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Marie Abou Khaled

Génération Orient III : #12 Marie Abou Khaled, musicienne, 23 ans

Souvent, sans le savoir, on a rêvé de Marie Abou Khaled. Comme, par exemple, quand on écoutait Oum Kalthoum, Feyrouz et Warda en pensant qu’il serait nécessaire que cette lignée d’artistes orientales transmette son flambeau à une descendance digne de ce titre. Des petites filles d’adoption capables de fleurir sur les ramures de cet imposant arbre généalogique musical, tout en irriguant leurs racines en solitaire. Les influences musicales de la frêle libanaise de 23 ans, son timbre de soleil changeant ainsi que son ambitieux Saltanah, premier album (écouté en avant-première pour la préparation de cet article) dont le single Kermelak vient d’être lancé, promettent déjà d’assouvir ce fantasme.

Frêle ? Oui, au quotidien, où une élégante timidité n’empêche pourtant pas de faire craqueler la porcelaine de son teint pour en exhumer une personnalité bétonnée, au parcours, aux velléités et aux rêves étonnants. Mais frêle, certainement pas sur scène : le théâtre de poche qu’elle improvisait, à la petite l’enfance, dans le salon familial pour y incarner toute l’intensité d’Esméralda de Notre-Dame de Paris ; ensuite le plateau qu’elle foulait du haut de ses 8 ans, dans le cadre d’un télé crochet de la Rai Uno, Zecchino D’oro. Le chant de sirène de la toute petite Marie prenait déjà à la gorge et aux tripes, et lui avait valu le premier prix dans la catégorie internationale, à la faveur de Il Cielo Di Beirut, un titre hommage à sa ville, écrit par sa maman Fifi Abou Dib. Ensuite, à l’ombre de cette dernière dont elle aurait hérité « l’amour des gestes simples et la valeur du travail », de son père Amine Abou Khaled qui lui a inculqué le goût des belles choses et « appris à ne pas me faire marcher sur les pieds », de sa marraine Aline avec qui elle se « recharge les piles dans la nature », Marie laisse éclore son talent et ne quitte son pupitre que pour s’exercer sur un piano reçu à l’âge de 4 ans. Au Lycée Français de Beyrouth, avec son meilleur ami Michael Keldany, elle crée Prédilection, un groupe de musique à capella, où elle chante et compose les arrangements musicaux, et autour duquel se retrouvent les « un peu à l’écart, comme nous » qui y voyaient une oasis de réconfort, en retrait des tourments de l’adolescence. Marie se souvient, en plus d’avoir découvert, à la faveur d’une reprise de Zombie des Cranberries, « qu’on pouvait chanter sans que ce ne soit forcément joli », de ce moment de communion musicale où elle s’est rendue compte, dans cette étape très dure qu’elle traversait, du pouvoir de la musique. « Elle est pour moi un sauvetage et un refuge ».

Doigts de fée

Pas étonnant, donc, que cette élève exigeante, modèle mais jamais modelée, ait choisi d’emprunter, au moment de faire ses armes, un chemin ardu qui la mènera à l’AUB d’où elle décroche un diplôme de CCE (génie informatique et télécoms). Dans les sous-bois de la technologie, elle trouve tout de même le moyen d’explorer des champs musicaux et fabrique un instrument pour son projet de licence. Et si, parallèlement, avec le peu de temps qu’il lui reste, Marie Abou Khaled ne produit « pas assez » de musique (avec son ami, le pianiste Alex Boulos), les morceaux qu’elle poste sur son compte SoundCloud suffisent à dévoiler son spectre vocal tellement large qu’on ne pense plus voix mais instrument iridescent, capable de toutes les prouesses. Tant et si bien qu’elle retient l’attention de Zeid Hamdan, lors de leur rencontre en 2017, lequel l’invite aussitôt à rejoindre son groupe The Wings et encourage sa décision de postuler à l’université de Goldsmith où son portfolio est immédiatement retenu pour un Master en Pop Music. Au cours de cette année à Londres, en Pénélope exilée, elle tisse un album de 7 titres où sa voix d’elfe caresse l’épiderme de sonorités à la croisée du tarab et de l’éléctro. Un carnet de bord intime, un inventaire pudique qui lui a permis d’interroger son identité complexe de libanaise par le bias du tarab qui lui semblait étranger, et dont le premier extrait, Kermelak, a été lancé ce 6 décembre. Ça s’appelle Saltanah, en référence à la trans musicale qui anime un moutrib au moment de créer, ou celle qui habite Marie dès lors qu’elle fredonne deux notes.

Pour la production de Saltanah, si la bonne fée Zeid Hamdan s’est penchée sur son berceau, rejoint par Marc Codsi et Jérémie Reigner, Marie Abou Khaled sera également aux commandes. Petite Marie est donc sortie de son cocon et la jeune femme-papillon qu’elle semble déjà être flotte et avance en orbite vers son rêve, désormais à portée de doigts. Ses doigts de fée.

Souvent, sans le savoir, on a rêvé de Marie Abou Khaled. Comme, par exemple, quand on écoutait Oum Kalthoum, Feyrouz et Warda en pensant qu’il serait nécessaire que cette lignée d’artistes orientales transmette son flambeau à une descendance digne de ce titre. Des petites filles d’adoption capables de fleurir sur les ramures de cet imposant arbre généalogique musical, tout en...

commentaires (1)

Très joli grain de voix jazzy et cette artiste a su s'entourer d'auteurs et compositeurs de grand talent. Tous les ingrédients du succès. Écouté ce matin kermelak qui a fini de me convaincre de miser sur ce grand talent pour le présent et l'avenir.

Marionet

09 h 38, le 10 janvier 2019

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Commentaires (1)

  • Très joli grain de voix jazzy et cette artiste a su s'entourer d'auteurs et compositeurs de grand talent. Tous les ingrédients du succès. Écouté ce matin kermelak qui a fini de me convaincre de miser sur ce grand talent pour le présent et l'avenir.

    Marionet

    09 h 38, le 10 janvier 2019

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