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Liban - Décryptage

Et si, au-delà des polémiques, c’est la présidence de Michel Aoun qui est visée ?

« Le vrai leader est celui qui prévoit l’avenir et prend les mesures nécessaires pour le préparer, non celui qui attend que les choses arrivent pour prendre le train en marche. » Au palais de Baabda, le président Michel Aoun rappelle à ses visiteurs cette phrase qui est depuis longtemps sa devise et résume son action. Il lui arrive même de revenir sur certains de ses nombreux écrits et sur ses déclarations du temps où il était en exil forcé en France ou bien encore lorsqu’il était encore le chef du bloc du Changement et de la Réforme installé à Rabié. Il rappelle ainsi comment il avait prévu la montée des mouvements islamiques dans les années 90, même en Europe, appelant déjà à une politique d’intégration dans le respect pour éviter les clivages, l’exclusion et toute les frustrations qu’ils engendrent. Il rappelle aussi comment dès 2012 il avait été le premier à alerter les responsables de l’époque et l’opinion publique contre l’afflux massif de déplacés syriens en prévoyant les problèmes que cela entraînerait pour un pays aussi fragile et en difficulté économique que le Liban. Dans son attitude, il n’y avait aucune arrière-pensée raciste ou sectaire, rien que le souci d’un pays qui, depuis son indépendance, a rarement eu la possibilité de décider lui-même de son avenir.


(Lire aussi : Bassil : Le gel des permis de séjour du HCR est maintenu)

Avant son élection à la présidence, on l’avait accusé d’être obsédé par cette fonction. En réalité, il voulait simplement avoir la possibilité d’agir pour ce qu’il considère être l’intérêt de son pays et des citoyens. S’il ne s’agissait que d’un titre, il aurait pu s’installer au palais présidentiel et laisser passer les choses en prétextant que le chef de l’État n’a pas les prérogatives suffisantes pour agir. Mais, à peine élu, il a commencé à jeter les bases de son action. Sa priorité était d’abord d’assainir les relations avec toutes les parties, l’Arabie saoudite en tête. Mais cela ne signifiait pas qu’il comptait aligner sa politique sur la sienne. Dans toutes ses interventions internationales, régionales et arabes, il a pris soin de démarquer le Liban de la politique des axes, soucieux de défendre la cause palestinienne parce qu’elle unit les Arabes et parce qu’elle a une incidence directe sur le Liban. Ensuite, il s’est employé à consolider la stabilité interne, d’abord en assurant une couverture politique solide aux forces armées pour les mettre à l’abri des interventions politiques, ensuite en poussant les forces politiques à adopter une loi électorale qui assure une représentation équitable et réelle dans le but de consolider la paix civile en permettant à toutes les parties d’être représentées au sein du Parlement et à participer ainsi à la vie publique. Il a donc relancé le fonctionnement des institutions ainsi que la dynamique démocratique.

Même s’il y a des lacunes, voire des bavures, au moins le processus a-t-il été déclenché. Les élections législatives, qui n’étaient certes pas parfaites, ont quand même permis d’amorcer un changement dans la vie publique et dans la relation entre les politiques et les citoyens. Dans chaque communauté, et dans chaque région, il y a désormais une alternative, même si, dans certains cas, elle reste faible. C’est, à ses yeux, important pour que le sort des communautés ne dépende plus d’une seule personne, ou d’un seul parti ou courant. C’est donc une période de transition avec toutes les difficultés que cela comporte, mais il faut passer par là parce que, dans quatre ans, beaucoup de choses peuvent changer, et le changement se fera en douceur si la paix civile est solide... Le président Aoun est parfaitement conscient du fait qu’il mène une grande bataille sur le plan interne et sur le plan externe, les parties étrangères, arabes, régionales et internationales ayant pris le pli de croire qu’elles peuvent imposer leurs politiques au Liban, à travers les chefs de file confessionnels, parce que ce pays divisé en communautés dépend de l’étranger, et ses responsables n’osent pas faire front. Ce fut notamment le cas avec les Palestiniens qui sont venus au Liban et y ont été autorisés à prendre les armes. Lorsque l’armée a tenté de mettre un terme à leurs exactions, elle s’est divisée. Plus tard, le même scénario s’est pratiquement reproduit avec les Syriens et l’armée a été empêchée de réagir pendant des années. Il a fallu le président Aoun pour qu’elle décide de mener la bataille du jurd... De même que c’est lui qui a commencé par refuser les propositions de Satterfield et Tillerson au sujet du bloc 9, et le sujet n’est pas encore clos...


(Lire aussi : Bkerké revient à la charge : Non au décret de naturalisation)


Pour toutes ces raisons, le chef de l’État sait qu’il doit s’attendre à être combattu et à ce que des campagnes féroces soient menées contre ses projets pour les entraver, ou contre ses actions. Selon ses proches, le tollé contre le décret de naturalisation le vise ainsi personnellement, même si personne ne le dit ouvertement. Rien ne justifie, selon eux, cette campagne contre le décret qui ne porte que sur moins de 400 personnes, en respectant la parité entre chrétiens et musulmans, qui ne peuvent en aucun cas constituer une menace pour l’équilibre démographique. Ce n’est donc pas à comparer avec le décret de 1994 qui avait naturalisé plus de 300 000 personnes (157 000 familles) et avec celui de 2014 qui avait englobé 644 personnes, qui n’avaient d’ailleurs suscité aucun tollé. La plupart des naturalisés sont des gens qui y ont droit ou qui peuvent être utiles au Liban. S’il y a quelques noms qui ont été ajoutés et qui ne répondent pas aux critères requis, l’enquête de la Sûreté générale, demandée par le chef de l’État, le montrera et les rectifications nécessaires seront faites. Quant aux reproches formulés sur sa non-publication, la Constitution autorise cela pour tous les décrets portant sur des noms ou concernant le statut personnel. Enfin, la procédure est constitutionnelle puisque c’est l’une des prérogatives du chef de l’État. Ce dernier a voulu être juste et agir sans attendre la fin de son mandat comme l’ont fait ses prédécesseurs. La campagne, menée sous de grands titres comme le refus de l’implantation et la procédure anticonstitutionnelle, ne s’explique que par la volonté de dénigrer le chef de l’État pour réduire ses demandes dans le prochain gouvernement et l’empêcher de traiter les deux dossiers qu’il considère prioritaires, celui des déplacés syriens et celui de la lutte contre la corruption.


(Repère : Naturalisation : ce que dit la loi au Liban)


Au sujet des déplacés syriens, les milieux de la présidence suivent attentivement ce que font les autres pays, notamment européens, à l’égard des réfugiés syriens. Dimanche, l’Italie a renvoyé 600 d’entre eux, l’Espagne a décidé de tirer sur les clandestins qui cherchent à entrer sur son territoire, la France a renforcé les mesures pour l’accueil des réfugiés, la Grande-Bretagne a fait de même alors que la Grèce a installé des camps sous haute surveillance. Quant à la Jordanie, qui souffre de la présence des réfugiés syriens, elle vient de recevoir 2,5 milliards de dollars de la part de l’Arabie saoudite et des Émirats... Seul le Liban doit donc tout accepter et ne pas réagir ? Les proches du président laissent entendre qu’il ne compte pas lâcher ce dossier et ajoutent que cet homme, dont toute la vie a été un combat pour ses idées, n’en est plus à une intimidation près. Elles ne l’ont jamais empêché d’aller jusqu’au bout.


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« Le vrai leader est celui qui prévoit l’avenir et prend les mesures nécessaires pour le préparer, non celui qui attend que les choses arrivent pour prendre le train en marche. » Au palais de Baabda, le président Michel Aoun rappelle à ses visiteurs cette phrase qui est depuis longtemps sa devise et résume son action. Il lui arrive même de revenir sur certains de ses nombreux...

commentaires (12)

Michel Aoun est le président , sans doute le premier de la république libanaise depuis son indépendance en qui l'histoire contemporaine trouvera tous les éléments requis pour relater une épopée sur ses performances , son courage et sa sagesse dans la gestion des problèmes allant des plus simples aux plus compliqués. Tôt ou tard , même ses pires détracteurs le reconnaîtront .

Hitti arlette

17 h 01, le 12 juin 2018

Tous les commentaires

Commentaires (12)

  • Michel Aoun est le président , sans doute le premier de la république libanaise depuis son indépendance en qui l'histoire contemporaine trouvera tous les éléments requis pour relater une épopée sur ses performances , son courage et sa sagesse dans la gestion des problèmes allant des plus simples aux plus compliqués. Tôt ou tard , même ses pires détracteurs le reconnaîtront .

    Hitti arlette

    17 h 01, le 12 juin 2018

  • lol oui madame comme l'arabie saoudite est derriere les manifs en jordanie ….. pour aller leur donner 2.5 milliards de dollars n'est ce pas !?!

    Bery tus

    15 h 00, le 12 juin 2018

  • DES DIVAGATIONS A LA PELLE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    14 h 23, le 12 juin 2018

  • Le vrai leader, comme votre article démarre, devrait vérifier la fait et la liste avant de signer le décret à surprises et non pas après lavoir signée comme le président a fait et surtout sous pressions ... Un article perte de temps tout simplement.

    Wlek Sanferlou

    13 h 52, le 12 juin 2018

  • LA BAVE DU CRAPAUD NE SAURAIT ATTEINDRE LA BLANCHE COLOMBE . JOLI DICTON QUI S'ADRESSE AUSSI BIEN À NOTRE COMMANDANTE KHENERAL PHARE AOUN, QU'À NOTRE SCARLETTE NATIONALE .

    FRIK-A-FRAK

    13 h 13, le 12 juin 2018

  • Belle plaidoirie (suite). - Michel Aoun a imposé son gendre à la tête du CPL sans élections avec tous les pouvoirs. Le général de Gaulle n'a pas nommé son fils à la tête du RPF, comme il ne l'a pas fait Compagnon de la Libération, deuxième ordre national français après la Légion d'honneur. - Naturaliser 400 personnes à 80% Syriens et Palestiniens, naturalisés pour faits contre le Liban depuis la bosta de Aïn-Rammané en 1975. - Non-application de la loi de Raymond Eddé "Mén ayn laka hâza ?" (D'où as-tu cela ?). Où est l'argent public, la Trésor de l'Etat est vide. Certains sont devenus des milliardaires... - La présidence de Michel Aoun visée (sic). La Présidence fut imposée par une milice pro-iranienne à une Chambre par des supplétifs à genoux et 29 mois de blocage des Institutions. (Fin).

    Un Libanais

    11 h 37, le 12 juin 2018

  • Il faut arrêter de faire assumer aux "autres" les maladresses du Président et celles de certains personnages qui l'entourent. Vous n'avez pas besoin, chère Madame, d'énoncer les qualités du Président (tout le monde les lui reconnait),pour couvrir une erreur de gouvernance très grave, celle d'un décret de naturalisation qui n'a pas arrêté de défrayer toutes les chroniques depuis une semaine. Cet acte au contenu certainement anticonstitutionnel pour multiples raisons, a consciemment ou inconsciemment, secoué le peuple libanais, parce qu'il l'a fait revivre les pages et les souvenirs les plus sombres de la guerre libanaise, et lui a donné l'impression d'avoir été "trahi"...!

    Salim Dahdah

    11 h 00, le 12 juin 2018

  • Ouaouuuuuuh cela s'appele encenser une personne !!! - "...il a pris soin de démarquer le Liban de la politique des axes..." et la politique de "l'axe dit de la résistance syro-iranien" imposé par le Hezbollah, cela s'appele comment ? - "le vrai leader est celui qui prévoit l'avenir" actuellement, notre avenir c'est: pas d'électricité, pas d'eau propre dans nos robinets, des déchets partout, etc. etc. - l'afflux des déplacés syriens...il augmente chaque jour, malgré "ses alertes dès 2012" et les cris de son ministre des affaires étrangères, alors qu'il suffirait d'exiger de la part du régime de Damas de les rapatrier, un point c'est tout. etc., etc. la liste des faits qui contredisent les propos de cet article est longue...longue, quant à sa lutte contre la corruption...nous voulons bien croire que ce n'est qu'une blague de la part de Monsieur Michel Aoun !?!? Irène Saïd

    Irene Said

    10 h 53, le 12 juin 2018

  • En plus d'être le COMMANDANTE KHENERAL PHARE AOUN, notre président s'apparente de plus en plus à Ghandi ou Nelson Mandela . Cet homme est un VISIONNAIRE, la phrase du début qui donne la définition du vrai leader lui va comme un gant , si le COMMANDANTE KHENERAL PHARE AOUN n'existait pas , il aurait fallu l'inventer. Après avoir connu un tel président de la république, le liban ne pourra plus se permettre d'en avoir un autre moins que ça . J'admire les hommes courageux , ceux qui peuvent changer d'avis certes mais qui restent droit dans leurs bottes pour des causes juste et qui assument leurs choix et opinions . Au Liban où il ya inflation de tout, la rareté du " produit" Aoun est très appréciée. Scarlett est faite du même bois d' ébène.

    FRIK-A-FRAK

    10 h 13, le 12 juin 2018

  • ""Et si, au-delà des polémiques, c’est la présidence de Michel Aoun qui est visée ?"" a lire l'auteure s hadad : CE SERAIT UN CRIME DE LESE MAJESTE,UN SACRILEGE, LE CRIME DES 5 DERNIERS SIECLES ! POURQUOI DONC ?

    Gaby SIOUFI

    10 h 10, le 12 juin 2018

  • CE N,EST PAS UN ARTICLE. CE SONT DES ENCENSEMENTS ET DES PANEGYRIQUES DU PARTI PRIS DE LA TRES CHERE MADAME SCARLETT HADDAD !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 16, le 12 juin 2018

  • Belle plaidoirie digne de Me Maurice Garçon (1889-1967), l'un des plus célèbres avocats de France. 300.000 naturalisations sous le mandat de Elias Hraoui, oubliant exprès que le Liban, à l'époque, était sous la botte syrienne ce qui n'est pas le cas, apparemment, aujourd'hui... Bloquer les institutions de l'Etat durant 29 mois pour être imposé par le Hezbollah selon le Document d'entente du 6/2/2006... Imposer à la tête du ministère de l'Energie un ministre issu de la société civile et ce, durant 4 ans et 4 mois puis à la tête du ministère des Affaires étrangères depuis février 2014 jusqu'à aujourd'hui sans jamais lui demander des "comptes"... Confectionner une loi électorale tarabiscotee à la taille de son parti et ses alliés... Je m'arrête là.

    Un Libanais

    09 h 11, le 12 juin 2018

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