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À La Une - référendum

Dans la ville disputée de Kirkouk, l'inquiétude des Arabes et Turkmènes

"Nous respectons le droit des Kurdes à déterminer leur sort, mais nous refusons qu'une composante impose sa volonté aux autres", indique un Arabe de cette région autonome.

 

En ce jour de référendum, le 25 septembre 2017, la communauté kurde de Kirkouk a voté dans l'enthousiasme, rêvant de voir enfin naître l'Etat pour lequel elle lutte depuis près d'un siècle. AFP / AHMAD AL-RUBAYE

"Si j'avais vingt doigts, j'aurais voté vingt fois pour mon Etat", affirme Ibtissam Mohammad.
Cette Kurde de 45 ans, habitante de la ville disputée de Kirkouk, vient de tremper l'index dans l'encre et de glisser son bulletin dans l'urne pour le référendum d'indépendance du Kurdistan irakien.

La province de Kirkouk ne figure pas parmi les trois du Kurdistan irakien, mais la région autonome a décidé de l'inclure dans la consultation, au grand dam du Premier ministre irakien Haider al-Abadi.
Car Kirkouk, où se côtoient Kurdes, Arabes et Turkmènes, est une riche région pétrolière du nord de l'Irak que se disputent le gouvernement fédéral et le Kurdistan autonome.
Les Kurdes affirment qu'elle leur revient historiquement, arguant que l'ancien dictateur Saddam Hussein les en avait chassés et les avait remplacés par des Arabes.

Et, en ce jour de référendum, la communauté kurde vote dans l'enthousiasme, rêvant de voir enfin naître l'Etat pour lequel elle lutte depuis près d'un siècle.
Tawana Abd Eddine, 33 ans, membre des Assayech -les forces de sécurité kurdes- dit voter en faveur d'"un Etat, pour un avenir meilleur et pour plus de sécurité". "Vivre dans une patrie est le rêve de chacun", fait-il valoir à l'AFP.
Pour Nouzad Hamid, enveloppé dans le drapeau kurde rouge, blanc et vert orné d'un soleil "demain, le soleil brillera et ce sera l'aube d'une nouvelle vie pour les Kurdes et pour toute la population de Kirkouk".

L'affluence est nombreuse dans les quartier kurdes, où les électeurs se sont rendus aux urnes en arborant des drapeaux, au son de la musique et de tirs de joie, a constaté un journaliste de l'AFP.
Mais dans cette ville multiethnique de plus d'un million d'habitants, c'est au contraire l'inquiétude qui prédomine au sein des minorités arabe et turkmène. Le centre-ville est quadrillé par un imposant dispositif de sécurité assuré notamment par les Assayech.

(Lire aussi : « Notre droit » ou « un enfer » ? Au Kurdistan irakien, la question de l’indépendance ne fait pas l’unanimité)

 

Youyous et danses
La ville n'a pas dormi. Des convois de voitures ont sillonné ses principales artères appelant par haut-parleurs les habitants à participer au "référendum historique".
Des youyous et des danses ont suivi la déclaration du président kurde, Massoud Barzani, affirmant la veille au soir que le partenariat avec Bagdad avait "échoué" et appelant les habitants à se rendre aux urnes.

"J'ai toujours attendu ce jour-là. C'est comme si je renaissais. C'est pour moi un nouvel anniversaire", s'exclame Sami Abderrahmane, étudiant en architecture de 22 ans qui vient de voter.
"Ma grand-mère est malade. Elle ne pouvait pas venir, mais elle m'a dit de voter +oui+, parce que mes oncles sont morts pour cette indépendance", ajoute-t-il.

A la veille du référendum, le gouverneur kurde de la province, Najm Eddine Karim, a lui aussi appelé la population, avec toutes ses composantes: "Kurdes, Arabes, Turkmènes, Assyriens, sunnites, chiites", à participer massivement.


(Repère : Les Kurdes, un peuple sans Etat en quête de reconnaissance)

 

"Nous voulons la paix"
Ce neurologue de 71 ans, qui possède la nationalité américaine pour y avoir exercé de nombreuses années, est l'homme par qui le scandale est arrivé. C'est lui qui a poussé à l'inclusion de sa province dans le référendum initié par Massoud Barzani, provoquant la colère de Bagdad, qui a dénoncé une mesure illégale et anticonstitutionnelle et l'a limogé de son poste.

Ces appels du gouverneur de Kirkouk ne semblent pas avoir réussi à mobiliser les électeurs arabes et turkmènes, qui ont globalement boudé les urnes.
"J'ai le sentiment que mon identité, ma nationalité, mon patrimoine et mon histoire seront perdus", explique Abdallah Aouji, enseignant turkmène de 42 ans.

Ce sentiment est partagé dans la communauté arabe. Pour Khalaf Majel al-Obeidi, 51 ans, "les Arabes sont la composante la plus vulnérable de Kirkouk."
"Nous respectons le droit des Kurdes à déterminer leur sort, mais nous refusons qu'une composante impose sa volonté aux autres", dit-il.
Certains, au sein de sa communauté, estiment tout de même que l'indépendance du Kurdistan est susceptible d'améliorer le niveau de vie et l'économie locale.
"Nous ne sommes pas avec ou contre le référendum, de toute façon il ne réglera rien en un jour. Tout ce que nous, Arabes et Turkmènes, voulons, c'est la paix", résume Salam Jomaa, un fleuriste arabe de 39 ans.

 

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