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Liban - Interview

Huth : Nous voudrions un Liban qui mette en œuvre la déclaration de Baabda et préserve sa diversité

Pour l'ambassadeur d'Allemagne, la fin de la vacance présidentielle est la clé du redressement dans le pays.

Martin Huth, devant une image d’une manifestation antimondialisation prise en Allemagne.

La crise institutionnelle libanaise, le dossier des réfugiés syriens, l'aide allemande au Liban et la montée de l'extrême droite dans divers Länder figurent parmi les thèmes d'une interview accordée par l'ambassadeur d'Allemagne, Martin Huth, à L'Orient-Le Jour. « Avec l'impasse politique à tous les niveaux et la vacance présidentielle, la situation se dégrade de jour en jour. Je ne vois certainement pas le Liban au bord d'un abîme, mais chaque jour il est à un endroit plus bas de la pente. Il est donc essentiel d'avoir un leadership responsable pour surmonter la crise », souligne notamment l'ambassadeur allemand.

À votre avis, pourquoi le Liban a-t-il gardé jusqu'à présent une certaine stabilité alors que la région est en pleine ébullition et que le pays est quasi paralysé sur le plan institutionnel ?
J'attribue cette stabilité à un certain nombre de facteurs: la politique de dissociation de l'État libanais à l'égard du dossier régional (à laquelle une seule partie libanaise n'adhère pas), le fonctionnement relativement normal des organismes de sécurité et l'extraordinaire résilience du peuple libanais. Il faudra ajouter à cela l'intérêt de la communauté internationale et des puissances régionales à préserver le Liban et sa stabilité. Je pense aussi que les Libanais aspirent à un véritable désir de normalité, et ils tentent de vivre cette normalité autant qu'ils le peuvent. Nous ne pouvons pas négliger cependant la profonde frustration créée par l'énorme fossé entre les aspirations et la réalité – surtout quand on pense à la crise des ordures, aux coupures de courant électrique et à l'absence d'autres services. La corruption et le manque d'orientation vers le bien commun constituent des problèmes supplémentaires. Avec l'impasse politique à tous les niveaux et la vacance présidentielle, la situation se dégrade de jour en jour. Je ne vois certainement pas le Liban au bord d'un abîme, mais chaque jour il est à un endroit plus bas de la pente. Il est donc essentiel d'avoir un leadership responsable pour surmonter la crise.

À l'instar de tous les représentants des chancelleries occidentales, vous invitez les Libanais à élire un président et à redynamiser les institutions. Y a-t-il une solution que vous leur proposez ?
Personne ne doit ou ne peut imposer une solution venue de l'extérieur aux Libanais. C'est peut-être l'antagonisme entre l'Iran et l'Arabie saoudite qui aide réellement les Libanais à réaliser que la seule façon d'avancer est de se réunir et de décider par eux-mêmes comment sortir de l'impasse actuelle. En fait, c'est la partie principale de notre message. La deuxième partie de ce message est de ne pas attendre l'issue des guerres dans la région, notamment en Syrie et au Yémen, parce qu'elles pourraient durer encore longtemps et leur issue pourrait même ne pas être favorable à un règlement de la crise libanaise. Je suis aussi conscient de la complexité de la situation et de l'implication traditionnelle des forces étrangères, en particulier régionales, dans la politique libanaise. Mais cela ne signifie pas qu'en cas d'accord entre les Libanais, la communauté internationale ne viendra pas soutenir un tel accord. Nous suivons actuellement avec grand intérêt les efforts entrepris pour sortir de l'impasse. À mon avis, tout commence en réglant la question présidentielle. D'autres questions importantes comme l'élaboration d'une nouvelle loi électorale et la formation du gouvernement devraient suivre.

En ce qui concerne l'Allemagne, nous voudrions voir un Liban stable et prospère, un pays où les institutions sont au service des citoyens. Un Liban qui suit et met en œuvre la déclaration de Baabda de 2012, y compris la politique de dissociation vis-à-vis du conflit en Syrie, un Liban qui préserve et protège sa diversité communautaire, sur les plans politique et social, et qui maintient de bonnes relations avec tous les pays de la région. Un pays qui, malgré les difficultés que cela implique, continue avec le soutien des Nations unies et de la communauté internationale à aider les réfugiés syriens présents sur son territoire, conformément au droit humanitaire international et aux droits de l'homme.

Le chef du bloc du Futur a annoncé jeudi qu'il soutient la candidature du général Michel Aoun à la présidence. Qu'en pensez-vous ?
Sans aucun doute, c'est un développement important pour sortir de l'impasse. Nous devons attendre et voir si cela conduira à l'élection rapide d'un président et à la formation d'un gouvernement qui fonctionne véritablement. Si cela se produit et si les attentes citées ci-dessus peuvent être comblées, nous serons les premiers à féliciter le Liban et les Libanais.

Quel est le volume de l'aide allemande au Liban et quels sont les domaines dans lesquels votre pays est le plus présent en matière d'aide aux réfugiés et aux communautés hôtes ?
Le volume de l'aide allemande a été de 330 millions de dollars américains cette année. La somme a doublé par rapport à l'année dernière. L'aide, qui passe par les institutions onusiennes, va à la scolarisation, au logement, à l'eau, tant pour les réfugiés syriens que pour les communautés hôtes. En ce qui concerne notre coopération avec les institutions libanaises, nous bénéficions d'une relation de travail étroite et positive, en particulier avec les ministères de l'Éducation et des Affaires sociales.

Comment peut-on rassurer les Libanais sur le fait que les réfugiés syriens partiront ?
On a répété à maintes reprises que lorsque le temps permettra un retour en toute sécurité des réfugiés syrien dans leur pays, ils rentreront chez eux. Qu'est-ce qui inciterait des personnes à vouloir vivre indéfiniment au Liban ?
Quelle est l'incitation pour les gens qui veulent rester indéfiniment au Liban ? Tout le monde est conscient du lourd fardeau que le Liban porte en accueillant les réfugiés. Et nous continuerons à soutenir le Liban, les réfugiés et les communautés hôtes. Nous voulons tous que le conflit soit résolu en Syrie et le retour des réfugiés syriens qui participeront à la reconstruction de leur pays. Il est important aussi que le discours politique entourant la situation des réfugiés ne dégénère pas. Le Liban et la communauté internationale doivent rester unis concernant ce dossier.

Un peu plus d'un an après l'adoption de la politique de la porte ouverte, comment évaluez-vous la situation actuelle en Allemagne ? Comment expliquez-vous la montée de l'extrême droite dans votre pays?
L'Allemagne ne suit pas une politique de portes ouvertes. En septembre 2015, nous avons réagi à l'urgence humanitaire à nos portes, et nous avons par la suite planché pour atténuer le flux des réfugiés, notamment par le biais d'un accord entre l'Union européenne et la Turquie. L'afflux sans précédent de réfugiés en Allemagne, notamment depuis l'automne dernier, a amené avec lui des défis politiques, sociaux et économiques considérables. C'est également un dossier chargé d'émotion qui crée différentes attitudes au sein de la population. Cette situation a engendré des réactions aussi bien positives que négatives. En conséquence, l'Allemagne enregistre actuellement une hausse de la popularité des partis politiques de droite. Ces partis, populistes par nature, jouent sur des craintes vagues et se limitent à être « contre » la présence des réfugiés tout en ne proposant aucune alternative viable à la politique du gouvernement. Ainsi, même si ces partis semblent en hausse à l'heure actuelle, je ne pense pas que ce phénomène soit à long terme. Les populistes sont rarement des hommes politiques responsables.

Après les deux attentats de juin dernier et la tentative d'attentat la semaine dernière, qui avaient pour auteurs des réfugiés se revendiquant de l'État islamique, et après les agressions de la Saint-Sylvestre à Cologne, comment votre pays compte-t-il faire accepter à une partie de sa population de nouveaux venus qui, parfois, posent problème ?
J'ai dit à d'autres occasions qu'il est impossible d'accepter un amalgame entre des réfugiés, d'une part, et des terroristes ou des criminels, d'autre part. Je rejette toute catégorisation implicite à cet égard. De toute évidence, aucun d'entre nous – au Liban et en Allemagne – n'avait hâte de recevoir un afflux aussi massif de réfugiés. La question est celle de l'intégration et de l'acceptation, et non pas de la stigmatisation et de l'exclusion. Nous sommes tous interpellés à cet égard, et cela inclut d'autres pays européens qui, à notre avis, devraient contribuer plus activement au partage de la tâche.
L'intégration et l'acceptation ne doivent pas être à sens unique. Il revient aux deux parties – les hôtes et les réfugiés – de faire des efforts. Il faut s'assurer que les réfugiés acceptent notre style de vie, la diversité, certaines normes culturelles et légales, et les Allemands devraient, de leur côté, se faire à l'idée que ces réfugiés sont là, qu'ils ont un background difficile et dans la mesure où ils font des efforts, ils doivent être acceptés.
À titre d'exemple, au plan personnel, je peux vous dire que mes parents, qui habitent au sud de l'Allemagne, près de la frontière suisse, s'occupent d'une famille de réfugiés afghans dont les enfants, en dépit de leur milieu modeste, excellent à l'école. Dans cette perspective, je compte voir de nombreuses success stories résultant de l'intégration des jeunes réfugiés dans notre société.
La crise syrienne nous a enseigné que si quelque chose se passe au Moyen-Orient, les pays européens qui sont les voisins les plus proches de cette région seront affectés immédiatement.

Comment voyez-vous la fin du conflit en Syrie ?
Je parle à titre personnel. En ce qui concerne la Syrie, je ne peux que spéculer et donner un avis personnel. Je dirais que la situation est extrêmement complexe, tout le monde à Genève tente de faire un effort. Mais il y une importante différence entre les discussions à Genève et ce qui se passe sur le terrain en Syrie. Si je prends en considération l'annonce russe de transformer Tartous en une base militaire permanente, cela me confirme encore plus que le rôle de Moscou est très important et qu'il y a une forte possibilité de voir la Syrie ou une partie de la Syrie transformée en une sorte de protectorat russe.

 

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LA DECLARATION DE BAABDA QUE AOUN DEVRAIT DECLARER RESPECTER AVEC SON CHANGEMENT DE BOUSSOLE ET DE VOCABULAIRE... ET LE RESPECT DE LA CONSTITUTION AVEC POINT DE MILICE ET DE TRIPTIQUE ... - HARIRI ET GEAGEA... LES AVEZ-VOUS SECURISES AVANT DE VOUS EMBARQUER PEUT-ETRE AVEC CHARON EN SA BARQUE SUR LE HADES ?

LA LIBRE EXPRESSION

11 h 15, le 23 octobre 2016

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Commentaires (2)

  • LA DECLARATION DE BAABDA QUE AOUN DEVRAIT DECLARER RESPECTER AVEC SON CHANGEMENT DE BOUSSOLE ET DE VOCABULAIRE... ET LE RESPECT DE LA CONSTITUTION AVEC POINT DE MILICE ET DE TRIPTIQUE ... - HARIRI ET GEAGEA... LES AVEZ-VOUS SECURISES AVANT DE VOUS EMBARQUER PEUT-ETRE AVEC CHARON EN SA BARQUE SUR LE HADES ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 15, le 23 octobre 2016

  • Pour l'ambassadeur d'Allemagne, la fin de la vacance présidentielle est la clé du redressement dans le pays LA CLEF DU REDRESSEMENT DU PAYS C'EST LE DESARMEMENT DE LA MILICE TERRORISTE DU DIABLE QUI TIENT LE PAYS EN OTAGE LE PARALYSE ET LE SAIGNE A BLANC LA VACANCE PRESIDENTIELLE EST LE RESULTAT DE LA SITUATION CATASTROPHIQUE DU PAYS PLUTOT QUE SA CAUSE COMME LE PENSENT LES POLITIQUEMENT CORRECTS BIEN PLUS ELIRE LE MERCENAIRE DU PARTI DU DIABLE A LA PRESIDENCE DE LA REPUBLIQUE LOIN DE REDRESSER LE PAYS LE MENERA VERS LA DELIQUESCENCE FINALE ET TOTALE PLUTOT QUE DE PONDRE DES CLICHES QUE L'EUROPE AIDE LE LIBAN A DOTER DU SYSTEME FEDERAL SEUL CAPABLE DE REDRESSER LE PAYS

    Henrik Yowakim

    21 h 55, le 22 octobre 2016

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