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Liban - Faune et flore

Un poisson caractéristique de Yammouneh, qu’on croyait éteint...

La chair de ce vairon est prisée depuis l’Antiquité. Photo Michel Bariche

On le pensait disparu, mais il a fallu la persévérance d’un biologiste marin de l’AUB, Michel Bariche, pour prouver qu’il ne l’était pas. Le Pseudophoxinus libani, ou vairon du Liban, qui, comme son nom l’indique, est endémique (caractéristique) de ce pays, avait été déclaré éteint depuis 1985, après la quasi-disparition du lac de Yammouneh (Békaa) où il vit, suite à la construction d’un tunnel artificiel et au drainage de l’eau. Mais de récentes études ont démenti cela, en démontrant non seulement que des spécimens de cette espèce existent toujours, mais qu’une espèce très similaire, présente dans une zone plus vaste, est en effet… identique génétiquement. Explications de Michel Bariche.

Nom scientifique
Le Pseudophoxinus libani (objet de cette rubrique) est pratiquement identique au Pseudophoxinus kervillei, comme l’a prouvé une étude de l’AUB. Ces poissons sont de la famille des cyprinidae, connus sous le nom de vairons. P. libani est plus particulièrement appelé vairon du Liban, ou « al-Choubout el-loubnani », alors que le P. kervillei est le vairon de l’Oronte.

Description
Ce poisson d’eau douce est argenté dans l’ensemble, avec une bande dorsale gris-olive ou gris-marron, une bande blanchâtre sur le ventre, et une bande plus sombre diffuse allant de la tête jusqu’à la nageoire caudale. Sa chair était très prisée des populations locales qui le consommaient régulièrement en été, durant la saison sèche. Le Pseudophoxinus libani était la seule espèce présente dans le lac de Yammouneh et considérée comme endémique du lac de Yammouneh par les spécialistes. L’espèce a été identifiée par Lortet en 1883.

Mode de vie
Au temps où le lac de Yammouneh n’était pas encore quasiment desséché et qu’il était séparé du fleuve Litani, les spécimens de Pseudophoxinus libani s’accumulaient durant la saison sèche (avec la baisse naturelle du niveau de l’eau) dans de petits bassins, ce qui les rendait faciles à pêcher par les populations locales. Ces poissons devenaient ainsi une source de nourriture estivale pour les habitants depuis l’Antiquité. Toutefois, comme ce poisson a la particularité de se reproduire très rapidement, il compensait ces pertes facilement en hiver, lorsque le lac reprenait son niveau initial.
Ces poissons vivent généralement en grands groupes, se déplaçant dans les eaux calmes, entre rochers et végétation. Ils se nourrissent d’algues et d’invertébrés aquatiques. Ils se reproduisent entre février et fin avril, et pondent leurs œufs entre les rochers.

Lieu de prédilection
De toute évidence, le Pseudophoxinus libani ne se trouve nulle part au monde que dans le lac de Yammouneh, dont il est une espèce endémique. Toutefois, cette information a été nuancée par les études de Michel Bariche et de son équipe, qui ont prouvé que cette espèce était génétiquement similaire au Pseudophoxinus kervillei, le vairon de l’Oronte, qui, lui, est géographiquement présent dans toute la région de l’Oronte, dans les affluents du Litani, et en amont de la rivière du Jourdain. Aujourd’hui, il convient donc de considérer qu’il s’agit dans les deux cas de la même espèce, soit le vairon du Liban.

Impact positif en milieu naturel
Outre le fait que le Pseudophoxinus libani est une espèce caractéristique d’une région libanaise, il a souvent été une source d’alimentation importante pour les populations locales.

Menaces et dangers
Dans le cas du Pseudophoxinus libani, on ne peut pas vraiment parler de menaces futures, puisque la disparition de son habitat l’a déjà propulsé dans le rang des espèces éteintes pour de nombreuses années, même si cela a été démenti récemment. En effet, l’ouverture d’un tunnel artificiel en vue de drainer l’eau du lac de Yammouneh vers d’autres zones de la Békaa en 1937, notamment pour l’irrigation de la plaine agricole, a provoqué la quasi-disparition du lac. Seuls quelques bassins et quelques sources continuent d’exister dans le bassin versant. C’est en 1985 que le ministère de l’Agriculture a déclaré éteint le Pseudophoxinus libani.
Pour une fois, c’est la bonne nouvelle qui succède à la mauvaise. Les études de terrain du biologiste marin et ichtyologue (spécialiste qui étudie les poissons) Michel Bariche lui ont permis de collecter personnellement, en 2007, de nouveaux spécimens de Pseudophoxinus, qu’il a pu identifier comme des P. libani. C’est cette découverte qui a permis, ultérieurement, de recueillir le code génétique de ce poisson et de le comparer à son proche cousin, le vairon de l’Oronte, qui s’est avéré en l’occurrence être un frère jumeau !

Moyens de protection
Il va de soi que parler de protection d’une espèce endémique comme le Pseudophoxinus libani suppose une protection de son habitat, qui ne se limite plus à Yammouneh, mais s’étend à l’Oronte, au Litani et au Jourdain. Par conséquent, il faut que les projets hydrauliques soient étudiés et précédés d’études d’impact environnemental prenant notamment en compte la biodiversité. À un moment où tant de barrages sont en construction, cette idée est plus que jamais d’actualité. Sur un autre plan, ce poisson semble résister assez bien à la pollution, à condition qu’il évolue dans un milieu où il y a un flux d’eau en permanence.



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On le pensait disparu, mais il a fallu la persévérance d’un biologiste marin de l’AUB, Michel Bariche, pour prouver qu’il ne l’était pas. Le Pseudophoxinus libani, ou vairon du Liban, qui, comme son nom l’indique, est endémique (caractéristique) de ce pays, avait été déclaré éteint depuis 1985, après la quasi-disparition du lac de Yammouneh (Békaa) où il vit, suite à la...

commentaires (1)

L'état du faune et flore est peut-être plutôt triste, à cause de la pollution et la grande densité de population - constructions ... C'est bien qu'il y a encore quelques "Choubout el-loubnani" qui survivent encore (presque une espèce éteinte) mais c'est le cas je pense avec beaucoup de plantes et animaux au Liban, à commencer avec le 'cèdre' libanais, c'est triste qu'il ne reste que très peu.

Stes David

09 h 30, le 02 février 2018

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Commentaires (1)

  • L'état du faune et flore est peut-être plutôt triste, à cause de la pollution et la grande densité de population - constructions ... C'est bien qu'il y a encore quelques "Choubout el-loubnani" qui survivent encore (presque une espèce éteinte) mais c'est le cas je pense avec beaucoup de plantes et animaux au Liban, à commencer avec le 'cèdre' libanais, c'est triste qu'il ne reste que très peu.

    Stes David

    09 h 30, le 02 février 2018

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