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À La Une - Syrie

Sortir de Raqqa, une question de vie ou de mort pour les blessés

"Le long voyage fait que les blessés arrivent dans un état lamentable. Nous avons alors besoin de plus de temps pour les préparer pour l'opération. S'ils arrivent à survivre", explique la coordinatrice médicale pour MSF, qui soutient l'hôpital de Tall Abyad, à la frontière avec la Turquie.

Une épaisse fumée s'échappe après une frappe aérienne contre une position du groupe jihadiste Etat islamique, le 4 octobre 2017 à Raqqa, en Syrie. Photo REUTERS/Erik De Castro

"Ne ferme pas les yeux! Reste éveillé!", hurle un combattant syrien à son compagnon d'armes blessé à bord du Humvee qui se fraye un chemin au milieu des ruines de la ville de Raqqa. A mesure que l'étau se referme sur les jihadistes du groupe Etat islamique (EI) dans leur dernier carré à Raqqa, l'évacuation des blessés vers les centres médicaux hors de la cité du nord de la Syrie, s'avère de plus en plus difficile.

Dans le véhicule parcourant les rues cahoteuses, le combattant blessé des Forces démocratiques syriennes (FDS) saigne abondamment après avoir été touché aux côtes par une balle. Son camarade lui soutient la tête pendant 20 minutes, jusqu'à l'arrivée au "point médical" le plus proche.
Une équipe médicale sur place accourt pour stopper l'hémorragie, soigner la plaie et mettre le blessé rapidement à bord d'une ambulance qui le sort de la ville. Il doit passer deux heures sur la route déserte avant de parvenir à un hôpital digne de ce nom, dans la ville de Tall Abyad, à la frontière avec la Turquie.

Sa survie dépend surtout du traitement initial reçu durant ce que le médecins appellent "l'heure d'or", explique Farhad Delli, un infirmier du Croissant-Rouge kurde. "Ceux qui sont blessés par balles ou par une mine saignent énormément. Les médecins doivent stopper l'hémorragie" le plus tôt possible, dit-il en fournissant les premiers soins à un "point médical".

 

(Lire aussi : Partir sans son père, la fuite amère d'une Syrienne de Raqqa)

 

Transfert difficile
Des centaines de civils ont été tués et un nombre plus important blessés depuis l'entrée à Raqqa en juin des FDS, une alliance soutenue par la coalition internationale dirigée par les Etats-Unis, qui cherchent à chasser l'EI de ce qui était sa "capitale" de facto en Syrie.

Le Croissant-Rouge kurde a établi plusieurs points médicaux à la périphérie de la ville pour pouvoir traiter entre 80 et 100 blessés par jour, selon M. Delli.
De là, près d'une dizaine de personnes grièvement blessées sont transférées quotidiennement vers des hôpitaux au nord de la ville, pour subir des opérations censées leur sauver leur vie.

Mais y parvenir est devenu compliqué. Juste après l'entrée des FDS à Raqqa, le périple de la ligne de front vers l'hôpital de Tall Abyad nécessitait 90 minutes. Mais à mesure que les combats se rapprochaient du cœur de la ville et avec la multiplication des barrages, ce trajet sur des routes cabossées est devenu plus long, explique à l'AFP Vanessa Cramond, coordinatrice médicale pour Médecins sans frontières, qui soutient l'hôpital de Tall Abyad.
"Le long voyage fait que les blessés arrivent dans un état lamentable. Nous avons alors besoin de plus de temps pour les préparer pour l'opération. S'ils arrivent à survivre", ajoute-t-elle.

 

(Lire aussi : Même acculé dans son fief en Syrie, l'EI conserve sa capacité de nuisance)

 

Messages cruciaux
Pire, il n'y a pas de réseau cellulaire le long de la route hors de Raqqa, obligeant le Croissant-Rouge kurde à donner le maximum d'informations à leurs collègues à Tall Abyad avant de quitter la ville ravagée.
"Nous notons tout sur un papier et nous envoyons une photo du patient à l'hôpital de Tall Abyad pour expliquer son état", explique M. Delli. "Comme ça, à son arrivée, ils seraient préparés pour le traiter".

D'après Mme Cramond, ces messages sont cruciaux. "Chaque minute compte dans le traitement d'un traumatisme", dit-elle devant les urgences à l'hôpital de Tall Abyad. "Nous échangeons des photos des blessures pour donner des conseils et savoir qui va subir une opération en premier".

Les blessés de Raqqa représentent la majorité des patients de cet hôpital, peu équipé.
Des patients, des proches et des médecins traversent la salle d'attente, tandis que des pleurs d'enfants parviennent des couloirs.

Sur les lits d'hôpitaux marqués au feutre rouge d'un numéro et d'informations sur le patient, quatre hommes sont traités pour des blessures aux jambes et aux mains. Dans une salle climatisée tout près, une jeune fille, le visage marqué de graves brûlures, se tourne et se retourne sans cesse.

Même si quelques poches de jihadistes subsistent à Raqqa, l'hôpital s'inquiète d'un nouvel afflux de blessés de la ville. "Nous voulons être prêts pour soutenir les civils", dit Mme Cramond.

Le combattant des FDS blessé et transporté à Tall Abyad, lui, n'a pas eu de chance, ont raconté ces camarades à l'AFP. Les médecins n'ont pas pu le sauver.

 

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