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Moyen Orient et Monde - Frappes

Les missiles de Téhéran envoient différents messages en Syrie

Les gardiens de la révolution ont lancé 6 missiles balistiques de moyenne portée, puis frappé avec sept drones dans la province de Boukamal contre des positions de l’EI.

Photo fournie par les gardiens de la révolution montrant des missiles lancés hier contre des cibles dans l’Est syrien depuis un lieu non précisé. Photo gardiens de la révolution islamique via Sepah News/AFP

Un peu plus d’une semaine après l’attentat d’Ahvaz revendiqué par l’État islamique, qui a fait 24 morts et 69 blessés lors d’un défilé militaire, Téhéran montre les muscles en Syrie. Conformément à leur promesse d’infliger « une réponse terrible » aux auteurs de l’attaque, les gardiens de la révolution ont riposté dans la nuit de dimanche à lundi à coups de missiles contre des positions jihadistes dans la province de Boukamal, dans l’Est syrien. Selon un communiqué de l’organisation paramilitaire iranienne, « la branche aérospatiale des gardiens » a lancé « six missiles balistiques de moyenne portée » depuis la province de Kermanchah, dans l’Ouest iranien, portant ainsi un « coup fatal à 570 kilomètres de distance ». Sept drones iraniens ont également été lancés peu après contre des installations « des terroristes mercenaires » dans le cadre de cette opération baptisée « Frappe de moharram », en référence au mois de deuil musulman.

L’agence de presse iranienne semi-officielle Fars a précisé que « de lourds dégâts ont été infligés aux infrastructures et aux positions des terroristes ». L’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) a fait état pour sa part de « fortes explosions à l’aube dans la dernière poche sous le contrôle de l’EI ». Les pasdaran ont fait circuler hier des photos montrant le lancement des missiles et ont précisé que « de nombreux terroristes (jihadistes) et les chefs responsables du crime terroriste d’Ahvaz ont été tués ou blessés », sans fournir d’informations supplémentaires à ce sujet. Cité par l’agence officielle IRNA, le gouverneur de Kermanchah, Houshang Bazvand, a démenti des informations publiées sur les réseaux sociaux selon lesquelles l’un des missiles se serait écrasé peu après son lancement.


(Lire aussi : Ahvaz enterre ses morts, Khamenei met en cause Riyad et Abou Dhabi)


L’opération des pasdaran en Syrie permet à Téhéran de transmettre plusieurs messages à différents acteurs régionaux de manière implicite, le premier portant sur la politique intérieure de la République islamique suite à l’attentat d’Ahvaz. En ce sens, « l’Iran souhaitait peut-être entrer dans une démonstration de force afin de montrer à sa population qu’il dispose des moyens d’assurer sa sécurité », explique Jonathan Piron, chercheur pour Etopia et spécialiste de l’Iran, interrogé par L’Orient-Le Jour. Sur le plan militaire, « Téhéran souhaite démontrer l’efficacité de ses missiles et sa capacité d’engagement en privilégiant l’utilisation de cette arme » pour répondre à une attaque, poursuit-il. Selon M. Piron, « ce message est d’autant plus intéressant que les forces de la coalition rassemblant les troupes syriennes kurdes et les milices arabes, soutenues par les États-Unis, mènent actuellement une offensive dans la zone ciblée », ajoutant que « l’opération fait partie de la politique de dissuasion qui anime les discours et la stratégie de la République islamique ».

Selon Fars, les missiles tirés sont de type Zolfaqar et Qiam, ayant respectivement des portées de 750 et 800 kilomètres. « Au moins un des missiles portait des slogans “Mort à l’Amérique”, “Mort à Israël”, “Mort à la famille des Saoud” et un verset coranique signifiant “lutte contre les amis de Satan” », a également rapporté Fars. Revendiquée par les séparatistes arabes puis par l’EI, l’identité des organisateurs de l’attaque d’Ahvaz avait fait l’objet de nombreuses spéculations alors que la ville est située dans la province du Khouzestan, à majorité arabe. Deux jours après l’attentat, le guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, clarifiait les conclusions iraniennes en accusant les États-Unis de soutenir les auteurs de l’attaque et l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis de les avoir financés. Riyad et Abou Dhabi ont démenti toute implication.


(Lire aussi : Les pasdaran à l'Arabie et aux Emirats : "Si vous franchissez certaines lignes rouges, nous répliquerons")


Châtiment à venir
L’agence Tasnim, proche des ultraconservateurs, a également noté qu’il s’agissait de « la première annonce officielle d’une opération des gardiens de la révolution ayant recours à des drones de combat à l’extérieur des frontières iraniennes ». Les drones utilisés sont du type Saegheh (« éclair » en persan), un modèle développé par l’Iran sur la base d’un appareil américain, le RQ-170 Sentinel, saisi par la République islamique en 2011.

Interrogé en conférence de presse sur le point de savoir si le raid de la nuit avait fait l’objet d’une coordination avec Moscou et Damas – les alliés de Téhéran sur le terrain syrien –, le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Bahram Ghassemi, n’a pas souhaité faire de commentaire. L’offensive iranienne intervient également dans un contexte particulier, alors que Washington a annoncé la semaine dernière sa décision de retirer une partie de ses batteries antimissiles dans la région et à quelques semaines du second flot de sanctions américaines sur Téhéran. Le timing de l’attaque est donc d’autant plus important que « cela peut servir de message aux États-Unis, que Téhéran et Washington se mettent à négocier dans la période à venir ou qu’ils se heurtent » l’un à l’autre, estime Ali Bakeer, analyste politique basé à Ankara, contacté par L’OLJ.

Cette opération marque le second envoi de missiles iraniens en Syrie après l’attaque des gardiens de la révolution en juin 2017 contre des positions de l’EI à Deir ez-Zor en réponse aux attentats perpétrés par les jihadistes contre le Parlement iranien et le mausolée de l’imam Khomeyni à Téhéran. Contrairement à l’attaque de l’année dernière, l’opération nocturne d’hier pourrait être suivie d’autres opérations iraniennes contre des cibles jihadistes en Syrie, alors que les frappes « contre le quartier général des terroristes d’Ahvaz n’était qu’un petit coup contre ces criminels », a tweeté hier le général Mohsen Rezaï, ancien commandant en chef des gardiens de la révolution et aujourd’hui secrétaire du Conseil de discernement iranien, un des organismes de contrôle du système politique de la République islamique. « Le véritable châtiment est encore à venir », a-t-il averti.

« C’est toujours une possibilité, mais la question est de savoir où et contre qui ? » interroge M. Bakeer. Si ces missiles constituent une menace pour la région, « le fait qu’ils ne soient pas aussi précis que l’affirment les gardiens de la révolution les rend encore plus dangereux, surtout s’ils tombent dans une zone peuplée », ajoute-t-il. Selon lui, même si Téhéran affirme que son arsenal de missiles balistiques est purement défensif, « les trois dernières attaques de missiles lancées par les gardiens contre des cibles à Deir ez-Zor en Syrie l’année dernière, dans le nord de l’Irak il y a environ un mois, et à l’est de la Syrie montrent une tendance croissante aux opérations offensives ».


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Un peu plus d’une semaine après l’attentat d’Ahvaz revendiqué par l’État islamique, qui a fait 24 morts et 69 blessés lors d’un défilé militaire, Téhéran montre les muscles en Syrie. Conformément à leur promesse d’infliger « une réponse terrible » aux auteurs de l’attaque, les gardiens de la révolution ont riposté dans la nuit de dimanche à lundi à coups...

commentaires (4)

Le message essentiel est que la Syrie est un endroit ouvert pour que tout un chacun piétine a volonté qui il veut et quoi qu'il veut... Mantaka moubaha... Dommage, un autre pays arabe dont l'avenir et celui de ses enfants leur a été dérobé...

Wlek Sanferlou

15 h 20, le 02 octobre 2018

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Commentaires (4)

  • Le message essentiel est que la Syrie est un endroit ouvert pour que tout un chacun piétine a volonté qui il veut et quoi qu'il veut... Mantaka moubaha... Dommage, un autre pays arabe dont l'avenir et celui de ses enfants leur a été dérobé...

    Wlek Sanferlou

    15 h 20, le 02 octobre 2018

  • Attention à la réponse du berger...

    LeRougeEtLeNoir

    13 h 01, le 02 octobre 2018

  • Dans une assemblée générale extraordinaire de situation de guerre , les paroles belliqueuses ne servent à rien si elles ne sont pas suivies d'effets efficaces. L'Iran NPR vient de montrer aux comploteurs occidentaux alliés des wahabites MANIPULÉS par israel que l'oeuf sera dur à cuire . Le monde a changé, ceux qui ne veulent pas le voir sont flanqués d'oeilleres chevalines .

    FRIK-A-FRAK

    12 h 03, le 02 octobre 2018

  • ET S,ATTIRENT AUSSI DIFFERENTS MESSAGES !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 03, le 02 octobre 2018

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