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Moyen Orient et Monde - Diplomatie

Macron marche-t-il pour l’Algérie ?

Depuis ses propos sur la colonisation lors de son déplacement à Alger en février dernier, le nouveau président français a suscité un vif engouement et beaucoup d'espoir du côté de l'électorat algérien. À juste titre ?

Emmanuel Macron (d.), alors candidat à la présidentielle française, et le ministre algérien des Affaires étrangères (g.), Ramtane Lamamra, le lundi 13 février 2017, à Alger. Stringer/AFP

« La colonisation (...) est un crime contre l'humanité, c'est une vraie barbarie, et cela fait partie de ce passé que nous devons regarder en face. » Emmanuel Macron ne mâchait pas ses mots en février dernier, sur la chaîne de télévision privée algérienne Echourouk News. Alors en visite officielle à Alger en tant que candidat à la présidentielle française, le futur président claquait définitivement la porte aux relents de néocolonialisme qui subsistaient entre les deux pays. Il a eu « le courage de dire ce que personne avant lui n'avait osé dire », explique Dalia Ghanem-Yazbeck, spécialiste de l'Algérie, à L'Orient-Le Jour. « Ce qui a touché les Algériens, c'est le souci d'histoire et de vérité chez Macron », ajoute-t-elle. L'engouement du côté de la diaspora algérienne qui a suivi cette déclaration laissait presque espérer qu'Emmanuel Macron sorte de la ligne politique tracée par Valéry Giscard d'Estaing en son temps, et qui a depuis inspiré tous les hommes politiques français par la suite : ne plus faire du Maroc le premier partenaire français en Afrique du Nord, mais ouvrir la voie à l'Algérie pour se hisser au premier rang.

 

(Pour mémoire : La colonisation, un « crime contre l'humanité » : Macron revendique un « discours de vérité » sur l'Algérie)

 

 

Une coopération qui repose sur des besoins réciproques
Et pour cause, les relations entre les deux pays ont toujours existé, et ceux-là n'ont jamais cessé de travailler ensemble. Ils se tutoient un jour comme de vieux amis, quand la veille ils haussaient le ton comme un père qui ferait la leçon à son fils, et se réconcilient le lendemain en se promettant d'éviter les sujets qui fâchent à l'avenir. Il n'empêche qu'ils ont besoin l'un de l'autre pour avancer, et non pas seulement pour des facteurs démographiques et d'intégration. Si 5 millions d'Algériens se sont installés en France, selon les chiffres de l'Association internationale de la diaspora algérienne, il sera réducteur de considérer qu'Emmanuel Macron ait pu faire de l'œil à l'Algérie pour de simples raisons de clientélisme électoral.

L'Algérie en veut pour preuve : lors de sa visite à Alger en février dernier, l'ancien candidat s'entretenait pendant près de deux heures avec le Premier ministre Abdemalek Sellal, puis avec le ministre de l'Industrie et des Mines Abdesselam Bouchouareb, avant de déjeuner le lendemain avec le président du Forum des chefs d'entreprise Ali Haddad. Nul doute que le futur président voyait en l'Algérie un terreau fertile pour son économie, et ne comptait pas laisser trop de place à la Chine sur le marché algérien, qui, depuis plusieurs années déjà, trace son sillon.

La coopération ne s'arrête pas là, puisqu'avec 4 000 militaires français déployés au Sahel, le jeune élu de la République française a besoin de la coopération algérienne. Alors que le pays avait déjà prêté son espace aérien aux forces de l'aviation française pour l'opération Berkhane et assuré leur ravitaillement, il est un partenaire de poids dans la négociation des accords de paix pour la zone sahélo-saharienne, quand le Maroc paraît être un acteur plus lointain de ces dossiers.

 

Macron : le jeune espoir de l'Algérie ?
Pourtant, l'engouement qu'a suscité Emmanuel Macron du côté de la diaspora algérienne n'est parfois que de façade. Hocine Gasmi, journaliste algérien, met en cause le gouvernement de son pays à ce titre, qui est « illégitime » aux yeux de la population civile. « Le Maroc, lui, est dans une dynamique de vrai partenariat avec la France, il y a une volonté pour la transparence et le changement. En Algérie, il y a trop d'ombres dans les histoires d'investissements », dit-il.

La jeunesse du président français donne de l'espoir. Sa position courageuse sur la colonisation laisse entendre aux Algériens qu'il ne sera plus dans un rapport de connivence avec leur pays. Pour cela, Hocine Gasmi pose la question : « Macron va-t-il aller dans le sens du pouvoir algérien, ou à nouveau osera-t-il dire qu'il ne peut pas travailler avec des instances qui ne fonctionnent pas et un président malade ? » Il est légitime d'en douter, mais si rien ne change dans les relations franco-algériennes dans le courant de ce nouveau quinquennat, il y aura deux coupables : en premier lieu et en première ligne, « le gouvernement algérien, qui est déjà coupable depuis très longtemps », mais aussi « Emmanuel Macron, dont la jeunesse n'aura rien changé, alors même que c'est cela qui donnait tant d'espoir », explique le journaliste. Rabah Hahad, militant franco-algérien de 38 ans pour En Marche ! à Paris, nuance cette dernière accusation : « Macron n'a pas à demander à Bouteflika de changer : c'est à la société civile de le faire. Sinon, on retourne dans une situation d'ingérence, et ça, ce n'est pas envisageable. » Le nouveau visage de la présidence française influencera-t-il ou non le gouvernement algérien ?

Le pessimisme de certains, teinté d'une lueur d'espoir pourtant, est facilement compréhensible. Dalia Ghanem-Yazbeck le rappelle : « Emmanuel Macron a été courageux, mais dans une posture de candidat à l'élection présidentielle. Aura-t-il le courage de réitérer ses propos dans le costume du président de la République française ? J'en doute... » En ce qui concerne l'avancée des relations franco-algériennes, l'heure semblerait plutôt à la désillusion.

 

(Pour mémoire : En Algérie, Macron mesure "le poids du passé" mais voit aussi "l'avenir")

 

 

Macron, en marche vers la continuité
La diaspora algérienne a-t-elle posé trop d'espoirs sur les épaules d'Emmanuel Macron ? Les premiers pas de l'ancien énarque semblent montrer que oui, et à ce titre Dalia Ghanem-Yazbeck insiste sur la figure rassurante du président algérien Bouteflika : « Dans la tête de beaucoup de leaders français et européens, le président Bouteflika est synonyme de stabilité pour la région. »
Pourtant, lors de son récent déplacement au Mali pour rencontrer les troupes françaises sur place, Emmanuel

Macron annonçait s'être entretenu au téléphone avec M. Bouteflika pour faire avancer le processus de paix dans la région sahélo-saharienne. L'Algérie, qui a souvent été montrée du doigt et accusée d'entretenir des accointances avec les groupes jihadistes présents à la frontière avec le Mali pour éviter tout débordement sur son territoire, est pourtant l'un des modérateurs et des acteurs du processus de paix. L'appel entre les deux homologues français et algérien n'aurait pas été de si bon augure, en témoigne l'absence de couverture médiatique de l'événement du côté algérien, pourtant à l'affût habituellement du moindre mouvement de leur président. Selon l'agence de presse Reuters, Emmanuel Macron aurait expressément demandé au gouvernement algérien d'adopter une position claire et tranchée sur le dossier, quitte à froisser son interlocuteur. Alors Macron et l'Algérie : « Je t'aime, moi non plus ? »

 

 

Pour mémoire

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commentaires (7)

c'est l'Algérie qui a besoin de la France, ce n'est pas le contraire

Talaat Dominique

19 h 18, le 26 mai 2017

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Commentaires (7)

  • c'est l'Algérie qui a besoin de la France, ce n'est pas le contraire

    Talaat Dominique

    19 h 18, le 26 mai 2017

  • Meme un candidat a la presidence de l Algerie n aurait pas tenu de tels propos si excessifs ....vraiment incomprehensible....je crois que la dictature du FLN depuis 1962 pillant les richesses de l Algerie et exportant avec cynisme les misereux citoyens algeriens vers la FRANCE n a rien a envier a un etat colonisateur....

    HABIBI FRANCAIS

    10 h 27, le 26 mai 2017

  • Depuis ses propos sur la colonisation lors de son déplacement à Alger en février dernier, le nouveau président français a suscité un vif engouement et beaucoup d'espoir du côté de l'électorat algérien. À juste titre ? MACRON DE ROTSHCHILD A ETEE ELUE PAR LES VOIX DES FILS D"IMMIGREES MAGHREBINS NORMAL QU'IL CONTINUE A MARCHER POUR L'ALGERIE S'IL VEUT ETRE REELU EN 2O22 CE QUE L'ARTICLE OUBLIE DE MENTIONNER C'EST QUE CE WALKER MARCHE AUSSI POUR LE SENEGAL ET AUSSI POUR TOMBOUCTOU ET POUR TOUS LES PAYS QUI EXPORTENT VERS LA FRANCE DE GENTILS IMMIGREES QUE CRITIQUENT LES MECHANTS XENOPHOBES DANS TOUS LES CAS ET COMME POUR LES ROIS DE FRANCE QUI MARCHAIENT VERS LA GUILLOTINE APRES EUX LE.....DELUGE

    Henrik Yowakim

    18 h 12, le 25 mai 2017

  • Après le général de Gaulle, il n'y a plus d'hommes d'Etat en France ! Je n'ai rien à ajouter.

    Un Libanais

    18 h 03, le 25 mai 2017

  • LA -MACHINERIE- EST EN MARCHE !

    MON CLAIR MOT A GEAGEA CENSURE

    10 h 44, le 25 mai 2017

  • Macron avec talent , pratique la démagogie socialiste ..., ce qui est inattendu et remarquable... ,c'est qu' il a osé se faire passer pour un "droito/socialo/libéral " , alors que quelque part ,derrière cette posture improbable ...il y a une manipulation dogmatique....

    M.V.

    09 h 05, le 25 mai 2017

  • Accuser son propre pays, la France, de crime contre l'humanité relèverait d'un "souci d'histoire et de vérité? A qui peut-on le faire croire?

    Yves Prevost

    01 h 12, le 25 mai 2017

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