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Économie - Crise

Tensions dans le Golfe : les milieux d’affaires libanais dans l’expectative

La mise au ban du Qatar affecte déjà le transport ou la distribution et pourra pénaliser d'autres secteurs si elle se prolonge.

Le Qatar accueille environ 60 000 ressortissants libanais, selon la Chambre de commerce de Beyrouth. Archives AFP

Près d'une semaine après le début de la crise diplomatique qui oppose le Qatar à l'Arabie saoudite et ses alliés, les milieux d'affaires et les expatriés libanais prennent leur mal en patience et restent prudents.
« Les conséquences de ces tensions sur la situation financière des expatriés libanais dans le Golfe, et, par ricochet, sur l'économie libanaise, qui dépend en partie des remises de la diaspora, restent pour l'instant limitées », affirme à L'Orient-Le Jour le président de la Chambre de commerce de Beyrouth et du Mont-Liban (CCIAB), Mohammad Choucair. « La situation n'est pas encore alarmante, même si elle est plus délicate qu'en 2014 », estime pour sa part le président du Rassemblement des dirigeants et chefs d'entreprise libanais dans le monde (RDCL World), Fouad Zmokhol.

À l'époque, les gouvernements saoudien et émirati avaient rappelé leurs ambassadeurs respectifs au Qatar, gelant ainsi les relations pendant huit mois pour protester contre le soutien de l'émirat à certains groupes terroristes accusés de déstabiliser la région. Ils avaient par la suite rétabli leurs relations diplomatiques avec Doha.

Avec 60 000 expatriés libanais, le Qatar est le 4e pays du Golfe qui accueille le plus de ressortissants du pays du Cèdre, selon la CCIAB. « La majorité d'entre eux est employée dans le secteur privé, notamment pour le compte de grandes entreprises dans des secteurs variés (finance, construction, tourisme, etc.) », poursuit M. Choucair. Si l'on ne peut pas déterminer la part du Qatar, le pays fait partie avec ses voisins du Golfe des plus importants contributeurs des remises des expatriés, qui ont atteint 7,62 milliards de dollars en 2016, selon la Banque du Liban (+1,8 % en un an), soit 14,7 % du PIB estimé par le Fonds monétaire international pour cette année.

 

(Pour mémoire : Quelles répercussions de la crise du Golfe sur les Libanais ?)

 

Mouvement de panique
Malgré sa gravité, la crise diplomatique que traverse le Qatar ne semble pas pour autant perturber la vie des Libanais qui y sont installés. « Il y a bien eu un mouvement de panique au début de l'affaire, les gens se sont rués dans les magasins pour faire des réserves en craignant le pire. Mais, depuis, la tension est retombée, et il est presque impossible de deviner que le pays traverse une crise diplomatique sans écouter les informations », raconte un Libanais employé dans une société à Doha, sous le couvert de l'anonymat.
De fait, la plupart des observateurs contactés par L'Orient-Le Jour estiment qu'il est encore « trop tôt » pour mesurer l'impact de cette crise sur les expatriés, mais reconnaissent que certains d'entre eux doivent en ressentir les effets. « Les premiers impactés sont les Libanais qui ont investi dans la Bourse du Qatar », indique M. Zmokhol. Avec 9 237,68 points à la clôture, jeudi, la Bourse de Doha a perdu 6,91 % de sa valeur depuis le début du conflit.

« Les expatriés qui travaillent dans les banques qataries vont également vivre dans l'incertitude depuis la décision des autorités saoudiennes et émiraties de suspendre leurs relations avec les établissements de l'émirat au courant de la semaine », note encore M. Zmokhol. « Cette décision n'affecte toutefois pas les relations des banques qataries avec leurs correspondantes au Liban », nuance M. Choucair. En outre, les banques libanaises seront peu exposées à cette crise, seules trois d'entre elles (Bank of Beirut, Bank Audi et BLOM Bank) possédant des activités au Qatar, selon l'Association des banques du Liban.

 

(Lire aussi : Le demi-blocus « n’est pour le moment pas de nature à inquiéter » le Qatar)

 

« Rester neutre »
Enfin, ce sont surtout les Libanais investis dans le transport et la distribution qui vont devoir composer avec la décision des autorités saoudiennes de bloquer les liaisons aériennes, maritimes et surtout routières avec le Qatar. « Les marchandises qui transitent habituellement par voie terrestre pourront être acheminées par voie maritime ou aérienne, ce qui va provoquer des retards et des coûts supplémentaires, mais rien n'indique que le transit va être interrompu », note M. Choucair. Une perspective rassurante pour le commerce extérieur du pays du Cèdre, dont la balance commerciale avec le Qatar est excédentaire, à 57,9 millions de dollars. En 2016, le Liban a en effet importé pour 17,8 millions de dollars de marchandises du Qatar, pour des exportations qui ont atteint 75,7 millions de dollars.

« En outre, le blocus imposé par Riyad pourra également impacter les distributeurs libanais basés dans le Golfe, mais qui ont des clients au Qatar », explique encore la source précitée. « De manière générale, toutes les sociétés qui possèdent des antennes ou des filiales au Qatar ainsi que dans d'autres pays engagés aux côtés de Riyad vont avoir des difficultés pour faire voyager leurs employés d'un pays à l'autre en raison de la décision de l'Arabie et de plusieurs de ses alliés (Bahreïn, Égypte et Émirats) de fermer leur espace aérien aux avions qataris », poursuit-elle. « Il faudrait donc que la crise ne dure pas plus d'un mois pour que ses conséquences ne s'étendent pas à d'autres secteurs », rebondit M. Choucair. M. Zmokhol appelle quant à lui « le Liban et ses ressortissants à faire preuve de neutralité jusqu'à ce que la situation s'apaise ».

 

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