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Moyen Orient et Monde - Éclairage

Ce que les rebelles syriens attendent désormais d’« Abou Ivanka el-Ameriki »

Après les effusions de joie, les antirégime craignent que l'intervention américaine contre le régime ne soit qu'un « one shot ».

Des mèmes créés par des Syriens ont circulé hier sur les réseaux sociaux. Facebook Moustafa Jacoub

« Nous sommes tous très heureux ! J'ai réveillé mes parents en pleine nuit pour leur raconter ce qui s'était passé », confie à L'Orient-Le Jour Abou Jamal, un Alépin habitant aujourd'hui dans la province d'Idleb, sous contrôle rebelle. L'annonce de frappes américaines menées hier à l'aube contre la base aérienne d'al-Chaayrate, connue comme un lieu de stockage d'armes chimiques avant 2013, selon le Pentagone, s'est répandue comme une traînée de poudre, déclenchant aussitôt un flot de réactions euphoriques au sein de l'opposition. Trois jours après l'attaque chimique sur Khan Cheikhoun, dans la province d'Idleb, imputée à Damas et ayant fait plus de 86 morts civils, dont 27 enfants, et les images de victimes agonisantes qui avaient choqué l'opinion, l'administration de Donald Trump a voulu marquer un grand coup.

« Je me suis dit : Ça y est, le régime va enfin sauter », raconte Ala' el-Youssef, un habitant de Khan Cheikhoun, lourdement éprouvé par la mort de 19 membres de sa famille, mardi. Donald Trump, que les Syriens antirégime surnomment désormais « Abou Ivanka el-Ameriki », est ainsi remonté dans les bonnes grâces d'une partie de la population, épuisée par six années de guerre. « On a enfin de l'espoir, et on se dit qu'il est possible que quelqu'un se range à nos côtés. Autour de moi, les gens disaient : "Wa akhiran !" (Enfin !) », poursuit Abou Jamal. Les photomontages de Donald Trump en héros, affublé de « Nous t'aimons », ont rapidement fleuri sur la Toile. Mais, une fois l'euphorie retombée, les interrogations sur l'avenir ont repris le dessus. « Cette intervention est un bon message pour nous de la part de la nouvelle administration américaine, comparée à l'inaction de l'ancienne. Mais ce n'est pas suffisant », estime pour sa part Ahmad el-Ahmad, un autre déplacé d'Alep.

 

(Lire aussi : Ce qu'il faut comprendre de l'attaque US contre la base syrienne)

 

 

Démonstration de force
Les craintes que d'autres attaques soient perpétrées par le régime en toute impunité sont loin de se dissiper. « Je pense qu'il s'agit d'un "one shot", en guise de punition pour l'attaque chimique sur Khan Cheikhoun, mais ça ne remet pas en question tous les autres massacres du régime », résume un activiste de l'opposition, réfugié à Gaziantep, en Turquie. Rien ne semble indiquer, pour l'instant, que les États-Unis aient l'intention de mener d'autres frappes contre le régime, écartant le risque d'une escalade avec Moscou, l'allié de Damas. « La frappe est intervenue comme une démonstration de force et non comme une volonté de venger le peuple syrien du tyran Bachar (el-Assad) », estime Fahim Issa, leader de la brigade Sultan Mourad, soutenue par Ankara. Pour l'opposition rebelle, l'expédition punitive américaine ne fait pas oublier son inaction tout au long du conflit. « Si l'administration américaine voulait réellement tuer Assad ou du moins l'écarter du pouvoir, elle l'aurait fait depuis des années et ça ne lui aurait rien coûté », considère Abou Mohammad el-Baradaoui, un activiste originaire de Wadi Barada, reprise par les forces du régime fin janvier. Prise de court par ce coup de force américain, dont elle se croyait jusque-là à l'abri, la présidence syrienne a qualifié l'attaque d'« acte idiot et irresponsable ». Damas est désormais prévenu. En cas de nouvelle utilisation d'armes chimiques contre sa population, il s'exposerait à des représailles militaires américaines. Un renversement du rapport de force sur le terrain est cependant peu envisageable. Le violent carton rouge attribué au régime ne l'empêchera pas de commettre d'autres massacres par le biais d'armes plus « traditionnelles ». « C'est comme si la communauté internationale voulait nous dire : vous continuerez à mourir dans des bombardements, sous les barils d'explosifs, sur les mines, par les roquettes et ainsi de suite, mais nous ne vous laisserons pas mourir gazés », poursuit Ala' el-Youssef.

 

(Lire aussi : Donald Trump s’installe aux antipodes de Barack Obama)

 

Coup médiatique
Ces frappes inédites ont certes piégé Bachar el-Assad, mais elles n'auront pas d'effet dissuasif. Le président syrien a réitéré ses ambitions, dans une interview accordée, probablement avant le massacre de Khan Cheikhoun, au quotidien conservateur croate Vecernji List (Journal du soir) et publiée jeudi. Il y déclare n'avoir « pas d'autre choix que la victoire ». « Si nous ne remportons pas cette guerre, cela voudra dire que la Syrie sera rayée de la carte », a-t-il ajouté. Deux avions militaires ont d'ailleurs décollé de la base aérienne syrienne frappée hier par les États-Unis et ont mené des raids près de Palmyre, a indiqué l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).Seule une réponse ferme et constante de la part des États-Unis au régime syrien, mais également à Moscou et Téhéran, pourrait remettre sur les rails le processus de négociation de paix. La réponse ne consistera pas en une « multiplication des frappes, mais en un engagement politique plus fort et un alignement sur la politique européenne dans le conflit syrien », estime une source diplomatique européenne. Pour l'opposition armée, il est urgent que « les Américains soutiennent l'Armée syrienne libre et l'opposition modérée, pour parvenir à une transition politique sans Bachar el-Assad », résume Mohammad Adib, membre du bureau politique du Front du Levant, groupe affilié à l'ASL.Après l'effervescence et la liesse, certains redoutent que ces frappes américaines cachent un coup médiatique. « Khan Cheikhoun n'est pas la première ville à être visée chimiquement, Omran n'est pas le seul enfant à avoir été pris pour cible à Alep et Aylan n'est pas le seul enfant à s'être noyé en mer... » conclut Ameer Alhalbi, un photographe indépendant réfugié en Turquie.

 

 

 

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commentaires (10)

D'accord mais tout ceci n'explique pas les bombardements au gaz du régime pardi :)

Bery tus

19 h 04, le 08 avril 2017

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Commentaires (10)

  • D'accord mais tout ceci n'explique pas les bombardements au gaz du régime pardi :)

    Bery tus

    19 h 04, le 08 avril 2017

  • L'absence des S300 et s400 et le fait que trump-pete ait averti les russes ET LA SYRIE DU HÉROS BASHAR, 2H30 MN AVT LES FRAPPES SONT la preuve flagrante que ces tirs n'étaient que du feu d'artifice pour ebahir les bébés spectacle . Cela va donner à Trump péte un regain de popularité pour pouvoir négocier avec le puissant POUTINE.

    FRIK-A-FRAK

    18 h 02, le 08 avril 2017

  • donc on finis par avouer que c'est un virus alors !! lol

    Bery tus

    15 h 23, le 08 avril 2017

  • Pour être sûr d'être publié je dirai à minima que si on avait voulu faire partir le héros Bashar El Assad on aurait procédé comme pour saddam ou kaddafi. Ce qui me fera répondre à ce pauvre syrien qui s'extasie que voyant l'exemple de ce que sont devenus l'Irak et la Lybie est il toujours content de cette frappe qui ne fera pas un printemps. Si Bashar le héros devait partir de cette façon ou d'une autre il en viendrait un autre encore plus virulent. LE MONDE A VRAIMENT CHANGÉ. J'ESPÈRE NE PAS AVOIR TROP PARLÉ POUR MÉRITER D'ÊTRE PUBLIÉ. MERCI.

    FRIK-A-FRAK

    12 h 57, le 08 avril 2017

  • Ivanka est le feminin d'Ivan . Ivan est l'imbecile du village .Wait and see pour voire ce que cet Abou imbecile va faire. Pauvre racaille democratique .............

    aliosha

    11 h 46, le 08 avril 2017

  • Il faut craindre que du côté des USA il ne s'agisse que d'une gigffle donnée à l'élève le plus turbulent de la classe syrienne Gifle gagnant gagnant pout Mr Trump, qui remonte dans l'opinion publique aux USA Gigffle qui montre sur le Chef des Armées à encore le bras long et fort Geste aussi qui dit "n'oubliez pas que je suis de la partie, même si j'ai limité mes mises par le pass" Geste enfin qui essaie d'abaisse Obama qui dans des circonstances similaires n'a pas osé intervenir Syriens, ne vous leurrez pas, l'issue du conflit n'est pas encore en vue...Abou Ivanka El amriki ne va pas envoyer ses boys dans le bourbier comme ses prédécesseurs au Vietnam, en Afganistan ou en Irak...Bon Dealer, Trump ne va investir que dans des coups sans risques...America First...toujours

    Chammas frederico

    10 h 32, le 08 avril 2017

  • “Il y a deux sortes de temps : y a le temps qui attend et le temps qui espère.” de Jacques Brel Extrait de L'Ostendaise

    FAKHOURI

    09 h 21, le 08 avril 2017

  • IL FAUT BIEN LIRE L,EDITORIAL DE MONSIEUR ISSA GORAIEB ! SPLENDIDE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 08, le 08 avril 2017

  • CE N,ETAIT QUE LE COMMENCEMENT ! LES E.U. SONT DE RETOUR DANS TOUS LES DOSSIERS DU M.O. LE SYRIEN PAR EXCELLENCE... ON DEVRA COMPTER AVEC EUX DESLORS... ILS SONT ENTRES DANS LA DANSE... LES PROVOCATEURS PAYS PSEUDOS MOUMANA3ISTES VONT EN SOUFFRIR. TRUMP A RESPECTE LES PREVISIONS JANVIER/AVRIL... RIEN NE SE FERA SANS LA PARTICIPATION ET LE VOULOIR DES E.U. D,AUTRES FRAPPES SONT SUR LA TABLE ET POUTINE DOIT EN PRENDRE COMPTE ET SAVOIR QUE RIEN NE PEUT SE DECIDER SANS L,AVAL OU LA DECISION PLUTOT DU MASTODONTE ! OU ETAIENT LES S300 ET LES S400 ? HAHAHA !

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 33, le 08 avril 2017

  • Effusion de joie pour pas grand chose. Bachar el assad à testé Trump par une attaque chimique, Trump a envoyé des kbebes mihchi pour dire attention je ne suis pas Obama et je veux ma part du gâteau. A la fin ça va être ce qui se dessine tout doucement une solution russo-américaine déjà écrite si ça tombe. Il suffit de regarder de près les mouvements diplomatiques ces dernières semaines entre les Russes et l'Iran d'un côté et entre les Russes et la Turquie de l'autre. Et que Dieu garde le Liban.

    Alexandre Hage

    01 h 27, le 08 avril 2017

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