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Moyen Orient et Monde - Israël

Fermeture du Saint-Sépulcre : une volonté « d’affaiblir la présence chrétienne »

Certains dirigeants palestiniens ont qualifié les mesures de la municipalité de la ville trois fois sainte de « nettoyage ethnique ».


Les fidèles ont dû se contenter hier de prier devant les portes closes du Saint-Sépulcre à Jérusalem. Thomas Coex/AFP

Le bras de fer se poursuit entre les trois Églises grecque-orthodoxe, arménienne et catholique, et le gouvernement israélien. Pour la seconde journée consécutive, les portes du Saint-Sépulcre, lieu le plus saint de la chrétienté, restaient closes hier, comme c’est le cas depuis dimanche midi. Deux causes sont derrière cette décision inédite, la troisième depuis 1990 : des mesures fiscales prises par le maire de Jérusalem, et un projet de loi sur les biens immobiliers de ces Églises. Les mesures fiscales consistent à faire payer aux Églises concernées des impôts sur plusieurs centaines de biens immobiliers – mais non pas les lieux de culte – qui génèrent un revenu, comme les loyers, les commerces et les auberges qui accueillent les pèlerins.

L’exemption de cet impôt, dite « arnona », remonte à l’Empire ottoman et n’a jamais été touchée jusque-là. Selon le maire de la ville, Nir Barkat, plus de 180 millions de dollars seraient dus en arriérés. Le projet de loi, quant à lui, permettrait d’exproprier des biens appartenant aux Églises vendus à des investisseurs privés. Le projet prévoit aussi de compenser financièrement les investisseurs, afin de rassurer les habitants qui pourraient être expulsés. Les autorités auraient déjà commencé à réclamer leur dû : plusieurs centaines de milliers de dollars ont été récoltés, et plusieurs comptes bancaires auraient été gelés, selon certains médias israéliens, bien que la commission ministérielle israélienne, qui devait examiner le projet de la municipalité de Jérusalem dimanche, ait reporté sa décision d’une semaine. D’ici là, la ville pourrait perdre des sommes considérables, ne serait-ce que sur le plan touristique.  


(Lire aussi : Fidèles et touristes désenchantés devant les portes closes du Saint-Sépulcre)


À l’approche de Pâques, ces mesures ont déjà commencé à affecter la manne touristique dont bénéficie la ville trois fois sainte, qui voit chaque jour des milliers de voyageurs s’agglutiner devant le Saint Sépulcre. « On nous a dit que c’était politique. C’est désolant, c’est un site tellement saint », disait hier à l’AFP Aleana Doughty, une Américaine de 35 ans venue en groupe, et qui n’était pas au courant de la fermeture. L’église du Saint-Sépulcre abrite les deux sites les plus sacrés du christianisme : le site de la crucifixion de Jésus et le lieu où les chrétiens croient que Jésus a été enterré et est ressuscité. Pour les millions de pèlerins et touristes qui affluent chaque année, le lieu est une étape inévitable du voyage. De nombreux touristes ont dû se contenter, hier, de prier devant les battants en bois du Saint-Sépulcre.

Les Églises sont considérées comme d’importants propriétaires fonciers de la ville et estiment que les nouvelles mesures vont compliquer les ventes de terrains à des acheteurs privés, transactions qui couvrent leurs frais de fonctionnement et leur permettent de financer leurs œuvres sociales. « Ce projet de loi odieux, s’il est approuvé, rendra possible l’expropriation des terres de l’Église », affirment Théophile III, le patriarche de Jérusalem, Francesco Patton, le custode de la Terre sainte, et Nourhan Manougian, le patriarche arménien de Jérusalem, dans un communiqué publié dimanche. « Cela nous rappelle toutes les lois de même nature qui ont été mises en œuvre contre les juifs pendant les périodes noires en Europe », ajoutent les trois dirigeants religieux.


(Lire aussi : Saint-Sépulcre : le bras de fer continue entre les chefs des Églises chrétiennes de Jérusalem et la municipalité)


« Effet indirect sur le bien-être social »

Les Églises affirment que la décision a pour but ultime d’amoindrir la présence chrétienne dans la ville. Plusieurs responsables politiques palestiniens ont également dénoncé la décision municipale, pointant du doigt une énième décision visant les Palestiniens. Hanane Achraoui, de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), a même qualifié l’affaire de « nettoyage ethnique ». D’autres ont estimé que les nouvelles mesures déclarent « ouvertement la guerre » aux Palestiniens et ne sont que la continuité de l’annonce, début décembre, du président américain Donald Trump de considérer Jérusalem comme la capitale d’Israël et de déménager l’ambassade américaine de Tel-Aviv vers la ville sainte. Les chrétiens de la ville n’avaient pas bien accueilli la nouvelle : les lumières du sapin à Bethléem avaient été éteintes par les Églises pour protester, entre autres. « Ils veulent affaiblir la présence chrétienne de Palestine, c’est une réalité, malheureusement, et non pas une simple impression », déplore un prêtre libanais désirant garder l’anonymat.

Dans une ville croulant sous les coupes budgétaires, les implications de telles mesures sont nombreuses pour les communautés chrétiennes de Jérusalem, et plus particulièrement les familles démunies qui dépendent des institutions des Églises. « Si ces institutions payent une taxe, leurs frais vont augmenter et les chrétiens palestiniens ne seront pas en mesure d’en profiter de la même manière. Il y aura un effet indirect sur le bien-être social et éducatif des chrétiens de Jérusalem, mais aussi sur les pèlerins », estime l’ancien ministre Tarek Mitri, spécialiste du dialogue interreligieux au sein du Conseil œcuménique des Églises du Moyen-Orient. Assez peu nombreux, les chrétiens sont « entre 10 000 et 12 000 dans la ville même ; trois gros bourgs près de Jérusalem – Bethléem, Beit Jala et Beit Sahour – ont des communautés chrétiennes assez importantes », ajoute M. Mitri, pour lequel le principe du statu quo appliqué à Jérusalem n’est, dès lors, plus respecté par le gouvernement. « Pour les chrétiens de Palestine, cela montre que le gouvernement israélien fait fi de leur attachement et de leurs liens multiséculaires. Si le statu quo n’est plus respecté, tout devient possible », avance le spécialiste.


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commentaires (5)

Il faut tenir bon et continuer la fermeture du Saint Sépulcre, car ils sont des diables. Dans le monde entier l'église aide les pauvres , regarder la Grèce malgré tout le gouvernement laisse l'église sans l'embêter car elle aide beaucoup les personnes qui ont besoin et Dieu sait la pauvreté qu'il y a en Grece

Eleni Caridopoulou

17 h 07, le 27 février 2018

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Commentaires (5)

  • Il faut tenir bon et continuer la fermeture du Saint Sépulcre, car ils sont des diables. Dans le monde entier l'église aide les pauvres , regarder la Grèce malgré tout le gouvernement laisse l'église sans l'embêter car elle aide beaucoup les personnes qui ont besoin et Dieu sait la pauvreté qu'il y a en Grece

    Eleni Caridopoulou

    17 h 07, le 27 février 2018

  • Probablement il y aura des tentatives pour diviser les principaux clergés de Jérusalem. ATTENTION Ils doivent tenir bon et serrer les coudes. Surtout ne pas accepter de telles concessions .. Partout dans le monde les ecclésiastiques, au vu de leur statut particulier bénéficie des mêmes privilèges fiscaux. Jérusalem n'est pas une exception. Alors pour quelles raisons, au zénith même de la spiritualité monothéiste les chrétiens devraient consentir de tels efforts inacceptables, que nous savons d'avance visent leur disparition à terme.

    Sarkis Serge Tateossian

    15 h 48, le 27 février 2018

  • L,ANTI CHRIST !

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 21, le 27 février 2018

  • Comme disait l'autre : CHACUN MON TOUR . JE DIS BIEN CHACUN MON TOUR. CHASSEZ LE NATUREL ....

    FRIK-A-FRAK

    08 h 19, le 27 février 2018

  • L’arrogance et l’iniquité du Gouvernement israélien n’a plus de limite! Il est clair qu’il cherche à faire main mise sur la moindre parcelle de Jérusalem sans aucun scrupule! Qui l’en empêchera?

    Dounia Mansour Abdelnour

    04 h 58, le 27 février 2018

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