Rechercher
Rechercher

Moyen Orient et Monde

« On va vers un pourrissement de la situation »

Trois questions à Fabrice Balanche, spécialiste de la Syrie au Gremmo (Groupe de recherches et d’études sur la Méditerranée et le Moyen-Orient).
Q – À qui s’adressait le discours de Bachar el-Assad ?
R – Bachar el-Assad s’adresse d’abord à ses supporters. Il montre qu’il n’a pas changé de ligne, que c’est un complot, que des bandes armées terrorisent la population. Il donne des arguments à ses supporters qui ont besoin d’être convaincus régulièrement par le discours du chef. Il s’adresse aussi aux attentistes, pour leur faire comprendre qu’il ne faut pas descendre dans la rue. Il s’adresse enfin aux manifestants, en leur disant : Vous pouvez toujours continuer à manifester, moi je ne changerai pas de ligne.

Sur le fond, comment analysez-vous ce discours ?
Sur le fond, le président parle toujours d’un complot de l’étranger. Sur la loi d’amnistie, il dit qu’il va demander au ministère de la Justice d’étudier un possible élargissement, alors que tout le monde sait que c’est lui-même qui déciderait d’un éventuel élargissement. Il parle de législatives en août, en plein ramadan. Des élections qui se tiendront sans préparation, sans changement préalable majeur sur la loi concernant les partis. Avec ces élections, Assad espère juste que des mécontents vont rentrer dans le processus électoral pour gagner un strapontin, car la vie parlementaire a quelques avantages en termes pécuniaire et de notoriété. Mais finalement, sur la question des réformes, il repousse tout à septembre, il ne fait que gagner du temps.
Le seul point intéressant est la référence à un risque d’effondrement de l’économie syrienne. Effectivement, l’activité syrienne tourne au ralenti. Il n’y a plus d’investissements, pas de consommation, ni de tourisme, le chômage monte. La situation est catastrophique pour tout le monde et on va vers un pourrissement de la situation.
Ceci augmente le mécontentement populaire. Un mécontentement qui peut se retourner contre les manifestants. Jusqu’à présent, la bourgeoisie syrienne accuse les manifestants de saborder économiquement le pays. À terme, le mécontentement va toutefois se retourner contre le pouvoir, car la bourgeoisie risque de se désolidariser d’un régime incapable de ramener la stabilité. Mais attention, ce retournement pourrait prendre du temps, des mois, voire un an. Et il ne faut pas oublier que Hafez el-Assad a réprimé pendant trois ans, entre 1979 et 1982. Bachar n’en est qu’au troisième mois.

Un haut responsable turc jugeait hier que le président syrien avait moins d’une semaine pour mettre en œuvre les réformes politiques avant le début d’une intervention de la communauté internationale. Sommes-nous toujours dans la rhétorique, ou la communauté internationale se rapproche-t-elle d’une action contre la Syrie ?
Mais de quels moyens la communauté internationale dispose-t-elle pour faire pression sur la Syrie ? De pas grand-chose. La communauté internationale ne peut pas attaquer la Syrie sans un vote du Conseil de sécurité. Or, la Russie bloque toujours et il n’y a pas de raison que la Russie change de politique à l’égard de la Syrie. En ce qui concerne les sanctions de l’Union européenne, par exemple, elles mettront du temps avant de porter. Si on prend le cas de la Banque européenne d’investissement, certes depuis début de la contestation, la BEI n’a pas envoyé de nouvelle mission en Syrie, mais les projets lancés avant continuent d’être financés.
Q – À qui s’adressait le discours de Bachar el-Assad ? R – Bachar el-Assad s’adresse d’abord à ses supporters. Il montre qu’il n’a pas changé de ligne, que c’est un complot, que des bandes armées terrorisent la population. Il donne des arguments à ses supporters qui ont besoin d’être convaincus régulièrement par le discours du chef. Il s’adresse aussi aux attentistes,...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut