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Liban

Ibrahim Najjar et le voyage au bout de la fonction publique...

« Son approche m’a constamment rendu à l’évidence d’un constat, la faillite de notre classe politique, impuissante à faire face aux désordres qui nous entourent, à construire un État avec des institutions modernes. Pourtant, le miracle continue. Celui d’un Liban dans un déséquilibre stable et un “désordre établi”. Jusqu’à quand ? »
Ces quelques mots du ministre Ibrahim Najjar au sujet de son interaction avec l’écrivaine Joumana Debs Nahas, et qui ponctuent sa préface de l’ouvrage Chronique en marge d’un Tribunal, publié aux éditions L’Orient-Le Jour, résument bien le voyage initiatique que constitue cet ouvrage.
Voyage initiatique pour Ibrahim Najjar, d’abord, qui, sollicité à quitter son monde académique d’enseignant à la faculté de droit de l’Université Saint-Joseph au lendemain du 7 mai 2008 et de l’accord de Doha, découvre l’extrême âpreté de la lutte politique en cours, polarisée progressivement autour du Tribunal spécial pour le Liban, mais aussi, justement, la complexité de ce que signifie vouloir être un grand commis de l’État et d’agir comme tel au sein d’un microcosme politique en crise manifeste.
Voyage initiatique ensuite pour l’écrivaine qui, dans le cadre de ses dialogues matinaux avec le professeur Najjar, est donc invitée, par le biais du regard et de l’éclairage de ce dernier, au sein de cette équipée quelque peu sauvage dans un monde d’intrigues politiciennes et d’enjeux de pouvoir, un monde de grand « désordre ».
Voyage initiatique enfin pour le lecteur, ou plutôt véritable plongée dans les coulisses, sinon les méandres des cercles du pouvoir depuis 2008, avec son cortège de violence, de désillusions, de déception – de réalisations et de percées aussi, sources de grand bonheur, certes, dans la médiocrité ambiante –, mais surtout d’impuissance de l’État libanais à restaurer l’ordre étatique face aux diverses excroissances extralégales...
Comme un fil d’Ariane, le lecteur peut ainsi remonter, au gré de ces « confessions » d’Ibrahim Najjar à l’écrivaine, le cours de cette lutte sans merci autour du tribunal international chargé de juger les auteurs de l’attentat du 14 février, dans tous ses épiphénomènes juridico-politiques – y compris la polémique particulièrement féroce sur le dossier desdits « faux témoins ». Si bien qu’entre la déconstruction permanente, juridique et politique, opérée par le ministre Najjar et le style palpitant de Mme Debs Nahas, l’ouvrage se transforme souvent en thriller politique à la John Grisham ou à la Robert Ludlum... quand bien même il ne fait, au final, que relater le fil chronologique d’événements-sources de grande tension pour les citoyens libanais durant plus de trois années. Rien que pour ce tour de force déjà – mais aussi pour le profil du « serviteur d’État » qui est indubitablement celui du professeur Najjar et qui est bien mis en relief dans cet ouvrage –, le livre de Mme Debs Nahas mérite une lecture attentive et enthousiaste.
Il reste que, malgré tout, l’espoir est quand même au rendez-vous. « Le miracle continue » pour le Liban, comme le note Ibrahim Najjar, alors que l’ouvrage s’achève sur une note de sérénité et de détermination, en dépit de cette très longue traversée du désert pour le pays... Mais « jusqu’à quand » ?

M.H.G.
« Son approche m’a constamment rendu à l’évidence d’un constat, la faillite de notre classe politique, impuissante à faire face aux désordres qui nous entourent, à construire un État avec des institutions modernes. Pourtant, le miracle continue. Celui d’un Liban dans un déséquilibre stable et un “désordre établi”. Jusqu’à quand ? » Ces quelques mots du ministre...

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