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Lifestyle - Cinéma

« Wajib » couronné meilleur film au MAFF

C’est le road movie d’Anne-Marie Jacir qui a reçu le prix du meilleur film à Malmö. La réalisatrice étant absente du festival, c’est Mohammad Bacri, l’acteur principal du film, qui a reçu le trophée. Avant la cérémonie, l’acteur s’est entretenu avec « L’OLJ ».

Une scène tirée du film « Wajib » d’Anne-Marie Jacir.

Délicat, subtil et intelligent, Wajib fait le portrait de la société palestinienne vivant à Nazareth malgré toutes les contraintes et humiliations. « Wajib », c’est le carton d’invitation qu’on distribue en mains propres à l’invité à l’occasion d’un mariage. Mais le mot signifie aussi, en arabe littéraire, devoir. Ce devoir peut être compris en termes de loyauté envers la terre, quoi qu’il en coûte.

En préparation des noces de sa fille Amale, Abou Chadi et son fils Chadi, venu spécialement d’Italie pour aider son père, déambulent dans les rues de Nazareth à la rencontre des parents et amis qu’ils veulent inviter. C’est l’occasion pour ce père et ce fils qui, désenchanté, a quitté son pays natal la Palestine de se rapprocher… ou de s’éloigner l’un de l’autre.

« Je suis Chadi »

Mohammad Bacri (Abou Chadi) et son fils Salah (Chadi) incarnent ces rapports conflictuels entre deux générations en Palestine occupée. Mais la réalisatrice a commencé par choisir Saleh Bacri pour le rôle de Chadi alors qu’elle hésitait à choisir Mohammad Bacri pour le rôle d’Abou Chadi, connaissant l’acteur pour ses prestations engagées et pour son caractère rebelle dans la vie. Premier Palestinien à étudier le théâtre dans une université israélienne (Tel-Aviv), il a joué depuis 1983 dans de nombreux films avec des cinéastes européens comme Costa-Gravas, dans Hanna K. (1983), ou Saverio Costanzo dans Private (2004), ce qui lui a valu le prix du meilleur acteur à Locarno. En 1998, Bacri réalise son premier film, 1948, un documentaire sur la Nakba. Puis Jénine en 2002, où il raconte le sort des réfugiés palestiniens de ce camp victimes, cette année-là, de l’incursion israélienne la plus meurtrière de la seconde intifada. Le film est brut, sans appel. Cela lui vaudra la censure de son film, des procès, des insultes et une « interdiction professionnelle ».

« Je comprends les hésitations de la réalisatrice à me choisir, dit l’acteur. Je ne suis pas du tout Abou Chadi. Tout comme Salah, je suis Chadi, l’insoumis. Le rôle est dur car ma personnalité et ma vie en sont totalement éloignées. Et même si je suis resté physiquement à Nazareth, mon esprit n’a jamais été “occupé”. Je suis un homme libre et je fais fi de la présence israélienne. C’est pourquoi, à mon avis, tout le tournage a été dur en termes de dialogues, surtout la scène où je devais inviter le notable israélien aux noces de ma fille. » « Le film est intelligent, indique-t-il, parce qu’il aborde avec finesse cette situation délicate qu’est la cohabitation avec l’ennemi, sans employer de grands slogans et discours politiques pompeux que, d’ailleurs, je déteste. » « La mission de l’acteur, poursuit-il, est de relayer un message social ou politique, mais d’une manière indirecte et sans faire du cinéma un moyen pour la démagogie. Cela peut se faire d’ailleurs avec le langage des mots mais aussi du corps. Ces deux rôles (Chadi et Abou Chadi) nous ont semblé difficiles, à mon fils et moi-même, et nous ont fatigués. Tant et si bien qu’on ne pouvait pas reprendre la scène deux fois. Il fallait la faire en une seule fois. »

Acteur mais aussi dramaturge et écrivain, Mohammad Bacri intervient souvent dans les films dans lesquels ils joue. « Cela m’a valu beaucoup de querelles avec les scénaristes et les réalisateurs, car souvent je m’oppose à telle ou telle scène ou je corrige des détails du dialogue. Avec Anne-Marie, la collaboration s’est plutôt bien passée, même si certaines prises ont dû prendre parfois une autre direction. La dernière confrontation entre père et fils a été très travaillée et élaborée », dit-il. Peu d’artistes peuvent vivre ce statut (passeport israélien mais identité palestinienne) sans perdre leur authenticité. Mohammad Bacri a réussi cette dualité en l’occultant. « Les Israéliens sont absents de ma vie. Je suis libre malgré l’ennemi, voire les ennemis. Je suis au-dessus de tout cela », conclut-il.



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