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Santé - Épidémie

La pénurie des médicaments antisida, un problème endémique au Liban

À l'occasion de la Journée mondiale de lutte contre le sida, l'artiste indien Sudarshan Pattnaik a fait plusieurs sculptures de sable du ruban rouge, symbole du sida, sur une plage à Puri.        Photo Asit Kumar/AFP)

Aujourd'hui, la planète célèbre la Journée mondiale de lutte contre le sida, une maladie qui ne cesse de gagner du terrain avec 33,4 millions de personnes qui vivent avec le VIH/sida et 2,7 millions de nouveaux cas par an, selon l'Organisation mondiale de la santé. Au Liban, cet événement est une occasion pour dénoncer une fois de plus la discontinuité des traitements et de rappeler que la maladie est locale et non importée.

C'est comme prêcher dans le désert, mais en cette journée mondiale de lutte contre le sida, il est impossible de ne pas soulever, pour la énième fois, le problème de cette pénurie régulière des stocks de médicaments. Un problème endémique qui englobe malheureusement toutes les maladies chroniques et non seulement le sida. « Il existe un manque de gestion, même si une amélioration est notée au niveau de la distribution des médicaments grâce à une action conjointe du Programme national de lutte contre le sida et la Société libanaise du sida, explique le Dr Jacques Mokhbat, président de la Société libanaise des maladies infectieuses et de la Société libanaise du sida. Ce centre de distribution informe régulièrement la pharmacie centrale de son stock et de ses besoins prochains. La pénurie reste toutefois de mise et souvent nous manquons de médicaments majeurs qui ne peuvent pas être remplacés. Et c'est toujours avec un retard inacceptable que la commande pour le renouvellement du stock se fait au niveau de la pharmacie centrale et du service d'achat du ministère de la Santé. »
Pour pallier ce manque thérapeutique, les regards se tournent vers des associations qui assurent les médicaments d'une manière plus ou moins régulière. « Malheureusement, il n'y a pas un vrai contrôle de la qualité des produits, mais nous sommes obligés de nous en accommoder, souligne le Dr Mokhbat. La Société libanaise du sida et d'autres associations achètent des médicaments sur le marché local ou étranger. Il n'en reste pas moins que le patient interrompt souvent son traitement, ce qui favorise le développement de résistances et nous mène à un autre problème grave, celui de l'échec thérapeutique ou de la difficulté à prendre certains médicaments. »
Dans ces cas, les spécialistes se retrouvent les bras liés, puisqu'ils ne disposent pas d'un deuxième choix thérapeutique et encore moins d'un troisième. « Aux États-Unis et en Europe, la prise en charge des personnes atteintes de sida est très bien assurée avec un choix entre plusieurs protocoles thérapeutiques, alors qu'au Liban nous sommes coincés avec un seul protocole et un deuxième qui est boiteux, déplore le médecin. Tous les pays de la région ont plus de choix thérapeutiques que le Liban, au moment où ce dernier a été le premier à avoir introduit le traitement antiviral. De plus, les médicaments dont nous disposons sont les mêmes depuis au moins une décennie. Aussi efficaces soient-ils, ces produits ont des effets secondaires considérables qui les rendent souvent intolérables et inacceptables pour les patients. Je citerai à titre d'exemple les déformations graisseuses au niveau du corps et l'augmentation de la pigmentation de la peau, une hausse du taux de cholestérol et des triglycérides, l'hypertension et les accidents cardiaques. Or les nouvelles thérapeutiques qui existent dans le monde, y compris dans les pays arabes, sont moins toxiques. Malheureusement, nous n'avons pas accès à ces traitements au niveau du ministère et nous sommes obligés soit de les acheter, soit de les mendier auprès de certaines compagnies pharmaceutiques pour qu'elles nous envoient des médicaments de soutien. »

Un problème local
Le 1er décembre est également l'occasion pour rappeler que le sida est désormais une maladie « locale », « non importée », et qu'elle touche de plus en plus d'adolescents et de jeunes gens homosexuels et hétérosexuels. « Grâce aux centres de dépistage anonymes et gratuits, nous arrivons à détecter de plus en plus de cas à des stades précoces asymptomatiques, ce qui permet une meilleure prise en charge de la maladie », fait remarquer le Dr Mokhbat, qui insiste sur l'importance de l'éducation pour prévenir la transmission de la maladie. « Parler de vaccins qui protègent à 30 %, comme le font les compagnies pharmaceutiques concernées, est une aberration, affirme-t-il. Personne n'osera prendre un vaccin contre une maladie mortelle qui ne protégerait pas complètement. De plus, il y a un risque que les gens qui se croient à tort immunisés n'utilisent plus les techniques de prévention, comme le préservatif, ce qui augmentera en plus le risque des autres maladies sexuellement transmissibles. Dans sa forme actuelle, ce vaccin n'a aucun effet ni d'un point de vue personnel ni d'un point de vue de santé publique. »
Par ailleurs, le rôle de la circoncision dans la protection de la maladie est également controversé. « Cette pratique est utile pour diminuer le nombre de transmissions à l'homme, souligne le Dr Mokhbat. Elle n'a aucun rôle pour diminuer la transmission à la femme. De même, il n'a jamais été prouvé qu'elle a un rôle dans les relations homosexuelles. Parler donc de la circoncision comme étant un des moyens de prévention du sida est également une erreur et faire de cette pratique un flambeau de bataille est un signe d'échec de toutes les campagnes contre le sida dans le monde. » Et le médecin d'affirmer que parmi les moyens de prévention qui réussissent restent l'éducation dès l'enfance, le traitement du VIH qui permet de diminuer la quantité du virus circulant dans la population et par conséquent le nombre de transmissions, ainsi que les moyens adoptés pour prévenir la transmission de la mère à l'enfant.
« Actuellement, il est difficile de changer l'approche vis-à-vis de la sexualité. Un retour en arrière n'est pas possible. Il faut être pragmatique et proposer des solutions adaptées à la situation », conclut le Dr Mokhbat.
Aujourd'hui, la planète célèbre la Journée mondiale de lutte contre le sida, une maladie qui ne cesse de gagner du terrain avec 33,4 millions de personnes qui vivent avec le VIH/sida et 2,7 millions de nouveaux cas par an, selon l'Organisation mondiale de la santé. Au Liban, cet événement est une occasion pour dénoncer une fois de plus la...

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