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Moyen Orient et Monde - Reportage

« Quand j’aurai dépensé toutes mes économies, je quitterai Deir ez-Zor et deviendrai réfugié »

Jadis un centre florissant de l’industrie pétrolière en Syrie, Deir ez-Zor est devenue une ville fantôme qui ne compte plus que quelques centaines de résidents s’accrochant obstinément à la vie. Capitale de la province éponyme, elle est contrôlée à 80 % par les rebelles qui combattent le président Bachar el-Assad dont les forces bombardent la ville depuis neuf mois.


Le bazar de la rue Ibn el-Walid, presque entièrement dévasté par les raids et le pilonnage, est fermé depuis deux mois. « Les gens ont peur de venir, ils craignent les bombes », dit Abou Mohammad dans sa boutique. « Personne n’a envie d’ouvrir sa boutique pour être tué par une bombe », lance de son côté Ahmad el-Kafed, un vendeur de kebab. Dans la rue Mokhtar, Ricky Shemali dépose quelques robes et chaussures sur le trottoir devant sa boutique. « Je viens d’ouvrir après neuf mois de fermeture, j’ai besoin d’argent pour nourrir ma famille », dit-il. Mais à part quelques combattants rebelles, la rue est déserte. « Les gens viennent, disent que tout est cher, qu’ils n’ont pas d’argent et repartent », raconte Shemali qui vendait auparavant ses marchandises à Alep et Hama. Mais « les usines à Alep ont fermé à cause de la guerre (et) je dois à présent acheter ma marchandise en Turquie où tout est plus coûteux. Si la situation ne s’améliore pas dans quelques semaines, je fermerai pour de bon et irai avec ma famille en Turquie ou en Irak pour repartir de zéro ».


Pour s’en sortir, raconte Mohammad el-Islam, les gens s’entraident. « Nous faisons des échanges. Je suis mécanicien, je répare la voiture de mon voisin en échange d’un kilo de tomates. C’est le seul moyen pour survivre », assure-t-il. Ainsi, Yawafed, association caritative locale, organise une soupe populaire quotidiennement. Dans les locaux, de la soupe et du riz cuisent dans deux chaudrons géants. « Environ 500 familles viennent tous les jours », indique Moustapha el-Haj qui dirige l’association. Abou Salem, qui travaillait auparavant dans un champ de pétrole, a été blessé par un éclat d’obus. Il avance en boitant, accompagné par son fils, et laisse transparaître son amertume. « La communauté internationale nous a abandonnés. Nous payons avec notre sang leur indifférence (...) Les Syriens deviennent ainsi plus radicaux et el-Qaëda s’installe. Quand ils auront décidé d’intervenir, ce sera trop tard », soutient-il.


Entre-temps, d’autres volontaires qui tiennent une boulangerie fournissent gratuitement le pain. Mais pour éviter les attaques contre la boulangerie, le pain est distribué gratuitement en ville. À Homs et Hama, des dizaines de personnes faisant la queue devant des boulangeries ont en effet été tuées l’an dernier par des bombardements du régime. « Une fois le pain cuit, nous le distribuons en ville », raconte Abou Ahmad qui gère la boulangerie. Chaque famille doit montrer une carte d’identité pour recevoir le pain. Tous les deux jours, 3 000 tonnes de farine, qui nous parviennent de Turquie, sont nécessaires pour cuire du pain qui nourrit 8 000 personnes, explique-t-il. « La vie est très difficile, mais elle est de loin meilleure que dans les régions contrôlées par le régime, où les gens sont kidnappés et tués tous les jours », assure Abdel Razzak el-Haj Hazaa, en prenant sa ration. « Le coût de la vie a beaucoup augmenté, les produits sont rares, mais si jamais nous avons besoin d’aide, nous demandons aux soldats de l’Armée syrienne libre (ASL) qui sont toujours heureux de nous servir », soutient-il.

 

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