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Liban - Parlement

La proportionnelle, même partielle, conduirait à un report des législatives à juin 2018

Il n'est pas sûr que les projets et propositions de loi électorale soient inscrits à l'ordre du jour de la session extraordinaire ouverte jusqu'au 20 mars prochain.

Les députés prenant part hier à la rencontre hebdomadaire de Aïn el-Tiné. Photo Ani

Le bureau de la Chambre se réunit aujourd'hui à Aïn el-Tiné sous la présidence du chef du législatif, Nabih Berry, afin de mettre au point l'ordre du jour de la séance législative, laquelle doit se tenir incessamment après la signature la semaine dernière, par le président de la République, du décret d'ouverture d'une session extraordinaire du 9 janvier au 20 mars prochain. En vertu de la procédure en vigueur, le président de la Chambre soumet aux membres du bureau de la Chambre une liste exhaustive des projets et propositions de loi en suspens afin qu'ils décident des textes à intégrer à l'ordre du jour. Il n'était pas sûr hier si les dix-sept projets et propositions de loi électorale seraient retenus.

Alors qu'une source parlementaire a indiqué à L'Orient-Le Jour que le président de la Chambre prévoirait d'intégrer la loi électorale à l'ordre du jour, le vice-président de la Chambre, Farid Makary, a déclaré à l'agence d'informations al-Markaziya que « l'ordre du jour n'inclura pas les projets relatifs à la loi électorale ni le projet de réajustement de la grille des salaires, mais principalement le budget général, l'approbation du déblocage de crédits et l'amendement de la loi sur les loyers ».

Pour justifier la non-inclusion à l'ordre du jour d'une clause relative à la loi électorale, au moins deux considérations sont invoquées : d'une part, l'inutilité d'examiner (encore) dix-sept projets sans une entente préalable ne serait-ce que sur le mode de scrutin et, d'autre part, l'existence de concertations officieuses en cours entre différentes parties dans le but de dégager une entente en ce sens. Rien n'est encore clair concernant la teneur réelle de ces échanges, et encore moins leur sérieux (quand bien même le président de la Chambre y aurait fait allusion hier devant ses visiteurs) : ainsi, à titre d'exemple, il n'est pas encore clair si des parties pourraient se rallier à la proposition berryste portant sur un scrutin à deux niveaux (le premier au niveau du caza, selon la majoritaire, qui déterminerait les candidats au niveau du mohafazat, lesquels seraient élus sur base de la proportionnelle).

 

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D'aucuns font état d'une possible tendance du courant du Futur, des Forces libanaises et du Courant patriotique libre d'adhérer à cette proposition (en vertu d'accords antérieurs à l'élection de Michel Aoun qui ont pu comporter des concessions en faveur de la proportionnelle, comme le craignent des milieux de la Rencontre démocratique de Walid Joumblatt). Selon les députés qui se sont rendus à Aïn el-Tiné hier, de véritables efforts – rencontres, prises de contact et pourparlers – sont actuellement déployés afin de clore le dossier de la nouvelle loi électorale. Ils précisent que celle qui semble avoir le plus le vent en poupe est la proposition du président de la Chambre. Ils rapportent expressément que l'on s'éloigne de plus en plus de la proposition de loi mixte mise au point par le Parti socialiste progressiste (PSP), le courant du Futur et les Forces libanaises (68 députés élus selon la majoritaire, et 60 selon la proportionnelle). Le fait que le PSP se soit récemment prononcé contre toute loi incluant la proportionnelle – et non plus seulement contre la proportionnelle intégrale – a fortement réduit les chances de cette proposition de loi mixte, et laisse croire à un possible ralliement du courant du Futur et des FL en faveur de la proposition berryste.

Mais le tableau manque encore de consistance, rien de concret n'ayant émané de ces prétendues concertations. Le seul acte palpable est le positionnement clair de Walid Joumblatt contre la proportionnelle, sous toutes ses formes. La situation dégage l'impression d'un retour progressif, implicite, à la loi de 1960 : celle-ci profite à la majorité des parties, notamment au tandem CPL-FL, et ne nuit pas au tandem chiite (quand bien même la proportionnelle resterait pour lui la formule la plus avantageuse).

En tout état de cause, si les concertations aboutissent à une nouvelle loi, le gouvernement n'aurait d'autre choix que de reporter techniquement les législatives. L'alternative qui se présente serait en somme la suivante : « La tenue des législatives sur base de la loi de 1960, ou leur report à juin 2018 de manière à pouvoir mettre en œuvre la nouvelle loi », croit savoir une source parlementaire. C'est ce qu'a confirmé d'ailleurs M. Makary. « Si nous souhaitons tenir les législatives à la date prévue, nous ne pourrons le faire que sur base de la loi de 1960, celle-ci étant la seule loi en vigueur. En revanche, toute nouvelle loi, précisément celle incluant la proportionnelle, impliquerait un report technique des législatives », a-t-il dit.

 

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Berry inquiet du maintien de la 1960
Au cours de ses audiences traditionnelles du mercredi avec les parlementaires, le président de la Chambre a pris l'engagement d'accélérer le travail du Parlement et a promis d'appeler à une séance législative dans les prochains jours. Il a en revanche fait part de son inquiétude quant à la tenue d'élections parlementaires sur base de la loi de 1960.

Devant ses hôtes, M. Berry a souligné l'importance du chantier législatif « dynamique et accéléré » à venir, puisqu'il envisage de tenir des séances de législation mais aussi de contrôle du rendement des ministères afin de tenter de pallier la paralysie institutionnelle qui a prévalu durant près de deux ans. Selon nos informations, une séance législative pourrait effectivement se tenir avant la fin du mois courant.

Se prononçant par ailleurs sur la loi de 1960, Nabih Berry a fait part de son inquiétude de voir une nouvelle fois les législatives se tenir sous l'égide de cette loi obsolète. « Le temps presse et nous prend de court », a-t-il ainsi affirmé. « Je l'ai déjà dit à maintes reprises par le passé, il faut boucler et entériner une nouvelle loi le plus rapidement possible. Il s'agit là des attentes des Libanais et c'est aussi ce que j'ai promis aux différentes forces politiques », a indiqué M. Berry avant de se dire inquiet de la position de ceux qui se disent opposés en apparence à la loi de 1960 alors qu'ils sont en réalité « de tout cœur » avec cette loi.

 

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Joumblatt « ira jusqu'au bout »
Le député Antoine Saad, membre du Rassemblement démocratique, a d'ailleurs pointé du doigt le mutisme des parties politiques favorables à la loi de 1960, un mutisme que le député Walid Joumblatt a été le seul à rompre. « Le député Walid Joumblatt est le seul, parmi les forces politiques ayant intérêt au maintien de la loi de 1960, à avoir le courage de maintenir une ferme opposition à toute loi fondée intégralement ou partiellement sur la loi mixte », a déclaré M. Saad à la Voix du Liban (100.3-100.5). Il a laissé entendre que le courant du Futur et le tandem FL-CPL avaient tout autant intérêt au maintien de l'ancienne loi. « Si l'on considère que Walid Joumblatt mène une campagne existentielle (contre la proportionnelle, ndlr) il y en a d'autres, comme le courant du Futur, qui mènent une bataille similaire, sans compter le duo chrétien qui, lui, bataille pour s'imposer en bloc majoritaire au niveau de sa communauté », a déclaré le député.

Il n'a pas manqué de rappeler en outre que « Kamal Joumblatt a été le premier à avancer la formule de la proportionnelle, mais il l'avait fait sur la base d'un programme national de déconfessionnalisation du système ». « La proportionnelle ne saurait s'appliquer sous le règne des confessions, et encore moins sous le règne des armes. Ainsi, si des élections se tiennent sur la base d'une proportionnelle intégrale ou partielle, le dipôle chiite ne manquera pas de rafler les voix, notamment dans le Sud et la Békaa-Nord », a souligné le député. Et de conclure, sur un ton catégorique : « Le député Walid Joumblatt ira jusqu'au bout dans sa bataille pour la tenue des législatives sur base de la loi de 1960 (...) parce que tous, à l'exception du dipôle chiite, tiennent à cette loi. Le reste n'est que surenchères médiatiques. »

 

 

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