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Culture - Exposition

Daniele Genadry peint avec la lumière

À travers « Slow Light », son exposition solo qu’accueille le Beirut Art Center sous la houlette de la curatrice Marie Muracciole, la peintre et photographe s’interroge sur notre rapport aux images régies par la propagation de la lumière.

Des paysages aux teintes fragiles...

Il est des étapes de nos vies qu’on pense rangées dans les tiroirs d’un passé occulté, jusqu’à ce qu’elles ressurgissent, sous une forme ou une autre, quand on s’y attend le moins. Daniele Genadry ironiserait presque sur ses années au Darmouth College de Hanovre, à l’issue desquelles elle sortira forte d’un diplôme en studio art et mathématiques, tant cette escale lui semble « si loin de que je fais aujourd’hui », dit-elle. Pourtant, pas tant que cela, réalise-t-on, à peine l’artiste commençant à expliquer son « Slow Light » : un phénomène physique qui se produit lorsque la propagation d’une impulsion optique (de la lumière, en d’autres termes) est ralentie par le milieu où elle a lieu. De fait, à travers son exposition solo qu’accueille le Beirut Art Center (BAC), Genadry s’intéresse en particulier aux mouvements de la lumière dans les images et la manière dont ceux-ci modifient la vision.

Une exploratrice
À propos de la genèse de Slow Light, elle avance : « Nous vivons dans une ère où les images nous viennent par flots, comme si nous en étions bombardés, à tel point qu’on les prend pour acquises, sans s’y attarder. » Et de poursuivre : « L’idée de départ de cette exposition, partie d’une discussion avec la directrice du BAC et curatrice de l’événement Marie Muracciole, était donc de s’interroger sur notre rapport aux images, sur l’impossibilité de capturer une image qui ouvre des possibilités, et aussi, surtout, sur le rôle de la peinture, dans la mesure où celle-ci propose une solution aux problèmes que la photo pose. » En effet, quand d’autres artistes choisissent de se placer (ainsi que leurs œuvres) au centre de leurs projets, Daniele Genadry préfère plutôt endosser le rôle d’exploratrice qui use de toutes les techniques qu’elle maîtrise afin de chercher des réponses aux questionnements qui l’animent. Créant des passerelles entre photo et peinture qu’elle se plaît ensuite à brouiller, la détentrice d’un master de la Slate School of Fine Arts de Londres fait migrer ses images entre esquisses, sérigraphies, projections et toiles, pliant ainsi le visiteur à une expérience visuelle qui se module au gré de ces différents supports.

Un jeu de densités
Car, le plus frappant dans cette exposition, c’est qu’elle s’expérimente comme un parcours mouvant, une sorte de fleuve en crue dont le courant est cornaqué par les vertiges de la lumière. Un processus pourtant éminemment maîtrisé de la part de l’artiste qui précise : « Nous avons construit Slow Light comme une certaine trajectoire, autour d’un jeu de densité où le mouvement physique du visiteur est le miroir de ce que sa vue expérimente. » « On part sur des esquisses de paysages d’où émane une sensation de forte compression, due à la tension des lignes, qui se délite au fur et à mesure qu’on avance. » Sur ses sériographies, Daniele Genadry empile six couches de papier où la lumière comprimée donne naissance « aux couleurs que je voulais ». Puis, à travers son installation vidéo qui superpose deux séquences temporelles, l’artiste fait se télescoper le temps, trouble les vitesses de perception, en capturant des images qui hésitent entre éclat et disparation. Car, espiègle, il semblerait qu’elle se joue de nos perceptions et agite le chiffon rouge de la porosité entre « ce qui existe et ce qui est perçu ». Ce n’est qu’à la fin du parcours, dans la salle qui clôt Slow Light, que Daniele Genadry, à la faveur de ses paysages aux teintes fragiles, aussi imposants par leur effet de masse que surprenants par leur impression de disparaître, abreuve l’œil d’un éclat de lumière. Cette lumière qui, tout en effaçant la substance de ses tableaux, façonne de nouvelles images et dont l’artiste a réussi le pari fou de faire la matière première de son œuvre.

« Slow Light » de Daniele Genadry au Beirut Art Center jusqu’au 7 octobre.

Il est des étapes de nos vies qu’on pense rangées dans les tiroirs d’un passé occulté, jusqu’à ce qu’elles ressurgissent, sous une forme ou une autre, quand on s’y attend le moins. Daniele Genadry ironiserait presque sur ses années au Darmouth College de Hanovre, à l’issue desquelles elle sortira forte d’un diplôme en studio art et mathématiques, tant cette escale lui...

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