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Liban - Décryptage

Le dossier des déplacés syriens au menu des entretiens de Merkel à Beyrouth

C’est sur fond de crise naissante entre le Haut-Commissariat de l’ONU en charge des réfugiés (UNHCR) et le ministère libanais des Affaires étrangères que la chancelière allemande Angela Merkel entame sa visite au Liban. Cette visite suit de près celle effectuée par le président allemand à Beyrouth avant les élections législatives et arrive à un moment où le pays n’a pas encore de nouveau gouvernement. Apparemment, l’agenda de Mme Merkel ne dépend nullement des considérations politiques intérieures libanaises et le timing de cette visite serait principalement lié au dossier des déplacés syriens et des réfugiés en général qui pose un problème de plus en plus grave aux autorités allemandes et aux Européens en général. L’Union européenne devrait d’ailleurs tenir une réunion à la fin de ce mois pour prendre des mesures plus sévères contre ceux que les Européens appellent les migrants, surtout après « les tribulations » dramatiques du navire Aquarius, qui avait à son bord 629 migrants et a provoqué un début de crise entre l’Italie, la France et l’Espagne.

Dans ce contexte, des sources diplomatiques libanaises précisent que le ministre Gebran Bassil a sciemment choisi le timing des critiques adressées à l’UNHCR à un moment particulièrement délicat pour les Européens sur la question des migrants. Les mêmes sources estiment que Beyrouth a un dossier solide, alors que les pays donateurs ne savent plus comment aborder ce problème face à la pression de leurs populations respectives. D’une part, l’économie libanaise, déjà en crise, ne peut plus supporter l’énorme poids de la présence des déplacés syriens, et d’autre part, de l’avis de toutes les capitales impliquées dans la guerre en Syrie, la portion de territoire sécurisée en Syrie a considérablement augmenté au cours des dernières années. Ce qui justifie la réclamation libanaise d’un retour progressif par petits groupes des déplacés dans les zones qui peuvent les accueillir.


(Lire aussi : Trêve médiatique entre le palais Bustros et l’UNHCR)


Sur le plan des chiffres, le Liban affirme ainsi que depuis le début de l’arrivée des déplacés sur son territoire et jusqu’à aujourd’hui, ceux-ci lui ont coûté 19,494 milliards de dollars en frais de toutes sortes, qu’il s’agisse de la consommation d’électricité, des frais de scolarisation et d’hospitalisation et d’aides diverses. De plus, en sept ans, le Liban a compté près de 130 000 nouveau-nés syriens, venus au monde sur son territoire ou dans ses hôpitaux. Ces nouveau-nés n’ont pas été enregistrés à l’ambassade de Syrie au Liban et ce n’est que récemment, dans le cadre d’un accord avec les instances internationales, que les autorités libanaises ont commencé à leur donner des papiers d’identité, sachant que dans certains cas, il est difficile de vérifier leur parenté. Ce qui complique encore plus leur situation. De plus, selon les registres du UNHCR, il y a 216 000 élèves syriens dans les écoles libanaises, qui sont ainsi contraintes d’organiser un double horaire, le premier pour les élèves libanais et le second pour les Syriens, avec les dépenses que cela entraîne au niveau des instituteurs, de l’infrastructure scolaire et des équipements.


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Selon les chiffres officiels libanais, le Liban est devenu l’un des pays où la densité populaire est la plus élevée au monde (574 %). Pour avoir une idée des chiffres, au Danemark, il y a 90 000 réfugiés et la densité de la population au kilomètre carré est de 1 %. Le nombre de déplacés et réfugiés sur le territoire libanais équivaut à 35 % de la population. Ce qui est énorme quels que soient les critères adoptés, même si le pays n’était pas confronté à une grave crise économique. Aujourd’hui, le taux de chômage des jeunes y est de 35 %. Ce qui entraîne une vague d’émigration très élevée dans la tranche d’âge entre 20 et 30 ans. Pour toutes ces raisons, le Liban avait demandé la somme de 3,5 milliards de dollars à la dernière conférence de Bruxelles, et il a obtenu des promesses pour un maximum de 1,6 milliard. Par contre, la Turquie qui accueille relativement moins de déplacés syriens (près de 2 millions pour une population de 82,7 millions environ) et qui en ramène régulièrement en Syrie a obtenu immédiatement 7 milliards de dollars d’aides internationales. Plus encore, la Jordanie reçoit 1 100 dollars pour chaque élève syrien scolarisé dans ses institutions alors que le Liban n’en reçoit que 650. On peut multiplier les exemples de ce genre. La conclusion reste la même : pour le Liban, il y a une injustice étrange et suspecte dans l’approche internationale du dossier des déplacés syriens sur son territoire. Dans toutes les conférences internationales consacrées aux déplacés syriens, le Liban officiel a tenté d’exposer ses données et d’alerter la communauté internationale sur ses appréhensions. En vain. Mais le pire a eu lieu lorsqu’il a décidé avec l’accord des déplacés eux-mêmes de commencer à pousser vers un retour progressif. C’est là qu’il a jugé l’attitude du UNHCR inadmissible et décidé de réagir.

Dans un entretien au quotidien al-Akhbar publié hier, la représentante de ce comité au Liban a adopté un ton plus conciliant. Ce qui pourrait signifier que de nouvelles négociations se préparent. En tout cas, ces sujets devraient être évoqués par les responsables libanais avec la chancelière allemande, dans l’espoir d’un déblocage qui servirait à la fois les intérêts du Liban et ceux des déplacés eux-mêmes. Il y a toutefois des limites à ce que le Liban peut accepter, même pour servir une cause humanitaire, aussi juste soit-elle...


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C’est sur fond de crise naissante entre le Haut-Commissariat de l’ONU en charge des réfugiés (UNHCR) et le ministère libanais des Affaires étrangères que la chancelière allemande Angela Merkel entame sa visite au Liban. Cette visite suit de près celle effectuée par le président allemand à Beyrouth avant les élections législatives et arrive à un moment où le pays n’a pas encore...

commentaires (5)

Il n'a pas deux vérités, il n'y en a qu'une seule. Tout le monde se rappelle des cris d'Ahmed Choucaïri appelant les Arabes à jeter les juifs à la mer. Ma vérité est la suivante: Le projet de conquérir le monde est déclenché. Le Liban multiconfessionnel est la proie la plus facile. Commençons par lui. Fermons le ban !

Un Libanais

15 h 14, le 21 juin 2018

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Commentaires (5)

  • Il n'a pas deux vérités, il n'y en a qu'une seule. Tout le monde se rappelle des cris d'Ahmed Choucaïri appelant les Arabes à jeter les juifs à la mer. Ma vérité est la suivante: Le projet de conquérir le monde est déclenché. Le Liban multiconfessionnel est la proie la plus facile. Commençons par lui. Fermons le ban !

    Un Libanais

    15 h 14, le 21 juin 2018

  • Les emigres doivent quitter notre pays Me la...chanceliere...et tout de suite...

    Soeur Yvette

    11 h 14, le 21 juin 2018

  • AU MENU AVEC LE HEMMOS ET LA TABBOULE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 07, le 21 juin 2018

  • ne nous voilons pas la face la chancelière vient au Liban pour expliquer que les émigrés doivent rester ici et on va vous payer pour. Et on recommence comme avec les Palestiniens, et on connait la cupidité locale on parle beaucoup mais on agit autrement et on ne va quand même pas offenser notre ami du pays du nord

    yves kerlidou

    09 h 14, le 21 juin 2018

  • Quand on pense que les Allemands (et l'Europe aussi, bien sûr) font la grimace pour un million de réfugiés dans un pays comme le leur, et leur gouvernement trouve normal de nous en imposer le même nombre dans un pays comme le nôtre...

    NAUFAL SORAYA

    07 h 10, le 21 juin 2018

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