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Liban - Éclairage

Aoun ne signerait pas le décret de formation d’un gouvernement qui comprendrait un sunnite prosyrien


Le président Michel Aoun s'exprimant devant le Parlement européen, à Strasbourg, le 11 septembre dernier. REUTERS/Vincent Kessler/File Photo

Le Premier ministre désigné, Saad Hariri, est loin d’être seul dans l’épreuve de force dans laquelle il est engagé avec le Hezbollah autour de la nomination d’un ministre sunnite prosyrien au sein de sa nouvelle équipe. Le président Michel Aoun, qui n’avait pas caché son mécontentement lorsque, après le règlement du nœud dit chrétien, le parti de Hassan Nasrallah avait exigé qu’un des six députés sunnites gravitant dans l’orbite syro-iranienne soit nommé dans le nouveau gouvernement, est lui aussi intransigeant sur la question. Selon ses visiteurs, Michel Aoun ne signera pas le décret de formation d’un gouvernement qui comprendrait parmi ses membres un ministre sunnite de l’axe syro-iranien qui mettrait Saad Hariri en minorité dans la nouvelle équipe ministérielle, appelée, dit-on, à durer jusqu’à la fin du sexennat.

La raison derrière l’intransigeance présidentielle ne réside pas seulement dans le refus du chef de l’État de s’associer à une manœuvre dont la finalité est surtout d’affaiblir Saad Hariri, au plan politique, surtout au niveau de la rue sunnite, mais s’explique aussi par le besoin de ne pas donner à Israël un prétexte pour mettre à exécution ses menaces, relayées par les capitales occidentales à une fréquence qui commence à inquiéter les dirigeants libanais. Selon des sources diplomatiques occidentales, le président français Emmanuel Macron avait mis en garde son homologue libanais, durant l’entretien qu’il avait eu avec lui en marge du Sommet de la francophonie à Erevan, sur la gravité de la politique suivie par le Liban et sur la nécessité pour le pays de se conformer rigoureusement à la politique de distanciation et de s’éloigner de la politique des axes. Il faisait notamment allusion à l’affaire des missiles du Hezbollah dans le périmètre de l’aéroport, évoquée par le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, en septembre à l’ONU, démentie par le Liban, alors que le secrétaire général du parti de Dieu, Hassan Nasrallah, avait laissé planer le flou sur la question.


(Lire aussi : Entre dérobades et langue de bois, le nœud sunnite reste entier)


Par la suite, les mises en garde occidentales se sont succédé, au point que certaines capitales ont fait brandir la menace de revenir sur les engagements financiers, qu’elles avaient promis dans le cadre de la CEDRE, si le Liban ne se conformait pas à la lettre à la politique de distanciation. Et si le président Michel Aoun est récemment revenu à la charge pour démentir la présence d’arsenaux du Hezbollah autour de l’AIB, c’est en raison des messages israéliens, guère rassurants, qui lui avaient été relayés par des émissaires occidentaux, notamment par Aurélien Lechevallier, conseiller diplomatique d’Emmanuel Macron, qui a effectué récemment une visite de deux jours à Beyrouth, où il a mené discrètement une série de pourparlers. Il s’est entretenu pendant une heure et demie avec Gebran Bassil, ainsi qu’avec des conseillers de Michel Aoun et du président de la Chambre, Nabih Berry.

En dépit du secret qui a entouré ces discussions, de sources informées, on a indiqué que M. Lechevallier, qui avait visité Israël fin octobre, dépêché par le président français à Jérusalem et à Ramallah pour des pourparlers sur le processus de paix entre Israël et les Palestiniens, a informé ses interlocuteurs libanais de sérieuses menaces israéliennes, concomitantes aux sanctions américaines sur l’Iran. Il les aurait avertis que Tel-Aviv pourrait frapper les ateliers où les missiles sont confectionnés ainsi que les arsenaux où ils prétendent que le Hezb cache ses armes près de l’aéroport, tout comme ses forces aériennes avaient frappé les caches d’armes iraniennes et du Hezbollah en Syrie. De sources diplomatiques occidentales, on indique que le vice-président du Conseil national israélien de sécurité, Eitan Ben David, aurait demandé à Aurélien Lechevallier, lors d’un entretien avec lui, de transmettre aux Libanais un message selon lequel « Beyrouth devrait mettre fin à la crise des missiles du Hezbollah, sinon Israël la réglerait à sa façon ». Eitan Ben David aurait aussi dit à son hôte que « Tel-Aviv s’est fixé un délai pour régler cette crise, mais qu’il est prêt à le prolonger si le dossier peut être résolu par les voies diplomatiques », tout en faisant savoir qu’« il n’est pas question pour mon pays de garder les bras croisés face à cette menace et de se plier à un fait accompli ».


(Lire aussi : Entre Aoun et Hariri, il y a plus que des intérêts politiques, le décryptage de Scarlett Haddad)


Le Liban affirme cependant considérer les menaces israéliennes comme une tentative de trouver une excuse pour une éventuelle attaque contre son territoire, simultanément avec les sanctions américaines contre l’Iran. Un sentiment conforté par le discours de Benjamin Netanyahu qui, selon des sources occidentales, avait anticipé l’initiative française en direction du Liban en adressant lui-même un message à Téhéran, par le biais des dirigeants du sultanat de Oman où il se trouvait en octobre dernier, pour leur demander « de cesser de mettre au point de nouveaux missiles au Liban et d’éviter ainsi à ce pays une nouvelle guerre ». Un message qui rejoint celui d’Eitan Ben David.


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commentaires (6)

C’est une machine destructrice qui est en marche .

L’azuréen

17 h 41, le 09 novembre 2018

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Commentaires (6)

  • C’est une machine destructrice qui est en marche .

    L’azuréen

    17 h 41, le 09 novembre 2018

  • CHER PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE, SIGNEZ LA MOUTURE PRESENTEE A VOUS PAR HARIRI ET METTEZ TOUT LE MONDE SOUS LE FAIT ACCOMPLI CONSTITUTIONNEL. ET SI LE TANDEM CHIITE NE DONNE PAS DES NOMS POUR SES MINISTRABLES PROCEDEZ A EN NOMMER... LA SURVIE DU PAYS ECONOMIQUE ET POLITIQUE DOIT PRIMER TOUTE AUTRE RAISON.

    LA LIBRE EXPRESSION

    14 h 57, le 09 novembre 2018

  • Je me souviens que l'usurpie avait planifié une guerre CONTRE LE LIBAN courant 2018 . Que cette entité se dépêche , je lui rappelle qu'on est en mi Novembre 2018 . Mais bon Dieu de bonsoir , depuis quand l'usurpie demande qu'on intervienne pour elle ? Aux français et maintenant aux OMANAIS , avant d'avoir essayé avec les russes . MAIS ATTAQUEZ DONC BANDES DE POLTRONS , VOUS N'EN AVEZ PLUS ? A VOUS VOIR GEMIR ON LE CROIRAIT . VOUS SAVEZ AVOIR VU LE LIBAN , LA SYRIE OU LA LYBIE OU L'IRAK DETRUIT C'EST DEVENU UNE HABITUDE , MAIS PAR CONTRE LE JOUR OU VOUS VERREZ LE RETOUR DE BATON CHEZ VOUS SUR VOTRE TETE, VOUS COMPRENDREZ MIEUX VOTRE MALHEUR . BANDES DE POLTRONISSIMES !!!!!!

    FRIK-A-FRAK

    12 h 02, le 09 novembre 2018

  • Oui, mais comme pour l'élection présidentielle, c'est finalement le Hezbollah qui aura gain de cause...Comme toujours, "l'oeil ne peut pas résister au pic", comme dit le vieil adage libanais!

    Georges MELKI

    10 h 02, le 09 novembre 2018

  • "Aoun ne signerait pas le décret de formation d’un gouvernement qui comprendrait un sunnite prosyrien". Alors le problème est réglé! Qu'attend-il pour signer la dernière mouture proposée par Hariri?

    Yves Prevost

    07 h 21, le 09 novembre 2018

  • Ben oui, il est temps que le Président et le gendrissime commencent à réaliser le danger de leur association avec le Hezbollah, avec les alertes sérieuses qui leur viennent de sources occidentales fiables... Oui, Mr le Président, il faut à tout prix empêcher cette formation d’avoir une majorité avec droit de veto sur toute décision nationale de distanciation des conflits régionaux: il y va de la survie du pays! Tout le monde attend de vous une position courageuse qui pourrait épargner au pays une catastrophe garantie!

    Saliba Nouhad

    04 h 36, le 09 novembre 2018

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