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Moyen Orient et Monde - Russie

Armements : Poutine va jusqu’au bout de son obsession

Le chef du Kremlin s’est attiré les foudres des Occidentaux pour avoir vanté les capacités militaires de son pays.

Le président russe Vladimir Poutine s’adresse à l’Assemblée fédérale, aux parlementaires de la Douma, aux membres du Conseil de la Fédération, aux gouverneurs régionaux et d’autres hauts fonctionnaires, à Moscou, en Russie, le 1er mars 2018. Maxim Shemetov/Reuters

« Personne ne voulait nous parler, personne ne voulait nous écouter. Écoutez-nous maintenant ! » a déclaré jeudi Vladimir Poutine devant les députés russes, en visant directement les Occidentaux. À la veille de l’élection présidentielle, le chef du Kremlin cherche à la fois à séduire et rassurer la population russe sur la capacité de défense de son pays. Le président a présenté jeudi, pendant près d’une heure, les armes « invincibles » de dernière technologie dont l’armée russe dispose. Cet armement, selon M. Poutine, doit servir avant tout à protéger la Russie des systèmes de boucliers antimissiles et du rapprochement des infrastructures de l’OTAN en Europe de l’Est et en Corée du Sud. « C’est une réponse à ce qui a obsédé Vladimir Poutine depuis son élection à la tête de la Russie, à savoir le bouclier antimissiles déployé en Europe de l’Est et au Moyen-Orient », affirme à L’Orient-Le Jour Cyrille Bret, enseignant à Sciences Po Paris et spécialiste de la Russie.
Il s’agit également d’une réponse à l’augmentation du budget militaire américain. Si celui de la Russie (60 milliards de dollars) est plus de dix fois moindre que celui des Américains (650 milliards de dollars), cela n’empêche pas Vladimir Poutine de vouloir affirmer son statut de puissance militaire mondiale. « La relance des dépenses militaires américaines a fait que la Russie a voulu montrer qu’elle est toujours en course et dispose de moyens technologiques conséquents pour assurer sa sécurité », ajoute Florent Parmentier, enseignant à Sciences Po, directeur du site EurAsia Prospective.

Missiles de croisière à portée « illimitée » ou hypersoniques, minisubmersibles à propulsion nucléaire, et même des « armes laser »… Tout est là pour faire la promotion de l’étendue de la puissance militaire russe et inciter les ennemis du Kremlin à ne pas prendre d’initiatives risquées. Mais même si Moscou a assuré que son intention n’était pas d’effectuer une nouvelle course aux armements avec Washington, un sentiment d’inquiétude est néanmoins ressenti chez certains pays qui voient dans la démonstration de Vladimir Poutine une volonté de réarmement.


(Lire aussi : Les nouvelles armes "invincibles" de Poutine : faut-il s'inquiéter ?)

Ce que l’Europe devrait faire...
La Maison-Blanche a accusé le Kremlin de « violation directe » des traités internationaux signés par la Russie. Parmi eux se trouve le traité INF (traité sur les armes nucléaires à portée intermédiaire) signé en 1987 entre les États-Unis et l’URSS, représentés à l’époque par Ronald Reagan et Mikhaïl Gorbatchev. Le geste de Vladimir Poutine pourrait également mettre en péril le traité New Start signé en 2010 (sous la présidence de Barack Obama) dont l’objectif était la réduction des armements stratégiques. Toutes ces accusations ont été démenties par Moscou. « La Russie a été, est et sera contrainte par ses obligations internationales », a assuré le porte-parole du Kremlin, Dimitri Peskov. Mais au-delà des réactions américaines, le geste de Vladimir Poutine pourrait aggraver davantage la nature des relations diplomatiques américano-russes, déjà fortement refroidies. « Cela peut avoir un double effet : soit figer les positions dans une course aux armements classique, soit montrer aux États-Unis que les Russes ont du répondant et cela incite les républicains à infléchir leurs positions et à trouver une façon de dialoguer moins tendue avec les Russes », explique Cyrille Bret.


(Lire aussi :  Le Kremlin réfute toute nouvelle "course aux armements" avec Washington)


Les autres cibles de cette démonstration russe, l’OTAN et l’Europe, se sont également manifestées hier. L’organisation transatlantique, accusée par la Russie de déployer son système de bouclier antimissiles à sa frontière, a fait part de son inquiétude et de son mécontentement vis-à-vis des propos du chef du Kremlin. « Les déclarations russes menaçant de cibler les Alliés sont inacceptables et contre-productives », a affirmé la porte-parole de l’Alliance Oana Lungescu. « La défense antimissiles de l’Alliance n’est ni conçue ni dirigée contre la Russie. Notre système se défend contre les missiles balistiques de l’extérieur de la zone euro-atlantique », a-t-elle rappelé.
 « La chancelière et le président (allemands) sont inquiets des dernières déclarations du président russe Poutine sur le développement de son armement et de leurs conséquences sur les efforts de contrôle international des systèmes d’armements », a indiqué hier la chancellerie allemande dans un communiqué. Depuis l’épisode de la campagne dans le Donbass et l’annexion de la Crimée en 2014, l’Europe a revu sa position vis-à-vis de la Russie et du risque qu’elle pourrait éventuellement représenter pour la paix. « De ce point de vue-là, cela ne fait que confirmer la prise de conscience européenne du fait qu’il y a des défis militaires et sécuritaires à l’Est. Cela ne peut que renforcer les initiatives prises par Emmanuel Macron pour relancer la défense européenne dans le domaine des équipements », précise Cyrille Bret. « L’Europe doit avoir de vraies discussions sur son potentiel militaire et montrer qu’elle a des moyens de défense pour ne pas être prise à partie par les tensions russo-américaines », conclut Florent Parmentier.


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