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Culture - L’artiste de la semaine

Béchara Moufarrej, en chasse et en amours

De l’allure, du battant, de l’énergie. Ce ténor émérite, gratifié en Angleterre d’« un titre de séjour permanent pour talent exceptionnel », n’a pas fini d’ajuster son tir, entre randonnées de chasse et présence sur scène...

Béchara Moufarrej.

« J’aurai trente-quatre ans Noël prochain », précise Béchara Moufarrej tout de go dans un éclat de rire. Barbe sombre fournie, taillée avec précision, regard noir et vif, silhouette sportive et voix presque douce pour un chanteur aux fureurs vocales indomptables...
Habité de deux passions, il mène de front une carrière, surprenante, entre une agence de chasse dont il est le directeur (il vient de rentrer de Serbie après avoir couru derrière faisans, perdrix et sangliers !) et une brochette de personnages d’art lyrique à qui il prête avec superbe sa voix. Il se produira le 15 mars prochain au festival d’Abou Dhabi aux côtés de la célébrissime soprane Deborah Voigt. Au menu, un air de La Traviata de Verdi et le One Hand, One Heart de West Side Story de Leonard Bernstein.

De Paris à New York en passant par Shanghai, Londres, Milan, Doha, Le Caire, Abou Dhabi et Dubaï, il chante en toute allégresse. Il n’oublie pourtant jamais ses vingt-deux chiens et treize fusils de chasse, même en comte Almaviva qui a fait le tour de Livourne, Pise, Lucques et Novare avec Le Barbier de Séville de Rossini sous la baguette de Nicolas Pascovski et la mise en scène d’Alessio Pizzech (assistant de Riccardo Mutti à la Scala).


(Pour mémoire : « Un ténor, aujourd’hui, n’est pas un patapouf : il lui faut des muscles »)


Moufarrej le reconnaît : jouer 99 fois Le Barbier de Séville, entre Rome, Milan, Toscane, Bologne et Ravenne, c’est presque un record pour un ténor non italien. Mais il sait également qu’un ténor doit être écouté en différents répertoires comme Verdi et Puccini. « Tout s’est joué sous l’impulsion de mon professeur Victorio Terranova (guide vocal de Juan Diego Florez) qui m’a mené loin du “light Mozart” et de la colorature de Rossini. » Avec La Bohème, il y a trois ans, le maestro Kurt Meister, président de la Philharmonie du Qatar, a filmé en vidéo, par téléphone portable, sa prestation et l’a envoyée à Londres à Mark Shanahan, président du National Opera Studio. Et miracle sans doute de la technologie, du hasard et d’une bonne étoile, ce fut, paraît-il, la révélation d’une « voix italianisée ». Sans attendre, ce fut le départ pour Londres, et ce visa pour « exceptional talent residency » (titre de séjour pour talent exceptionnel). C’est ainsi que Béchara Moufarrej a été appelé à chanter avec le National Opera Studio, illustre institution liée aux six opéras de l’Angleterre, entre autres le Covent Garden, l’Opéra d’Écosse, le Welsh National Opera... Il se produira en Rodolfo pour La Bohème de Puccini à l’opéra Clonter, qui compte plus de 400 sièges, près de Liverpool. Une production en grande pompe qui aura lieu en juillet 2018.


(Pour mémoire : Béchara Moufarrej brille sur les planches de l’opéra italien)


Quel sentiment éprouve-t-il sur scène ? « L’adrénaline monte dès que le rideau se lève. Quand je chante, je suis le duc, le comte, le poète, l’amant… L’emprise de la personnification du rôle est totale et impérieuse », confie le jeune homme qui a encore l’enthousiasme de l’enfance.
Y a-t-il encore des rêves à réaliser ? « Oui, aller encore plus loin, dit-il. Un rêve doit toujours être un rêve pour se réaliser… Et si ce rêve ne vous effraie pas, cela reste un petit rêve ! Moi, j’aime les grands rêves et j’ai un cœur courageux… »


1984
Naissance à Aïn Saadé (Liban).

2002
 Décision d’être chanteur.
Il reste à Rome à la chorale Santa Maria Maggiore.


2010
Études musicales entre Palerme
et Milan.


2013
« Carmen » au Cirque d’hiver
à Paris.


2014
« Le Barbier de Séville » de Rossini part, à partir du Liban, en tournée
européenne.


2015
Audition avec Kurt Meister
au Qatar.


2016
Acceptation au National Opera
Studio à Londres.

2018
« La Bohème » de Puccini
au Clonter Opera.


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