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Moyen Orient et Monde - Débat sur la peine de mort

En difficulté, Erdogan joue la provoc’ à tout-va

Recep Tayyip Erdogan est un habitué des déclarations à l’emporte-pièce. Adem Altan/AFP

Simple provocation ou calcul politique ? Les deux sûrement. En agitant l’idée d’un rétablissement de la peine de mort, le Premier ministre turc a jeté un pavé dans la mare qui met en ébullition la classe politique de son pays et suscite une levée de bouclier dans toute l’Europe.
Ce n’est plus un secret pour personne, Recep Tayyip Erdogan est un habitué des déclarations à l’emporte-pièce. Celles qu’il distille méthodiquement depuis quelques jours sur un éventuel retour de la peine capitale en Turquie s’inscrivent parfaitement dans cette tradition. C’est en évoquant le sort réservé au célèbre détenu kurde Abdullah Öcalan que le chef du gouvernement turc a remis la question sur le tapis. Condamné à mort en 1999, le chef historique du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) a vu sa peine commuée en réclusion criminelle à perpétuité, qu’il purge depuis à l’isolement sur l’île d’Imrali. « Aujourd’hui, de nombreuses personnes sont favorables à un rétablissement de la peine de mort », a-t-il déclaré au début du mois, en soulignant la « souffrance » des victimes de la rébellion « terroriste » du PKK. M. Erdogan a récidivé dimanche dernier en évoquant le meurtrier norvégien Anders Brevik. « Le pouvoir (de pardonner un meurtrier) appartient à la famille de la victime, pas à nous, a-t-il déclaré. Nous devons réévaluer nos positions. »
Sans surprise, cette sortie a provoqué un concert de protestation dans l’Union européenne, dont la Turquie aspire toujours à devenir membre. Entre autres mesures, l’abolition de la peine capitale, définitive en 2004, entrait précisément dans la préparation de sa candidature. « La peine de mort ne doit pas exister dans les lois des pays membres de l’Union européenne », a rappelé le commissaire de l’UE à l’élargissement Stefan Füle. Plus virulent, le président du groupe social-démocrate au Parlement européen, Hannes Swoboda, a dénoncé des propos « scandaleux et provocants » qui mettent « sérieusement en danger » la candidature de son pays.
Face à un tel tollé, ministres et responsables du Parti de la justice et du développement (AKP) au pouvoir se sont succédé pour tenter d’éteindre l’incendie. « Nous n’étudions pas cette question pour le moment », a assuré le ministre de la Justice Sadullah Ergin. « Nous sommes fidèles aux engagements pris dans le cadre du processus européen, mais nous attendons la même chose de l’Union européenne », a renchéri son collègue des Affaires étrangères Ahmet Davutoglu.
« M. Erdogan est connu pour ses écarts verbaux, il ne faut pas le prendre au pied de la lettre, juge l’universitaire Jean Marcou, spécialiste de la Turquie. Il faut plutôt y voir d’abord un signe d’impatience et de mécontentement face au blocage du processus d’adhésion européen. » D’autres voient aussi dans la relance de ce débat une opération de diversion d’un Premier ministre en difficulté face au mouvement de grève de la faim lancé par les détenus kurdes. « Ce n’est pas la première fois qu’il a recours à un contre-feu lorsqu’il est en difficulté », relève un diplomate.
Incontestablement, le propos du Premier ministre n’est pas non plus exempt d’arrière-pensées politiques. Contraint de quitter son poste de Premier ministre en 2015, Recep Tayyip Erdogan ne cache plus son ambition de briguer en 2014 un mandat de président de la République aux pouvoirs renforcés. « Il a besoin des nationalistes pour modifier la Constitution. Et il est confronté dans son camp à la concurrence du chef de l’État Abdullah Gül, plus modéré », note un expert européen, « donc il joue la surenchère populiste ». Effectivement, le chef du Parti nationaliste (MHP), Devlet Bahceli, a bondi sur la proposition de M. Erdogan. « Le MHP est prêt à aider l’AKP à rétablir la peine de mort, lui a lancé M. Bahceli. Montrez que vous en êtes capable ! » « Ce débat renforce la mauvaise image de la Turquie en Europe et donne des arguments à ceux qui rejettent sa candidature, regrette l’expert européen. Ce n’est vraiment pas une bonne nouvelle. »

(Source : AFP)
Simple provocation ou calcul politique ? Les deux sûrement. En agitant l’idée d’un rétablissement de la peine de mort, le Premier ministre turc a jeté un pavé dans la mare qui met en ébullition la classe politique de son pays et suscite une levée de bouclier dans toute l’Europe.Ce n’est plus un secret pour personne, Recep Tayyip Erdogan est un habitué des déclarations à...

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