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Moyen Orient et Monde - Éclairage

Le plan de paix mystère de Washington discuté lors d’une tournée au Moyen-Orient

Jared Kushner et Jason Greenblatt font le tour des capitales arabes pour exposer leur « plan de paix ultime ».

Jared Kushner et Jason Greenblatt reçus hier par le président égyptien au Caire. Présidence égyptienne/AFP/Stringer

L’équipe de négociateurs pour un plan de paix entre Israéliens et Palestiniens de l’administration Trump semble passée en « mode écoute ». Jared Kushner, conseiller de la Maison-Blanche et gendre du président américain, et Jason Greenblatt, émissaire de l’administration américaine pour le Moyen-Orient, voyagent, consultent et prennent note. Mardi à Amman, auprès du roi Abdallah, mercredi à la cour des Saoud avec le prince héritier Mohammad ben Salmane, et hier au Caire, où les deux responsables ont rencontré le président égyptien Abdel Fattah el-Sissi. L’objet de la tournée est d’entretenir les dirigeants arabes dits « modérés » des termes de l’« ultimate deal » entre Israéliens et Palestiniens, auquel Donald Trump affirme présider. Les deux émissaires font aujourd’hui escale à Jérusalem, avant de conclure leur circuit au Qatar.

Mais ils ont beau s’activer en enchaînant les correspondances d’une capitale arabe à une autre, l’idée selon laquelle l’accord du siècle est à portée de main ne prend pas. L’équipe de paix américaine a donné peu d’indices sur la stratégie qu’elle compte présenter et le plan détaillé est déjà « en cours de finalisation » depuis un bon moment déjà. Aucune date butoir n’est, en outre, fixée pour sa divulgation. Plusieurs médias israéliens l’avaient annoncé pour immédiatement après l’ouverture des nouveaux bureaux de l’ambassade américaine à Jérusalem, le 14 mai dernier. Interrogé sur ce point juste avant l’inauguration de l’ambassade, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu répondait néanmoins « ne pas avoir vu » ledit plan. « Cela fait deux ans que l’on parle de ce plan. Le temps qui passe crée un climat délétère de méfiance dans la région car beaucoup de rumeurs courent, y compris le fait que les Saoudiens seraient prêts à laisser Jérusalem aux Israéliens », commente pour L’Orient-Le Jour Élisabeth Marteu, spécialiste du conflit israélo-palestinien à l’International Institute for Strategic Studies.

« D’un point de vue objectif, l’administration n’a rien à proposer. Le processus est en outre incroyable, dans la mesure où les Palestiniens ne font même pas partie des négociations. Un accord de paix israélo-palestinien ne pourra pas être signé entre Tel-Aviv, Washington et Riyad. Pourtant, Trump et Kushner sont persuadés d’avoir quelque chose entre les mains », poursuit la chercheuse.

Aujourd’hui, Jason Greenblatt et Jared Kushner seront en Israël. Aucun rendez-vous n’est programmé avec l’Autorité palestinienne, qui boycotte une administration américaine ostensiblement pro-israélienne, et refusent de s’entretenir avec des personnalités que le bureau politique du Likoud aurait pu nommer lui-même. Washington n’a tout de même pas exclu de publier son plan de paix sans participation palestinienne.


(Lire aussi : À Amman, Kushner discute avec Abdallah II du processus de paix)


Mépris pour les Palestiniens
Cette volonté de négocier en aparté avec les Israéliens réside dans « le profond mépris que Donald Trump voue aux Palestiniens », souligne Mme Marteu. « Il n’y a que les intérêts d’Israël, de l’Égypte et des partenaires stratégiques du Golfe qui comptent. Trump est sincère dans sa conviction qu’il tient quelque chose. Il est sincère dans sa stratégie qui consiste à écraser les Palestiniens. »
Le but affiché de l’administration Trump est de faire accepter aux Palestiniens des propositions plus « raisonnables » que celles offertes par l’ancien Premier ministre israélien Ehud Barak en 2000 et son successeur après Ariel Sharon, Ehud Olmert en 2008. Toujours avec l’hypothèse que l’Autorité palestinienne porte l’entière responsabilité de l’échec du processus de paix.
Le journaliste Adam Entous du New Yorker rapportait, dans un article du 18 juin dernier, une conversation avec un membre vétéran de l’administration Trump. Ce dernier aurait utilisé une analogie avec le « cours des actions » pour expliquer sa vision du sort réservé aux Palestiniens dans les « négociations ». « J’aurais pu acheter Google il y a vingt ans. Maintenant je ne peux pas. Je dois payer une certaine somme d’argent. Ce n’est pas que je suis puni. J’ai juste raté l’opportunité », aurait affirmé cette source proche du dossier.

Toujours selon le New Yorker, l’ambassadeur américain en Israël, David Friedman, aurait comparé l’offre que pourrait faire Washington aux Palestiniens à un « deal type banqueroute ». Entériner le rapport de forces actuel semble constituer l’essentiel de ce plan de paix mystère. « L’administration américaine ne négocie pas la paix comme un bout de contrat. Je pense qu’on peut difficilement renvoyer ça au comportement d’un chef d’entreprise. Elle ne négocie pas, elle soumet », résume Elisabeth Marteu. Le moment de la tournée de promotion de l’ultime accord est choisi. Mahmoud Abbas, le président octogénaire de l’Autorité palestinienne, est plus que jamais isolé. Par le passé, le soutien des États arabes lui procurait la confiance nécessaire pour résister aux pressions israéliennes et américaines. Le vent a tourné. L’Iran semble avoir surpassé Israël au titre des « bad guys » de la région pour certains pays arabes. Les condamnations officielles des États du Golfe et de l’Égypte suite à la relocalisation de l’ambassade américaine à Jérusalem, puis au moment de la répression sanglante, par Israël, de la grande marche du retour à Gaza, étaient notoirement insipides. L’emphase des pays du Golfe est davantage mobilisée par l’ennemi iranien. En privé, Mohammad ben Salmane adhérerait à l’idée selon laquelle les Palestiniens sont les premiers responsables de leur situation. « Dans les dernières décennies », aurait-il dit lors d’une réunion avec des leaders juifs américains en mars dernier, « le leadership palestinien a raté une opportunité après l’autre et rejeté toutes les propositions de paix qu’on lui donnait. Il est temps que les Palestiniens considèrent les propositions et acceptent de venir à la table des négociations, ou la ferment et arrêtent de se plaindre ».

Malgré ce contexte pour le moins favorable, Tel-Aviv sait que le plan américain ne sera acceptable notamment pour Riyad et Abou Dhabi que si Israël fait des concessions, notamment sur Jérusalem-Est. Il en va de la réputation des monarchies du Golfe dans le monde arabe. Si la proposition va dans le sens de « Jérusalem capitale indivisible de l’État d’Israël », alors les leaders arabes n’auront d’autre choix que de la rejeter.


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commentaires (3)

Désolé, mais il est vrai que tous en ont marre des Palestiniens qui ont d'abord accepter de remplacer leur pays par la Jordanie, puis par le Liban, puis l'ultime refus de l'accord presque conclu avec Ehud Barak. Alors franchement pourquoi les arabes doivent ils encore payer pour une cause que les concernés eux même auraient déjà vendu par plusieurs fois au dépends des pays pays les ayant soutenus fervemment pendant des décennies. Le Liban ne doit plus rien avoir a foutre d'une cause qui n'en ai plus une depuis l'accord de 1969 et de la catastrophe qui s'est ensuivi dans le pays... Aujourd'hui, après plus de 25 ans de la fin de la guerre sur notre territoire, notre pays ressemble encore a Ghazza, dévasté et en ruines... Ce n'est pas parce que le centre ville a été reconstruit que le pays a récupéré sa superbe. Ou en est on avec Zahlé, Baalbeck, Tyr, Tripoli, de la banlieue toute construite illégalement, etc... Qu'en est il de l'eau, de l’électricité, de la pollution, des poubelles, de la mer...!? Depuis l'accord de Taef le Liban n'a pas arrêté de péricliter a tous les niveaux... certains vous dirons que même durant la guerre s’était ... mieux! Est-ce vers cela que nous voulons en arriver? J’espère pas! Alors laissons les palestiniens se démerder avec la mouise dans laquelle ils se sont mis tout seul depuis 1969 et regardons enfin comment vraiment reconstruire la prospérité de notre pays et peuple.

Pierre Hadjigeorgiou

13 h 04, le 22 juin 2018

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Commentaires (3)

  • Désolé, mais il est vrai que tous en ont marre des Palestiniens qui ont d'abord accepter de remplacer leur pays par la Jordanie, puis par le Liban, puis l'ultime refus de l'accord presque conclu avec Ehud Barak. Alors franchement pourquoi les arabes doivent ils encore payer pour une cause que les concernés eux même auraient déjà vendu par plusieurs fois au dépends des pays pays les ayant soutenus fervemment pendant des décennies. Le Liban ne doit plus rien avoir a foutre d'une cause qui n'en ai plus une depuis l'accord de 1969 et de la catastrophe qui s'est ensuivi dans le pays... Aujourd'hui, après plus de 25 ans de la fin de la guerre sur notre territoire, notre pays ressemble encore a Ghazza, dévasté et en ruines... Ce n'est pas parce que le centre ville a été reconstruit que le pays a récupéré sa superbe. Ou en est on avec Zahlé, Baalbeck, Tyr, Tripoli, de la banlieue toute construite illégalement, etc... Qu'en est il de l'eau, de l’électricité, de la pollution, des poubelles, de la mer...!? Depuis l'accord de Taef le Liban n'a pas arrêté de péricliter a tous les niveaux... certains vous dirons que même durant la guerre s’était ... mieux! Est-ce vers cela que nous voulons en arriver? J’espère pas! Alors laissons les palestiniens se démerder avec la mouise dans laquelle ils se sont mis tout seul depuis 1969 et regardons enfin comment vraiment reconstruire la prospérité de notre pays et peuple.

    Pierre Hadjigeorgiou

    13 h 04, le 22 juin 2018

  • Super analyse qui dit tout en fait et en fact. Les masques tombent et une fois la poussière retombée , les vrais vendus vendeurs arabes sunnites et chretiens de la PALESTINE usurpée devront répondre de leurs crimes.

    FRIK-A-FRAK

    10 h 31, le 22 juin 2018

  • ESPERONS EN UNE PAIX JUSTE DES DEUX ETATS ET L'INTERNATIONALISATION DE JERUSALEM !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 35, le 22 juin 2018

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