à sa femme d’écrire quelque chose de « vendeur » qui sera édité sous son nom. C’est le début de la saga des « Claudine » et par conséquent, de l’émancipation de la jeune femme. Mais le mariage de Colette et Henry bat de l’aile. Le couple s’installe dans une sorte de mariage fluide ; les relations extérieures sont acceptables, mais mentir ne l’est pas. Henry, exigeant et autoritaire, enferme Colette dans une pièce et lui ordonne de produire plus de contenu. Celle-ci s’exécute.


« Jalousies volcaniques »
Premier film réalisé par Wash Westmoreland depuis la mort de son scénariste Richard Glatzer, Colette s’impose comme un film biographique intéressant, mais pas plus. C’est la période au cours de laquelle la grande auteure française est passée de la phase d’une jeune fille innocente et démunie, à une artiste indépendante. Sa métamorphose permet de nombreux changements de costume souvent non conventionnels pour l’époque, et certains monologues de Keira Knightley, alias Colette, sont d’une fougue satisfaisante. Westmoreland joue habilement le décor Belle Époque, ce qui compense le fait d’avoir choisi des acteurs très britanniques pour raconter une histoire très française. Le casting est, en effet, très uniforme. Dans le rôle phare, Keira Knightley, esthétiquement raffinée, pertinente, offre à voir une prestation remarquable. Dominic West (qui a pris du poids) se tire d’affaire dans un rôle de cynique non assumé. De même que les autres protagonistes. Colette n’est pas qu’une plume. Avant-gardiste, la jeune femme bisexuelle a ouvertement des aventures. Le film coche bien toutes les cases sauf qu’il passe à côté de la vie de cette femme dont le parcours fut long, contradictoire et difficile à manier.Dans ce film très linéaire, mais fidèle à la vie de la fameuse écrivaine, le réalisateur ne sombre pas dans le mélodrame ou le surchargé. Il se concentre plutôt sur le fait de présenter Colette comme une femme en avance sur son temps. Il dépeint parfaitement le côté imprévisible de Willy et son charme confiant et séducteur, mais survole la vie intime de Colette. Une seule et unique scène – où elle interprète une pièce de théâtre étrange et dangereusement érotique – touche au cœur de sa nature intrinsèquement subversive.

Et tandis que Willy parle des « jalousies volcaniques » de Colette et de ses humeurs « capricieuses », le spectateur ne le voit jamais réellement. Ainsi, bien que la charmante performance de Knightley s’adapte parfaitement à cette approche sobre, elle a rarement la possibilité de se connecter de manière authentique avec son personnage. Le film omet donc de raconter Colette devenue l’une des premières journalistes-reporters de guerre, celle qui a écrit un roman à succès abordant sa relation avec le beau-fils de son second mari ou celle encore qui a sauvé son troisième mari juif. Celle, enfin, qui a influencé tant de grands esprits de son époque, et qui a vécu assez longtemps pour être embarrassée, humiliée et célébrée par la même société. Le principal objectif de Westmoreland est de présenter une héroïne attrayante dont l’histoire résonne encore aujourd’hui. Il accomplit cet objectif sans difficulté.

Avions-nous besoin de tant de moments de confrontation entre le patriarcal Willy et l’indépendante Colette ? Et ne doit-on pas se demander pourquoi raconter l’histoire d’une iconoclaste avant-gardiste et ambisexuée si l’intention était de jouer autant la prudence ?

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