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Moyen Orient et Monde - Reportage

En Syrie, les pauvres vendent leur or, les riches se font un bas de laine

Un client retire sa bague en or – mais ses traits s’affaissent quand le bijoutier lui en propose à peine cent dollars. « Vous ne pouvez pas faire un peu mieux ? » demande-t-il timidement avant d’accepter. Après vingt mois de conflit, beaucoup de Syriens vendent leurs bijoux pour survivre. Avec la guerre qui s’enlise entre l’armée fidèle au président Bachar el-Assad et les rebelles, le marché de l’or connaît un engouement sans précédent.


Les plus défavorisés, notamment ceux qui se sont retrouvés au chômage car leur entreprise a fermé ou a été détruite par les combats, doivent vendre des bijoux pour nourrir leur famille. Les plus riches achètent le métal précieux car ils craignent un effondrement de la monnaie nationale. Selon Sonia Khanji, membre de la Chambre de commerce de Damas, 30 % des petites et moyennes entreprises syriennes ont fermé, entraînant une hausse du chômage qui touche environ 25 % de la population active. Au cœur de la capitale, au souk des bijoutiers, à Hariqa, une jeune femme très tendue discute du prix d’une grosse bague héritée de sa grand-mère. « Je te l’achèterai 55 000 livres syriennes (580 euros) quand tu seras décidée », lui indique le vendeur. Elle s’en va, jugeant l’offre trop basse. « Elle reviendra car elle semble avoir besoin de liquidités », commente-t-il.


L’inflation galopante en Syrie a amputé d’un tiers le pouvoir d’achat des Syriens, habitués à une relative stabilité des prix et de la monnaie, rapporte le journal gouvernemental Techrine, qui pointe du doigt les sanctions économiques et l’embargo imposés par les pays européens et les États-Unis, qui accusent le régime de mener un répression sanglante. « La demande de bijoux a sensiblement baissé depuis deux ans en raison de la hausse du prix de l’or sur le marché mondial et de l’affaiblissement de la monnaie syrienne », qui a perdu la moitié de sa valeur face au billet vert, explique le bijoutier Basile Mdari. Les Syriens qui ont des revenus optent pour l’or comme monnaie refuge. « Les gens préfèrent acquérir des livres sterling en or ou des onces, plutôt que des babioles », poursuit-il, expliquant ces achats par le fait qu’ils font des réserves en prévision d’une longue période de troubles.


Plusieurs professionnels à Damas soulignent que le métal précieux constitue une épargne appréciable en temps d’incertitudes politiques et économiques. « Les gens doutent de la monnaie nationale. Chaque fois que des sanctions économiques sont annoncées contre le pays, je remarque que les riches se ruent sur l’or. Ils pensent qu’acquérir le métal jaune les protège », explique un autre bijoutier, Michel. Hicham, orfèvre dans le centre-ville, confirme : les gens « craignent une hausse du dollar et une baisse de la livre syrienne. Et puis l’or, c’est plus facile à transporter s’il faut partir précipitamment ». Le cours de l’or a repris son ascension, augmentant de 265 livres syriennes (2,8 EUR) le gramme en une semaine, assurait hier le quotidien es-Saoura. « L’or est parti pour atteindre de nouveaux sommets », affirme un bijoutier. Samedi, le gramme d’or valait 3 800 livres syriennes (environ 50 USD ou 40 EUR).


Le doyen des bijoutiers, Georges Sarji, impute la montée des prix à son envolée sur le marché international. « Les ventes sur le marché s’améliorent, bien que les Syriens continuent de vendre leur or », indique M. Sarji, cité par le journal es-Saoura. Selon lui, « 100 livres en or et 50 onces sont vendus quotidiennement à Damas » ces jours-ci. L’once d’or a conclu cette semaine sur le marché international à 1 730,50 dollars, soit un peu plus de 43,50 euros le gramme.

Un client retire sa bague en or – mais ses traits s’affaissent quand le bijoutier lui en propose à peine cent dollars. « Vous ne pouvez pas faire un peu mieux ? » demande-t-il timidement avant d’accepter. Après vingt mois de conflit, beaucoup de Syriens vendent leurs bijoux pour survivre. Avec la guerre qui s’enlise entre l’armée fidèle au président Bachar el-Assad et les...

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