Tripoli, capitale du Liban-Nord, sera en fête ce 26 avril à l’occasion de la journée de commémoration du 26 avril 1289, date anniversaire de la défaite des Francs, croisés chrétiens européens, par les Mamelouks, y réinstaurant le contrôle musulman. Pour l’occasion, le maire de la ville, Riad Yimak, a publié jeudi un communiqué annonçant la fermeture de tous les services et départements municipaux.
« La libération d’al-Faihaa (union des quatre municipalités de l’époque : Tripoli, Mina, Beddaoui et Qalamoun, NDLR) a été l’occasion d’établir la nouvelle Tripoli, qui était considérée comme l’une des villes les plus importantes non seulement dans ses environs, mais aussi sur la côte méditerranéenne », a écrit M. Yimak.
Entre les XIe et XIIIe siècles se sont déroulées les croisades, des campagnes militaires lancées par les chrétiens européens pour reprendre le contrôle de la Terre sainte. Les Mamelouks, parmi d’autres dynasties musulmanes, ont ensuite combattu l’occupation des croisés.
Enfants enlevés sur les terres turques, éduqués dans l’islam et arabisés, les Mamelouks constituèrent les cadres de l’armée de Saladin, fondateur de la dynastie des Ayyoubides. Ils prirent le pouvoir en 1250 et régnèrent sur l’Égypte jusqu’en 1517. Les Mamelouks étaient des esclaves (en arabe, mamlûk signifie « possédé »).
« Tripoli, avec toutes ses communautés musulmanes et chrétiennes, vit à l’ombre de la coexistence, et j’invite tout le monde à participer aux activités », indique le communiqué. La municipalité a prévu divers événements, tels que des marches, des séminaires, des conférences et des expositions. Le château de Tripoli ouvrira gratuitement ses portes de vendredi à dimanche, les activités étant coordonnées en collaboration avec le Club des antiquités de Tripoli.
Tripoli, une ville convoitée
Pour mieux comprendre l’importance de cette journée, il faudrait se replonger au XIe siècle, lorsque Tripoli connaît son apogée sous la gouvernance de la famille Banu Ammar. Elle prospère grâce à son port, connu sous le nom de «port de Damas», stratégiquement placé sur les routes commerciales, jusqu’à faire de la ville un centre intellectuel et économique majeur, attirant des érudits du monde entier.
Cette prospérité ne passe pas inaperçue et suscite l’intérêt des Francs. Prise par les croisés en 1109, sous l’égide de Raymond IV et Bertrand de Toulouse, elle renforce leur présence dans la région et consolide leur contrôle sur les territoires côtiers du Levant. Le comté de Tripoli devient alors l’un des principaux États latins d’Orient, mettant ainsi fin à la mainmise musulmane sur la région.
Tripoli prospère également sous la domination des croisés, notamment dans le domaine commercial, mais aussi avec la construction de monuments tels que la citadelle de Raymond de Saint-Gilles, ou son château, que l’on visite toujours à ce jour. Cela malgré la persistance des conflits entre les Francs et les dynasties musulmanes locales.
La conquête et l’influence Mameloukes
Après plus de 150 ans de domination par les croisés, Tripoli est finalement prise par les Mamelouks, sous le commandement du sultan Nasir Yusuf, le 26 avril 1289, après un siège de 34 jours. Cet événement marque le début de la fin des États latins d’Orient, la chute de Saint-Jean-d’Acre suivant peu après, en 1291, qui clôturera la période des croisades médiévales.
Issus de soldats musulmans esclaves, les Mamelouks ont évolué en une caste militaire dominante, initialement pour faire face à la menace des descendants de l’empereur mongol Gengis Khan, puis pour reprendre la région du Croissant fertile aux Francs. Bien qu’ils aient été basés en Égypte, leur influence s’est étendue dans toute cette région, laissant une marque culturelle distinctive.
Après avoir occupé Tripoli, les Mamelouks ont massacré la population et détruit la ville. Sous le règne du sultan Qalaoun, elle a été reconstruite sur ses ruines, devenant celle que nous connaissons aujourd’hui. Les Mamelouks ont ajouté des lieux de culte comme la mosquée Taynal, des infrastructures publiques comme les souks, des palais, des écoles et des hammams, revitalisant ainsi la ville avec leur art distinctif.
Tripoli est devenue le deuxième site architectural mamelouk en taille après Le Caire. Sous leur domination de 180 ans, la ville a poursuivi son développement, devenant un point de convergence vital reliant la Méditerranée à l’intérieur syrien.
commentaires (10)
En lisant le titre, j'avais - bien naïvement, je dois le reconnaître - cru que l'on célébrait l'annibersire du 26 avril 2015, jour de la libération du Liban des troupes d'occupation syriennes. Il est vrai que les supplétifs iraniens les ont aussitôt remplacées !
Yves Prevost
17 h 21, le 26 avril 2024