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Liban - Controverse

L’archéologue Albert Naccache catégorique : « Aucune cale antique sur le site des Venus Towers »

Deux commissions d’archéologues s’affrontent autour des découvertes mises au jour sur le site « Beirut 194 » (Venus Towers). La première nommée par l’ancien ministre de la Culture Salim Wardy atteste l’existence des vestiges de cales de bateaux datant de l’époque phénicienne alors que la deuxième, chargée par l’actuel ministre Gaby Layoun de procéder à une nouvelle étude, rejette catégoriquement ce rapport, soulevant ainsi une polémique sans précédent. « L’Orient-Le Jour » a recueilli l’avis d’Albert Naccache qui conteste la présence d’une installation portuaire antique.

Le dessin en coupe montre les pentes des tranchées en zigzag.

Membre de la commission consultative nommée par le ministre de la Culture, Gaby Layoun, l’archéologue Albert Naccache rapporte que les résultats des fouilles menées sur le bien-fonds 1 398 de Minet el-Hosn (ou site Beirut 194) par l’archéologue contractuel à la Direction générale des antiquités Hisham Sayegh ont révélé quatre niveaux, dont le plus vieux était une carrière de pierre qui, après son exploitation, a été remblayée.

 

« Quatre-vingt-dix-neuf pour cent des tessons retrouvés au sein de ce remblaiement correspondent aux Ier et IIe siècles de notre ère », a-t-il dit, ajoutant que le reste, c’est-à-dire un lot de très faible importance, remonterait au IVe ou IIIe siècle avant J.-C. Le second niveau a dévoilé « des tranchées en forme de U carré qui ont dû servir à quelques constructions mais que l’archéologue Hisham Sayegh insiste à appeler des cales de halage ; mais elles ne le sont pas », souligne avec insistance M. Naccache. Selon lui, ces tranchées (l’une de 17,5 m de long et l’autre de 26,5 m) qui présentent des pentes en zigzag, au tracé particulièrement capricieux et compliqué, n’ont aucune chance d’être des rampes.

 

« On ne sait pas où était la côte exactement, cependant on connaît le niveau de la mer à cette époque puisqu’on a trouvé le quai phénicien de la période perse et qu’il était au même niveau que la mer d’aujourd’hui. Alors admettons que ce sont des rampes : si on prend le point le plus haut et le dernier point et on prolonge la ligne, l’une des tranchées a besoin de 125 m pour arriver au niveau de la mer et l’autre 105 m. Une raison encore pour qu’il soit absolument impensable que ces tranchées soient des rampes de hissage de bateau. »


Le spécialiste fait remarquer que la commission précédente a comparé ces deux tranchées à celles du port de Dor en Palestine occupée. « Mais les rampes (trente mètres) de Tell Dor employées pour construire les bateaux commerciaux sont situées à la limite de l’eau (à quatre mètres) et leur fond, plat et lisse, décline une pente de quatre degrés. Alors que celles du site de Beirut 194 sont à trois et quatre degrés, sans compter qu’elles sont en dents de scie et situées à 120 mètres de la mer. Voilà ce qu’on appelle un port imaginaire ! » affirme l’archéologue.


Il rappelle qu’en septembre 1995, un premier sondage à la rue Allenby avait conduit à la découverte du quai occidental du port antique et d’une borne d’amarrage (dite bite d’amarrage) étayant que « le port était ici et que le niveau de la mer à l’époque perse était le même que celui d’aujourd’hui. Il s’agissait alors d’étendre ce sondage et de déterminer l’articulation de ce quartier avec le port. Mais en attendant l’autorisation de la Direction générale des antiquités, des travaux d’aménagement inattendus effectués dans la rue Allenby ont fait disparaître tout le secteur du sondage ».

 

Mettant l’accent sur le vrai bassin portuaire qui devait être posé au bas des rues Allenby-Foch, et qu’à ce sujet, des études ont été publiées par différents archéologues, comme Josette Elaye, ou le chercheur au CNRS Nick Marriner (Géo-archéologie des ports Antiques du Liban), ou encore Christophe Morhange et Mountaha Saghié-Beydoun (Baal II, hors-série 2005), Albert Naccache ajoute toutefois qu’« on ne saura plus jamais exactement la localisation du port antique parce que tout a été détruit lors de la reconstruction des souks. Irrémédiablement ».


Le spécialiste fait observer d’autre part qu’en plaçant le site sur la liste de l’inventaire public, l’ancien ministre Salim Wardy s’était basé sur le rapport de la commission précédente et sur le témoignage de spécialistes étrangers dont Marguerite Yon, qui n’a jamais visité le site. En réponse à un courriel qu’il lui a adressé, Yon écrit : « Lorsque j’étais à Beyrouth en décembre dernier, j’ai rencontré à l’AUB des collègues français, qui m’ont dit avoir vu les restes d’un port antique (cales de navires), dont la date correspondait assez bien à celui que j’ai moi-même trouvé et fouillé à Larnaca (ancienne Kition de Chypre). Naturellement cette information m’a vivement intéressée, d’autant plus que, jusqu’à présent, on a peu de traces de port d’époque classique ou hellénistique sur la côte phénicienne pour comparer avec Kition (...). Mais je n’ai pas vu moi-même le site en question, puisque je n’ai passé que très peu de temps à Beyrouth. Je ne peux donc rien en dire de plus, mais j’ai considéré que la discussion était ouverte. En espérant que vous trouverez un arrangement satisfaisant avec les chercheurs, je vous prie de croire à mon meilleur et amical souvenir », conclut-elle.


Le site Beirut 194 ou le bien-fonds 1 398 de Minet el-Hosn, appartenant au ACW/ famille Shammaa et dont l’intermédiaire est Hassan Jaafar, « n’a aucune valeur », dit Albert Naccache, « ni historique, ni archéologique, ni artistique. Les fouilles ont été si mal faites qu’il ne reste qu’une roche vierge. Mais on ne peut pas le retirer de la liste de l’inventaire public pour ne pas ouvrir la boîte de Pandore et créer ainsi un précédent. Alors on a demandé aux promoteurs de nous présenter leur plan d’intégration. On attend leur projet. Rien n’a encore été décidé », signale l’archéologue avant de souligner que toutes les décisions de la DGA portant sur l’hippodrome romain de Beyrouth et les Venus Towers, sont « en accord avec le code européen de bonne pratique d’intégration archéologique, voté en mars 2000 ».

Membre de la commission consultative nommée par le ministre de la Culture, Gaby Layoun, l’archéologue Albert Naccache rapporte que les résultats des fouilles menées sur le bien-fonds 1 398 de Minet el-Hosn (ou site Beirut 194) par l’archéologue contractuel à la Direction générale des antiquités Hisham Sayegh ont révélé quatre niveaux, dont le plus vieux était une carrière de...

commentaires (1)

" bite d’amarrage" prend DEUX t ; ) => bitte.

Pointilleuse

14 h 44, le 29 juin 2012

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Commentaires (1)

  • " bite d’amarrage" prend DEUX t ; ) => bitte.

    Pointilleuse

    14 h 44, le 29 juin 2012

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