Le président syrien, Bachar el-Assad, a révélé que son homologue libanais, Michel Aoun, n'a pas encore été invité à Damas, arguant du fait que les Libanais sont occupés à former un nouveau gouvernement. M. Assad a également critiqué la politique de distanciation adoptée par le Liban à l'égard des conflits régionaux, estimant que le pays le "ne peut être tenu à l'écart du brasier qui l'entoure".
"Le président Aoun a-t-il été invité à Damas ?", a demandé le journal syrien proche du pouvoir, al-Watan, à M. Assad. "Non, pas encore", a répondu le président syrien, dans le cadre d'un entretien fleuve publié jeudi par le quotidien. "Ils (les Libanais) sont occupés à former un gouvernement", a-t-il expliqué.
Élu le 31 octobre à la tête de l’État libanais à la faveur d'un soutien inattendu des Forces libanaises de Samir Geagea et du Courant du Futur de Saad Hariri, le président Aoun est allié au Hezbollah depuis 2006, et avait effectué un revirement spectaculaire en faveur du régime Assad depuis cette date. Michel Aoun était un farouche opposant au régime syrien entre la fin des années 1980 et 2005.
Depuis qu'il a été désigné Premier ministre par M. Aoun, Saad Hariri n'a toujours pas réussi à former un gouvernement, notamment en raison des tiraillements autour de l'attribution des portefeuilles ministériels. Toutefois, un vent d'optimisme souffle ces derniers jours, laissant espérer la naissance du nouveau cabinet sous peu.
(Lire aussi : La formation du gouvernement à la lumière de la bataille d'Alep)
Une "non-politique"
Dans ce contexte, al-Watan a demandé à M. Assad si l'élection de Michel Aoun pouvait être considérée comme une victoire pour la Syrie et "l'axe de la résistance" (le Hezbollah, la Syrie et l'Iran, ndlr).
"Le fait que les Libanais aient pu élire un président est une victoire", a estimé le président Assad. "Avoir élu une personnalité consensuelle et patriote est également une victoire. Lorsque ce président œuvre pour le peuple libanais, le Liban en sortira plus fort. Et lorsque le Liban est plus fort, la Syrie est rassurée et renforcée", a fait valoir le le chef de l’État syrien. Et d'ajouter : "Lorsqu'on est en présence d'une personnalité comme le général Aoun, qui connaît l'ampleur du danger terroriste menaçant le Liban, cela est également une victoire pour le Liban et la Syrie, car le président Aoun sait que le Liban ne peut être tenu à l'écart du brasier qui l'entoure et adopter une non-politique, ou ce qu'on appelle la politique de distanciation".
Le conflit en Syrie divise profondément les Libanais entre partisans et opposants du président Assad, et exacerbe les tensions confessionnelles. La majorité des chiites emmenés par le Hezbollah sont favorables au régime, tandis que les sunnites, qui représentent la majorité de la population en Syrie, soutiennent la cause de l'opposition.
Dans son discours d'investiture, le président Aoun s'est engagé à sauvegarder la neutralité du Liban à l'égard des conflits internationaux et régionaux, notamment en Syrie voisine.
Réagissant aux propos de M. Assad, le chef des Forces libanaises (FL), Samir Geagea, a déclaré jeudi qu'il était dans l'intérêt du président syrien que le Liban continue d'appliquer sa politique de distanciation à l'égard des conflits régionaux. "Il est dans l'intérêt de M. Assad que le Liban continue d'appliquer sa politique de distanciation car si le Liban devait prendre position, il serait contre lui", a indiqué M. Geagea.
L'ancien président de la République Michel Sleiman a également dénoncé les propos de M. Assad. "Le jour où nous avons renié la déclaration de Baabda, nous nous sommes reniés nous-mêmes", a écrit M. Sleiman sur son compte Twitter, en allusion à la décision du Hezbollah de s'impliquer militairement en Syrie malgré son adhésion première à la déclaration de Baabda. Ce texte adopté par la conférence de dialogue national tenue en juin 2012 sous les auspices de Michel Sleiman en plein conflit syrien, rappelle, entre autres, la distanciation du Liban à l'égard des conflits régionaux et la nécessité d'élaborer une stratégie nationale de défense.
Lire l'intégralité de l'entretien ici
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commentaires (13)
Ce type ne sait pas encore pourquoi il existe encore...
CBG
01 h 12, le 10 décembre 2016