Après cinq mois de tractations, le Courant patriotique libre s’impatiente. Il veut mettre sur pied un cabinet dans les plus brefs délais. Désormais, il envisage même la formation d’un gouvernement sans les Forces libanaises, mais tout en se défendant de rechercher lui-même cette exclusion.
C’est ce que l’on déduit des propos tenus hier par Alain Aoun, député CPL de Baabda. « Si les FL choisissent volontairement de rester en dehors du cabinet, il faut penser aux substituts », a-t-il déclaré à l’issue d’une réunion du bureau de la Chambre, tenue hier à Aïn el-Tiné. Interrogé par L’Orient-Le Jour, M. Aoun assure que son parti œuvre pour la mise sur pied d’un cabinet qui inclurait tous les protagonistes, y compris les FL. « Mais nous ne pouvons plus attendre indéfiniment que l’équipe ministérielle soit formée », nuance-t-il, faisant valoir que « le pays est devant 48 heures décisives ». Mais, en dépit des explications de M. Aoun, ses propos pourraient être interprétés comme une nouvelle tentative d’écarter les FL de l’équipe ministérielle et de mettre le Premier ministre désigné au pied du mur. D’autant qu’une grave querelle oppose ses deux partenaires, le CPL, et par extension, Baabda, et les FL autour du portefeuille de la Justice. Le président de la République, Michel Aoun, insiste pour garder ce portefeuille dans son lot, à l’heure où le Premier ministre l’avait proposé au parti de Samir Geagea à titre de compensation pour le ministère dit « régalien » dont les FL se sont vues privées.
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S’il est soucieux de préserver la pérennité du compromis présidentiel qui a donné le coup d’envoi au sexennat de Michel Aoun, Saad Hariri semble déterminé à inclure les FL dans son équipe, comme l’assure à L’OLJ un proche du Premier ministre, estimant qu’« un gouvernement sans les FL serait un cabinet déséquilibré » (en faveur du Hezbollah et de ses alliés). « Il n’est dans l’intérêt de personne, encore moins celui du chef de l’État, de mettre sur pied un cabinet qui exclurait les FL », ajoute le proche de M. Hariri. Selon lui, « certains vivent toujours en 1989 ». Une allusion à peine voilée à la « guerre d’élimination » du CPL contre les FL en 1990, à la suite de la « guerre de libération » qu’il a déclenchée contre les troupes syriennes, le 14 mars 1989.
Tout comme la Maison du Centre, Meerab semble confiant qu’aucun gouvernement ne verra le jour sans lui. Joint par L’OLJ, un cadre FL confie que le parti n’envisage aucunement de rester en dehors du cabinet. « Cela n’est d’ailleurs pas conforme aux orientations de Saad Hariri », estime-t-il, soulignant que les propos d’Alain Aoun « visent à exercer des pressions supplémentaires sur le Premier ministre ». Même son de cloche chez Georges Adwan. Dans une déclaration prononcée au Parlement, il a clairement fait savoir que « c’est le Premier ministre désigné qui forme le gouvernement », assurant que celui-ci « ne verra pas le jour sans les FL ».
Le proche de Samir Geagea confie aussi que les Forces libanaises attendent toujours les réponses de M. Hariri aux propositions qui lui ont été remises par le ministre sortant de l’Information, Melhem Riachi, et Élie Baraghid, directeur du cabinet de Samir Geagea, lors de leur entretien à la Maison du Centre, lundi dernier.
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La séance législative
En attendant, le président de la Chambre, Nabih Berry, continue à distiller un climat d’optimisme quant à une prochaine formation du gouvernement. Au lendemain des audiences du mercredi lors desquelles il avait annoncé qu’il pourrait convoquer le Parlement à une séance plénière qui se tiendrait avant la fin du mois, M. Berry s’est abstenu de fixer une date à cette séance, tout en présidant une réunion du bureau de la Chambre consacrée à l’examen de l’ordre du jour de l’hypothétique séance parlementaire.
S’exprimant à l’issue de la réunion du bureau de la Chambre, Élie Ferzli, vice-président du Parlement, a expliqué que « la date de la séance législative est tributaire des développements gouvernementaux dans les deux prochains jours. Si aucun progrès n’est enregistré, la séance sera fixée dans les plus brefs délais, après distribution de l’ordre du jour aux députés ».
Quoi qu’il en soit, Saad Hariri a poursuivi hier ses contacts. Il a ainsi rencontré le ministre sortant des Travaux publics, Youssef Fenianos (Marada). Ce dernier s’est également réuni avec son collègue des Finances, Ali Hassan Khalil, conseiller politique de Nabih Berry.
À en croire la LBCI, M. Hariri (qui pourrait s’entretenir avec Michel Aoun dans les prochaines 48 heures) aurait assuré que les Marada de Sleiman Frangié conserveront le portefeuille des Travaux publics. Les négociations s’articulent actuellement autour du futur ministre, dans la mesure où le chef du CPL, Gebran Bassil, s’oppose au retour de M. Fenianos à ce poste.
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commentaires (10)
DONC C'EST CONFIRMÉ. C'EST BASSIL QUI EST LE PRÉSIDENT, LE PREMIER MINISTRE ET LE MINISTRE DE LA JUSTICE. ET C'EST LUI QUI FORME LE GOUVERNEMENT.....QUEL GOUVERNEMENT....LIBANAIS OU IRANIEN ???????
Gebran Eid
20 h 02, le 26 octobre 2018