Plus d'un milliard de dollars. C'est ce qu'aurait payé le prince Metab ben Abdallah, fils du défunt roi Abdallah, pour sa libération mardi après trois semaines de détention, d'après l'agence Bloomberg News.
Arrêté dans le cadre d'une purge anticorruption spectaculaire début novembre, le prince de 64 ans, qui fut un temps prétendant au trône durant le règne de son père, et chef de la puissante Garde nationale saoudienne avant d'être limogé quelques heures avant son arrestation, aurait payé cette somme après un « accord transactionnel acceptable » avec les autorités saoudiennes, qui exigeaient au début dix milliards de dollars. Son frère Abdel Aziz ben Abdallah, vice-ministre des Affaires étrangères, aurait en personne négocié les détails de cet accord, avant de fuir en France par crainte de poursuites. Aucune confirmation officielle n'est venue étayer ces informations divulguées par certain médias arabes et seule la libération du prince Metab a été confirmée par des sources gouvernementales.
Un tweet de sa belle-sœur Nouf bent Abdallah ben Mohammad ben Saoud, membre de la famille royale, accompagné d'une vieille photo du prince Metab avec le message : « Dieu merci ! Que la paix soit avec vous Abou Abdallah », semblait confirmer hier cette libération. Un message similaire a été twitté par la princesse Abir bent Khaled ben Abdallah : « Que Dieu vous accorde une longue vie, vous donne la santé et vous garde en sécurité pour nous. »
(Pour mémoire : Purge anticorruption : Riyad propose aux personnalités détenues de payer pour leur liberté, selon le FT)
Pressions internes ?
Outre le prince Metab, qui s'est rendu mardi après-midi dans son palais de Riyad, d'autres personnalités influentes auraient été libérées ces derniers jours, dont le prince Turki ben Abdallah, le docteur Ibrahim ben Abdelaziz ben Abdallah al-Assaf (ancien ministre des Finances saoudien) et Mohammad ben Abdel Rahman al-Toubaichi (ex-chef du protocole à la cour). Ce dernier aurait payé une somme similaire à celle payée par le prince Metab. D'après certaines sources, le prince héritier et ministre de la Défense Mohammad ben Salmane (alias MBS), à l'origine de la purge, aurait subi des pressions internes pour faire un geste de concession et libérer certaines personnalités. D'autres rumeurs concernent l'état de santé fragile du prince Metab, injoignable depuis sa libération : MBS l'aurait relâché pour que l'opinion publique ne lui impute pas la responsabilité de sa mort si son état venait à se détériorer en détention. Rien ne permet toutefois de confirmer, ou pas, ces informations. Le sort d'al-Walid ben Talal, arrêté lui aussi avec plusieurs dizaines de dignitaires, détenus depuis le 5 novembre au Ritz Carlton de Riyad dans le cadre de l'opération destinée à endiguer la corruption endémique, fléau du royaume depuis plusieurs décennies, reste inconnu.
Ces supposées libérations surviennent quelques jours après la publication dans le New York Times du premier entretien de MBS depuis la purge. Il y explique que 95 % des personnes détenues acceptent un « règlement » ou la restitution au Trésor saoudien de biens mal acquis. Près de 4 % contestent les accusations et décident d'aller jusqu'au procès, tandis que 1 % réussissent à prouver leur innocence et sont immédiatement libérés. La commission anti corruption, que préside MBS, aurait ainsi « récupéré » plus de 100 milliards de dollars. « La libération apparente du prince Metab pourrait être un signe que les autorités saoudiennes progressent dans la conclusion d'accords transactionnels avec les détenus », explique à l'AFP Kristian Coates Ulrichsen, chercheur au Baker Institute for Public Policy de l'Université Rice à Houston (Texas).
Pour nombre d'observateurs, d'autres libérations similaires devraient suivre au cours des prochains jours, alors que rien ne filtre de l'enquête menée par la commission anticorruption, entamée il y a plus de deux ans. Il est probable qu'il y ait une restriction de mouvement pour les personnalités libérées et qu'elles soient assignées à résidence. Moins d'un mois après la vague d'arrestations, la rapidité avec laquelle travaille la commission prouve son empressement à vouloir mettre fin à l'opération et à en toucher les dividendes, à la fois financiers et politiques. Pour certains analystes, quelques mois à peine après avoir été nommé prince héritier, MBS cherche à consolider son influence sur le pouvoir et les services de sécurité avant de remplacer son père sur le trône.
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commentaires (6)
Et MBS alors? Où a-t-il trouvé 500 millions de dollars pour acheter le yacht appartenant à un membre de la mafia russe?
Georges MELKI
12 h 05, le 01 décembre 2017