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Politique - Éclairage

Le tandem Berry-Bassil, une machine de guerre qui fait les affaires de Nasrallah

L'échange de bons procédés semble avoir calmé les tensions entre ces deux rivaux qui ont un allié en commun : le Hezbollah. 

Le tandem Berry-Bassil, une machine de guerre qui fait les affaires de Nasrallah

Le président du Parlement, Nabih Berry, et le chef du CPL, Gebran Bassil, lors du dialogue national à Beyrouth, en 2006. Photo Dalati et Nohra.

« Une victoire qui pourrait avoir des répercussions futures. » Gebran Bassil n'est pas dupe. Il sait très bien qu'il doit la victoire de Fadi Hanna, le candidat du Courant patriotique libre pour la présidence de l'ordre des Ingénieurs, à l'alliance qu'il a scellée avec son rival de toujours, le président du Parlement, Nabih Berry. Une entente qui a permis au CPL, en chute libre depuis 2019, de marquer une rare victoire électorale, son candidat ayant réussi à rafler 47 % des voix en grande partie grâce aux électeurs chiites du tandem Amal-Hezbollah. À tel point que, lors d'une allocution mardi, le leader chrétien a tendu la main à son meilleur ennemi, l'invitant à collaborer sur d'autres dossiers. Après tout, on ne change pas une équipe qui gagne.

Les deux hommes ont repris contact il y a plusieurs semaines, le député aouniste Ghassan Atallah assurant la liaison en se rendant régulièrement à Aïn el-Tiné. Et Nabih Berry n'en est pas mécontent. Il a besoin de la couverture chrétienne que seul un des deux grands blocs de la communauté (les Forces libanaises de Samir Geagea ou le CPL) peut lui donner dans plusieurs dossiers : à court terme, les municipales, que le tandem chiite souhaite ajourner sous le prétexte de la guerre au Liban-Sud, mais, surtout, la tenue d'un dialogue national, condition sine qua non du maître du perchoir pour débloquer la présidentielle. Le tout pour le plus grand bonheur du Hezbollah, non seulement parce que ses deux alliés mettent enfin de côté leurs différends, mais aussi parce que ça lui permet de contenir Gebran Bassil, à l'heure où l'entente de Mar Mikhaël est de plus en plus fragilisée. Ce rapprochement peut également réduire la tension croissante entre chiites et chrétiens, d'autant plus après l'affaire de Pascal Sleiman, responsable des FL à Jbeil, dont le meurtre a radicalisé la rue chrétienne contre le camp du 8 Mars, mais surtout autour de Samir Geagea (au grand dam de Bassil).

« Halate assurément »
« Personne n'a intérêt à aller vers la discorde civile, comme certains au Liban le souhaitent », affirme à L'OLJ Ghassan Atallah, en allusion aux FL. « Depuis le début de la guerre à Gaza, et bien avant l'affaire Pascal Sleiman, le pays est dans une position fragile, ajoute-t-il. Dès lors, notre parti a fait le choix d'ouvrir les canaux de dialogue pour calmer les tensions. Il est donc normal qu'on se tourne vers nos adversaires d'abord, et c'est pour cela que nous avons décidé de tendre la main à Nabih Berry. » Même son de cloche du côté de Aïn el-Tiné. « M. Berry tient à la cohésion nationale, et sa porte est ouverte à tous ceux qui veulent le dialogue, affirme un proche du chef du législatif. C'est le seul moyen d'empêcher une nouvelle guerre civile comme certains semblent le souhaiter. » Encore une pique à Samir Geagea.

Pour mémoire

Entre Berry et le CPL, un peu plus que la présidentielle

D'ailleurs, mardi, le président du Parlement s'en est pris au chef des FL. « Le problème, c'est sa rhétorique sur le fédéralisme, a-t-il martelé. Il nous ramène à l'époque de “Halat assurément”. » Dans les années 80, en pleine guerre civile, les FL employaient ce slogan pour réclamer la construction d'un aéroport séparé à Halate pour desservir les régions chrétiennes, une revendication qui leur valait des accusations de séparatisme par le camp adverse. « Il faut que Samir Geagea comprenne qu'il n'y aura pas de municipales sans le Liban-Sud, a ajouté M. Berry. Personne ne pourra séparer cette région du reste du pays. »

À l'approche du scrutin municipal, qui doit commencer le 19 mai selon la date fixée par le ministre de l'Intérieur, le tandem chiite souhaite faire voter une loi au Parlement pour proroger d'un an supplémentaire le mandat des conseils municipaux, arguant de l'impossibilité de tenir le scrutin au Liban-Sud du fait des affrontements en cours entre le Hezbollah et Israël. Une séance parlementaire est prévue à cet effet le 25 avril, mais elle ne pourra pas se tenir sans au moins un des deux grands blocs chrétiens. Or les FL, et avec elles le reste de l'opposition, insistent pour que le scrutin – déjà reporté à deux reprises pour manque de financement – se tienne à temps quitte à ajourner la consultation uniquement dans les villages à risque. Nabih Berry doit donc, à tout prix, convaincre le CPL de participer à la séance afin de réussir son coup.

« Si on s'accorde sur un candidat, pourquoi pas »
Et ce dernier semble se laisser convaincre. « Nous pensons que tenir le scrutin dans certaines régions et en exclure d'autres, ce n'est pas nécessairement une bonne idée. Imaginez que le jour du vote, Israël bombarde la Békaa », affirme M. Atallah. « En tout cas, nous avons dit à Nabih Berry que nous allons rencontrer le ministre de l'Intérieur pour jauger la préparation de son ministère avant de nous décider. » De leur côté, les FL rejettent cet argument. « Le ministre a répété à plusieurs reprises qu'il était prêt à tenir le scrutin et que le ministère étudiera le cas de chaque village, rappelle Charles Jabbour, porte-parole du parti. Malgré cela, le camp du 8 Mars fait des acrobaties pour ajourner le vote, car il a a peur du résultat des urnes. » Les municipales sont compliquées à gérer pour le tandem chiite. En effet, contrairement aux législatives, ils ne se présentent pas en tandem, ce qui crée parfois des tensions interchiites, inopportunes en cette période de guerre. Sans parler des dissidents, qui pourraient profiter du ras-le-bol dans certains villages chiites après six mois sous le feu israélien. Amal et le Hezbollah doivent également prendre en compte les réalités de chaque localité, y compris celles où il y a des tribus influentes. « Et heureusement pour eux, Gebran Bassil n'a pas de principe politique et ne répond qu'à la politique d'échange de bons procédés », regrette M. Jabbour.

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Le rapprochement entre Nabih Berry et Gebran Bassil ne se limite pas au dossier des municipales. Dans les échanges entre les deux hommes, il y a bien sûr l'incontournable crise présidentielle. Depuis le début de l'échéance, le CPL rejette la candidature de Sleiman Frangié, soutenu par le tandem chiite. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles ses relations avec le Hezbollah ne sont plus au beau fixe. « Il y a un désaccord autour d'un nom, reconnaît Ghassan Atallah. Nous n'avons pas évoqué les candidats pour le moment, mais nous sommes en train de nous accorder sur une formule de dialogue à laquelle nous pourrions participer. » Selon M. Atallah, les aounistes se sont entendus avec M. Berry pour que le dialogue soit d'une durée maximale d'une semaine, n'évoque que l'élection du prochain président et conduise assurément à un conclave et à une élection sans possibilité de défaut de quorum. « Quel que soit le résultat de cette séance ouverte, nous l'accepterons », affirme-t-il. Il s'agit donc d'une reprise presque à l'identique de la formule de dialogue présentée l'année dernière par M. Berry, qui avait pourtant été accueillie avec scepticisme par les formations chrétiennes, dont le CPL. « Le président du Parlement nous dit qu'il n'est pas contre, que ce soit son vice-président, Élias Bou Saab (proche des aounistes, NDLR), qui préside le dialogue », dit M. Atallah pour expliquer ce changement de position, quand bien même tout semblerait indiquer que le tandem chiite insiste pour que ce soit Nabih Berry lui-même qui joue ce rôle. 

Mais la symbiose entre les deux rivaux n'est pas complète pour autant. Mardi, le chef du CPL a lui aussi eu droit à des piques – quoique moins violentes – de Nabih Berry. En réponse à l’initiative de Gebran Bassil, qui appelle à conclure au Liban un cessez-le-feu indépendamment de Gaza, le président du Parlement a affirmé que « séparer Gaza du Liban-Sud, ça ne fonctionne pas ». « L’unité des fronts est en place, qu’ils le veuillent ou pas », a-t-il lancé, se faisant porte-parole du Hezbollah et de l'Iran. Gebran ne peut pas tout avoir non plus.

« Une victoire qui pourrait avoir des répercussions futures. » Gebran Bassil n'est pas dupe. Il sait très bien qu'il doit la victoire de Fadi Hanna, le candidat du Courant patriotique libre pour la présidence de l'ordre des Ingénieurs, à l'alliance qu'il a scellée avec son rival de toujours, le président du Parlement, Nabih Berry. Une entente qui a permis au CPL, en chute...

commentaires (5)

C’est une belle chute libre pour le CPL qui, aux dernières élections législatives, a réussi à former un bloc parlementaire de 18 députés dans petit comme le nôtre

Hitti arlette

16 h 50, le 18 avril 2024

Tous les commentaires

Commentaires (5)

  • C’est une belle chute libre pour le CPL qui, aux dernières élections législatives, a réussi à former un bloc parlementaire de 18 députés dans petit comme le nôtre

    Hitti arlette

    16 h 50, le 18 avril 2024

  • La politique est une affaire de voyous ...

    Zeidan

    14 h 01, le 18 avril 2024

  • ALLEZ, SOYEZ COURAGEUX, PUBLIEZ MA NOTE. ON NE ME CENSURE PAS MES FRANCHES EXPRESSIONS QUI SONT DANS LES REGLES SI LEGEREMENT.

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 44, le 18 avril 2024

  • Je n'ai lu que le titre et je trouve que le terme "plus bas que le ventre du caméléon" souvent utilisé par Michel Aoun s'applique parfaitement à son gendre et à son nouveau partenaire d'affaires. Ces deux là n'ont vraiment aucun amour propre ni grandeur d'âme.

    Le borgne

    10 h 17, le 18 avril 2024

  • Je n'ai meme pas lu cet article tant que je les trouve tous deux dégoûtants.

    hrychsted

    05 h 04, le 18 avril 2024

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