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Moyen Orient et Monde - USA

Sanctions contre la Russie : un outil de séduction de Trump ?

Le président américain pourrait utiliser les nouvelles mesures punitives décrétées contre Moscou à des fins de politique intérieure.

Donald Trump et Vladimir Poutine lors du sommet d’Helsinki, en Finlande, le 16 juillet 2018. Grigory Dukor/Reuters

Washington a récemment décrété de nouvelles sanctions contre Moscou dans le cadre de l’empoisonnement de l’ex-espion russe Sergueï Skripal et sa fille Ioulia. Ces derniers avaient été victimes, en mars dernier, d’une attaque chimique au Novitchok (agent neurotoxique) dans la ville de Salisbury, en Grande-Bretagne. Moscou a immédiatement été accusé par le gouvernement britannique d’être derrière cette attaque et avait procédé à l’expulsion de plusieurs diplomates russes. Plusieurs pays européens, par solidarité avec Londres, ont fait de même. Le 8 août, l’administration Trump a jugé la Russie comme responsable de l’empoisonnement de l’ex-agent double. Des mesures punitives ont été annoncées dans la foulée et déclenchées le 22 août. Elles entraient en vigueur hier.

Le président russe Vladimir Poutine a dénoncé mercredi dernier ces nouvelles mesures contre son pays. «  En ce qui concerne les sanctions, ces actions sont très contre-productives et dénuées de sens  », a-t-il déclaré. «  J’espère que nos collègues américains vont prendre conscience qu’une telle politique n’a pas d’avenir et que nous commencerons à coopérer normalement  », a poursuivi M. Poutine. « Ces mesures ne feront qu’exacerber les tensions », a déploré quant à lui le ministère russe des Affaires étrangères, selon l’agence de presse RIA, vendredi dernier.

Moscou est par ailleurs déjà sous le coup de sanctions pour son annexion de la Crimée en 2014 et son ingérence présumée dans la campagne présidentielle américaine de 2016. Ces mesures punitives resteront appliquées, selon le conseiller américain à la Sécurité nationale, John Bolton, jusqu’à un changement d’attitude de la part de la Russie. « Les sanctions restent en vigueur et le resteront jusqu’à ce que le comportement de la Russie change », a-t-il déclaré vendredi lors d’une conférence de presse à Kiev, la capitale ukrainienne, avec le président ukrainien Petro Porochenko. La veille, les États-Unis avaient déjà visé des entités russes accusées d’être impliquées dans des activités de piratage informatique ou d’avoir eu des liens commerciaux avec la Corée du Nord. Le régime de Pyongyang est en effet toujours sous le coup d’un embargo de la part des États-Unis.

Les nouvelles sanctions contre la Russie entrent ainsi en vigueur un peu plus d’un mois et demi après le sommet entre Donald Trump et son homologue russe à Helsinki, la capitale finlandaise, le 16 juillet dernier. Cette rencontre aura marqué les esprits, notamment par les propos qu’avait alors tenus le locataire de la Maison-Blanche devant la presse.


(Lire aussi : Poutine fustige les sanctions américaines "contre-productives")


Trump complaisant avec la Russie

Lorsque le thème de l’ingérence russe présumée dans la campagne présidentielle de 2016 est abordé, Donald Trump énonce sans aucune retenue : « J’ai confiance dans mes services de renseignements, mais le président Poutine a été très convaincant lorsqu’il a nié toute ingérence. Il a dit que ce n’était pas la Russie, et je vais vous (la presse) dire, je ne vois aucune raison que cela le soit. » Ainsi, en quelques secondes devant les caméras du monde entier, Donald Trump désavoue ses propres services de renseignements et semble donner raison à toutes les critiques qui l’accusaient ces derniers mois de collusion avec le Kremlin.

Au lendemain du sommet, la presse faisait état des propos de Donald Trump. Le journal américain Washington Post a notamment accusé dans un édito le président US d’avoir « ouvertement collaboré avec la Russie ». La chaîne de télévision Fox News, d’habitude pro-Trump, a quant à elle sévèrement critiqué ses propos. Ainsi, plus qu’une bourrasque, c’est une tempête politique qui a secoué la politique américaine. Ayant visiblement constaté son erreur, M. Trump a tenté une volte-face. « Dans une phrase-clé de mes remarques, j’ai utilisé le mot “serait” au lieu de “ne serait pas”. La phrase devait donc être “Je ne vois pas de raison pour laquelle ce ne serait pas la Russie” », a-t-il affirmé. Mais le mal semble être déjà fait.

Ainsi, les nouvelles sanctions imposées à la Russie pourraient-elles faire partie d’une stratégie de la part du président américain pour tenter de se racheter après le fiasco d’Helsinki ? « Lorsque les sanctions ont été annoncées début août, c’était clairement dans une perspective de montrer que Trump n’était pas complaisant avec la Russie », explique à L’Orient-Le Jour Corentin Sellin, professeur agrégé d’histoire et spécialiste de la politique américaine. « Mais il y a des limites à ces interprétations. Donald Trump n’est pas très impliqué dans ces nouvelles sanctions qui ont été présentées par John Bolton et annoncées par le département d’État », a-t-il ajouté. Mais si le président américain a cherché à se rattraper comme il le pouvait de ses remarques devant son homologue russe, la stratégie qu’il emploie pourrait, dans le même temps, lui servir d’atout pour les prochaines élections.


(Lire aussi : Londres appelle Européens et Américains à "aller plus loin" pour contrer la Russie)


Atout pour les « Midterms » ?

Les élections de mi-mandat (Midterm) se dérouleront le 6 novembre 2018, au milieu du mandat du président américain. Elles ont pour but de renouveler un tiers des cent sièges du Sénat, Chambre haute du Congrès des États-Unis, et les 435 sièges de la Chambre des représentants, Chambre basse. Actuellement, c’est le Parti républicain qui possède la majorité au Sénat et à la Chambre des représentants. Les Midterms peuvent s’assimiler aux élections législatives en France et constituent une sorte de « test » pour le président américain, qui doit tenter de conserver la majorité dans les deux Chambres s’il espère pouvoir mener à bien les projets pour lesquels il a été élu.

La réimposition des sanctions contre la Russie pourrait donc entrer dans le cadre de la stratégie électorale de M. Trump en vue de ces élections. « Si on regarde les sondages d’opinion, la Russie n’est plus perçue comme une menace aussi forte qu’il y a quelques années. Les ennemis numéro 1 sont l’Iran et la Chine par exemple », explique Corentin Sellin. « Mais ce que le président américain cherche, c’est à rassurer l’électorat pas forcément politisé et incertain. On avait senti après Helsinki et les propos de Trump qu’il y avait des doutes auprès de l’opinion publique américaine, donc cela lui permet de rassurer les électeurs indécis plutôt que la base politique républicaine qui le suit, y compris sur le rapprochement avec la Russie », conclut l’expert.

Par ailleurs, l’administration Trump travaille ces derniers jours très sérieusement pour éviter toute nouvelle ingérence russe éventuelle dans les Midterms. Fin juillet dernier, le président américain a participé à une réunion du Conseil national de sécurité pour préparer une réponse en cas de nouvelles attaques. John Bolton a assuré jeudi dernier que les États-Unis ne toléreraient aucune « ingérence » russe lors des élections de mi-mandat en novembre, Washington étant prêt à prendre « les mesures nécessaires ».




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Washington a récemment décrété de nouvelles sanctions contre Moscou dans le cadre de l’empoisonnement de l’ex-espion russe Sergueï Skripal et sa fille Ioulia. Ces derniers avaient été victimes, en mars dernier, d’une attaque chimique au Novitchok (agent neurotoxique) dans la ville de Salisbury, en Grande-Bretagne. Moscou a immédiatement été accusé par le gouvernement britannique...

commentaires (2)

J'ai toujours aimé l'Amérique, et ses inventions.... Technologiques, scientifiques, défense des libertés, la musique, Hollywood, et j'en passe .... Mais "les sanctions" la nouvelle invention de la star des télé-réalité (sanctionner l'Europe, le Canada, la Russie...Et même Cuba et le Mexique...) Ne passe pas ! Il y a comme un problème!

Sarkis Serge Tateossian

00 h 51, le 29 août 2018

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Commentaires (2)

  • J'ai toujours aimé l'Amérique, et ses inventions.... Technologiques, scientifiques, défense des libertés, la musique, Hollywood, et j'en passe .... Mais "les sanctions" la nouvelle invention de la star des télé-réalité (sanctionner l'Europe, le Canada, la Russie...Et même Cuba et le Mexique...) Ne passe pas ! Il y a comme un problème!

    Sarkis Serge Tateossian

    00 h 51, le 29 août 2018

  • LES SANCTIONS CONTRE LA RUSSIE UNE EPEE A DOUBLE TRANCHANTS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 20, le 28 août 2018

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