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Liban - Réfugiés palestiniens

Arrêt de l’aide US à l’Unrwa : Bassil brandit le spectre de l’implantation

L’expert en politique publique et affaires de réfugiés, Ziad Sayegh, met en garde contre tout « populisme, malgré le fait que la menace soit réelle ».


Un graffiti représentant le chef historique de l’OLP, Yasser Arafat, dans le camp de Aïn el-Héloué. Joseph Eid/Archives AFP

L’annonce par les États-Unis, vendredi dernier, de l’arrêt du financement de l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens, l’Unrwa (Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine au Proche-Orient), a eu l’effet d’une bombe au Liban et dans la région. Les réactions se multiplient depuis, ainsi que les appels à la communauté internationale pour continuer à soutenir les réfugiés palestiniens, dans l’espoir d’éviter une grave crise socio-économique parmi cette population particulièrement vulnérable ainsi que parmi les sociétés d’accueil.

Réagissant à la décision américaine, le ministre sortant des Affaires étrangères, Gebran Bassil, a appelé hier les ambassadeurs des pays hôtes et des pays contributeurs de l’Unrwa à une réunion pour les presser de réagir au plus vite, tout en brandissant le spectre d’une possible implantation des Palestiniens au Liban. L’ambassadrice des États-Unis, Elizabeth Richard, n’a pas assisté à cette réunion pour protester contre la position de M. Bassil. « Le Liban ne supportera pas et n’acceptera pas la fin de l’Unrwa », a déclaré M. Bassil lors de l’entretien qui a duré une heure. « Nous vous appelons à faire part à vos gouvernements du danger de la situation et à poursuivre votre soutien financier », a-t-il ajouté.

« Le Liban fera tout ce qui est en son pouvoir pour refuser l’implantation (des Palestiniens) et mènera jusqu’au bout une confrontation politique et diplomatique pour consacrer le droit au retour des Palestiniens », a souligné Gebran Bassil. « Le peuple palestinien que l’on empêche de rentrer chez lui ne reçoit plus d’aides, alors que nous assistons à une effusion d’aides pour les Syriens présents dans les pays hôtes, aide qui est coupée s’ils décidaient de rentrer. Ce qui implique plus de divisions et de transferts pour en arriver à l’implantation que le Liban refuse », a martelé M. Bassil.

Plus tôt dans la journée, M. Bassil avait reçu l’ambassadeur de Syrie, Ali Abdel Karim Ali, et discuté avec lui de la décision américaine. Le chef de la diplomatie devait également se réunir avec les ambassadeurs de plusieurs pays disposant d’associations qui s’occupent de réfugiés, à savoir : la Russie, la Chine, la France, l’Égypte, la Corée du Sud, le Koweït et le sultanat d’Oman.

Le président de la Chambre, Nabih Berry, a pour sa part appelé hier à une « réunion urgente » de la Ligue arabe, lors d’une rencontre avec des représentants de l’ensemble des factions palestiniennes présentes au Liban, réunis pour signer un document d’entente nationale sur la scène libanaise, en présence de l’ambassadeur de Palestine, Achraf Dabbour. M. Berry a déploré « les décisions américaines, à commencer par celle de transférer l’ambassade des États-Unis à Jérusalem, avant d’en arriver à l’arrêt du financement de l’Unrwa ». « Tout cela va droit vers l’annulation du droit au retour des Palestiniens et la liquidation de la cause palestinienne. Je l’ai maintes fois dit, il faut en premier unifier les forces palestiniennes dans leur lutte contre l’occupation israélienne et contre tous ces complots », a lancé M. Berry.


(Lire aussi : Arrêt de financement US de l’Unrwa : un coup dur de plus pour Abbas)


Gare au populisme

Interrogé par L’Orient-Le Jour, Ziad Sayegh, expert en politique publique et en matière de réfugiés, a mis en garde contre l’aspect « populiste » des déclarations de Gebran Bassil. « J’espère qu’il n’y aura pas d’intimidation à un niveau populiste en ce qui concerne l’implantation des Palestiniens, malgré le fait que cette menace soit réelle maintenant », a déclaré M. Sayegh.

Il a en outre recommandé le recours à une « méthodologie diplomatique et politique scientifique pour faire face à ce sujet ». « Il faut faire face à la menace de l’implantation avec des mesures sérieuses, avec une simulation du retour des Palestiniens et une étude des différents scénarios possibles. Ce travail nécessite une consultation nationale ainsi qu’une concertation avec les Palestiniens », a indiqué M. Sayegh.

« Gebran Bassil a bien fait de se réunir avec les pays hôtes et contributeurs de l’Unrwa, mais il aurait dû également s’adresser au Conseil de sécurité de l’ONU. Il faudrait aussi se concerter avec le Groupe international de soutien au Liban et lui demander d’entreprendre une action diplomatique pour assurer les fonds qui manquent à l’Unrwa. Il serait bon de coordonner aussi avec le gouvernement palestinien », a ajouté l’expert.

« La crise du financement de l’Unrwa n’est pas nouvelle, a souligné M. Sayegh. Le financement est en recul, car les pays donateurs sont fatigués de cette situation et que l’horizon est bouché pour une solution politique (…) Il ne s’agit pas d’une crise financière mais bien d’une crise politique. »

Crise politique qui a commencé à prendre forme le 6 décembre dernier, au lendemain de la reconnaissance officielle de Jérusalem comme capitale d’Israël par les États-Unis, suivi par le transfert de l’ambassade américaine de Tel-Aviv à la ville sainte mi-mai dernier. Une série de mesures qui ont poussé le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas à ne plus reconnaître le rôle d’arbitre des États-Unis dans le processus de paix avec les Israéliens. En guise de réponse, les États-Unis ont baissé drastiquement leur financement de l’Unrwa de 350 millions de dollars en 2017 à 60 millions de dollars en 2018, avant de l’arrêter définitivement le week-end dernier. Washington aurait par ailleurs proposé à Mahmoud Abbas la solution d’une confédération avec la Jordanie, idée que le président palestinien a rejetée.

« Le vrai problème qui se pose est celui de l’avenir des réfugiés et de leur identité politique et légale », a indiqué pour sa part à L’OLJ une source proche du dossier, exprimant la crainte que « cette situation ne soit exploitée par certains et transformée en crise sécuritaire sous prétexte de slogans socio-économiques ». « La dégradation de la situation des Palestiniens au Liban pourrait conduire à une montée de l’extrémisme à l’intérieur des camps. Il est à craindre que le Hezbollah n’exploite cette situation pour parler d’extrémisme sunnite et se poser en tampon et en acteur incontournable pour la stabilité du pays », a estimé cette source qui a requis l’anonymat.



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commentaires (3)

CE N,EST PAS UNE MENACE. ILS VEULENT EN FAIRE UN FAIT !

LA LIBRE EXPRESSION

12 h 08, le 04 septembre 2018

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Commentaires (3)

  • CE N,EST PAS UNE MENACE. ILS VEULENT EN FAIRE UN FAIT !

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 08, le 04 septembre 2018

  • mr sayegh dit : GB fait du populisme . INDENIABLE . comme si, comme si a part les qqs 1ers mois d'exil des palestiniens de 1948 il a jamais ete serieusement question de leur retour chez eux. comme ceux syriens par convois petits ou grands, leur avenir assure par Bibi et ses allies d'extreme droite, apres etre coinces a l'ONU par les strateges libanais .

    Gaby SIOUFI

    10 h 05, le 04 septembre 2018

  • Les Palestiniens sont rentrés au Liban en 1948 et ils y sont toujours soit 70 ans ! alors parler du "spectre de l'implantation " ou est le problème ?

    yves kerlidou

    09 h 06, le 04 septembre 2018

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