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Moyen Orient et Monde - Révolte

Libye : la coalition affiche ses divisions

Cafouillage britannique sur le sort de Kadhafi, dissensions au sujet d'un transfert à l'OTAN du commandement de l'opération, réduction prochaine de la participation américaine... Trois jours après le lancement des opérations militaires de la coalition internationale contre les forces de Mouammar Kadhafi, de nombreuses voix dissonantes se sont fait entendre hier, alors que les bombardements se poursuivaient sur le terrain.

Des insurgés évacuent l’un de leurs camarades blessés lors d’une vaine tentative de reprendre le contrôle d’Ajdabiyah. Patrick Baz/AFP

Trois après le lancement de l'offensive internationale en Libye, les combats entre pro et anti-Kadhafi se sont poursuivis hier, faisant au moins 40 morts et 300 blessés à Misrata, selon un porte-parole des rebelles dans la ville et une source médicale. Selon le porte-parole, des forces du colonel Mouammar Kadhafi ont pénétré dans la ville - située à environ 200 km à l'est de Tripoli - tenue par les insurgés et y ont déployé des snipers et trois chars, tirant sur des manifestants. La télévision d'État a pour sa part annoncé que la ville avait été « purgée » des rebelles. Dans l'Est, les forces gouvernementales libyennes, qui avaient attaqué Benghazi samedi matin, ont reculé hier jusqu'à Ajdabiya, à 160 km au Sud. Au sud-ouest de Tripoli, les forces loyalistes pilonnent depuis trois jours la région d'al-Jabal al-Gharbi, en particulier les villes de Zenten et Yefren sous contrôle de la rébellion, selon des habitants de la région évoquant des raids « très intensifs ».
Selon un porte-parole du gouvernement libyen, la coalition internationale, avec à sa tête les États-Unis, la France et la Grande-Bretagne, aurait également bombardé hier la ville de Sebha (750 km au sud de Tripoli), fief de la tribu des Guededfa de Kadhafi. La télévision d'État libyenne a de son côté annoncé que Tripoli avait été la cible hier soir de nouvelles attaques de la part de l'« ennemi croisé ». Un journaliste de Reuters a fait état de deux explosions dans la capitale libyenne, suivies de tirs de DCA. Une base de la marine libyenne située à 10 km à l'est de Tripoli aurait été touchée par les bombardements, selon des témoins qui ont vu des flammes s'échapper de la base.
Après la réussite annoncée d'une première vague de frappes samedi et dimanche contre les défenses antiaériennes et des blindés près des lignes des insurgés, les forces engagées dans la coalition ont pour objectif de couper le soutien logistique des forces gouvernementales. Le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, a qualifié l'opération de « succès » car elle a évité un « bain de sang ». « Nous avons sauvé les civils de Benghazi », le fief des insurgés à un millier de km à l'est de Tripoli, a-t-il assuré.

Les frappes s'écartent du but
Parallèlement, l'Union européenne a adopté hier des sanctions renforcées contre le régime de Kadhafi et s'est dit prête à apporter de l'aide humanitaire, sans parvenir à dissimuler de profondes divisions en son sein.
L'Allemagne, qui s'est abstenue jeudi de voter la résolution 1973 du Conseil de sécurité avant d'apporter samedi un soutien - sans participation - à l'opération militaire, a finalement estimé hier qu'il y avait « des risques ». Berlin et Rome reprochent à la coalition d'avoir bombardé des cibles au sol (défenses antiaériennes et blindés) sans se limiter à la seule instauration d'une zone d'exclusion aérienne, notent les analystes. Ces pays suivent plus ou moins explicitement l'argumentation de la Ligue arabe qui, dimanche, avait critiqué ouvertement les bombardements : les frappes s'écartent « du but qui est d'imposer une zone d'exclusion aérienne », avait déclaré son secrétaire général, Amr Moussa. Ce dernier est revenu hier à une position plus consensuelle, affirmant que ses propos avaient été mal interprétés, mais ces revirements illustrent la « position schizophrénique » des États arabes, analyse Jean-Pierre Maulny, de l'Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS). Alors que les Occidentaux se sont targués d'une participation arabe à cette coalition, jusqu'à présent seul le Qatar s'est engagé. Les Émirats arabes unis ont finalement annoncé que leur rôle se bornerait à une « aide humanitaire ».
À Moscou, le Premier ministre russe Vladimir Poutine, dont le pays s'était abstenu lors du vote à l'ONU, a affirmé que la résolution lui faisait penser « à l'appel aux croisades à l'époque du Moyen-Âge ». Parlant à des journalistes dans sa résidence de Gorki, le président Dmitri Medvedev a souligné quant à lui « la nécessité d'être prudent dans ses jugements ». « Il n'est en aucune manière acceptable d'utiliser des expressions qui mènent à un affrontement de civilisations, comme le terme de croisades (...). C'est inacceptable car cela ne peut qu'aggraver les choses », a-t-il dit. Priée de dire si Dmitri Medvedev voulait parler de son Premier ministre, sa porte-parole Natalia Timakova a répondu : « Il parlait de Kadhafi et de tous ceux qui utilisent de telles expressions. »

Tensions autour du rôle de l'OTAN
Les dissensions au sein de la coalition ont également été au centre des discussions hier à l'OTAN. Au cours d'une réunion, les ambassadeurs d'une majorité des 28 pays membres ont confirmé leur souhait que l'alliance relaie au plus tôt la coalition qui a lancé la campagne de bombardements samedi. Mais Paris, bien qu'assez isolé, renâcle devant ce qu'impliquerait un tel affichage : si l'OTAN dirige l'intervention, les pays arabes ne voudront pas s'y rallier et, pire, finiront par la dénoncer, répète la France. Actuellement, les opérations de la coalition sont coordonnées par les QG américains de Ramstein (ouest de l'Allemagne) et Naples (sud de l'Italie). Le président Obama a, pour sa part, assuré que « l'OTAN va jouer un rôle » dans un délai « de jours, non de semaines ». Témoignant de la tension grandissante, la Norvège a annoncé qu'elle suspendait la participation aux opérations de ses avions F-16 arrivés en Italie puis repartis en Crète, « à une clarification du commandement ». L'Italie a placé la barre plus haut, le ministre des Affaires étrangères lâchant que si la question n'était pas réglée, son pays reprendait le contrôle des bases qu'elle a mises à la disposition de la coalition.

Cafouillage autour de la gestion du cas Kadhafi
Au-delà, c'est l'objectif de l'opération qui sème le doute au sein de la coalition internationale. Les forces de la coalition en Libye s'en tiennent aux objectifs définis par la résolution de l'ONU et n'ont pas pour mission de soutenir une offensive des rebelles ou d'éliminer le colonel Kadhafi, a déclaré hier le chef militaire de la coalition, le général américain Carter Ham. « La position américaine est que Kadhafi doit partir », a déclaré hier le président Obama, Robert Gates affirmant, de son côté, que la décision de renverser Kadhafi « revenait au peuple libyen. À Londres, le cafouillage était total autour de la question de renverser ou non Kadhafi. Le premier à s'exprimer sur le sujet a été le ministre de la Défense, Liam Fox. « Cela pourrait être une possibilité (...) mais il faudrait prendre en compte les victimes civiles qui pourraient en résulter », a-t-il déclaré. « Tout dépend de la façon dont les gens se comportent », a affirmé pour sa part le ministre des Affaires étrangères William Hague, tout en soulignant que les cibles seraient « toujours en accord avec la résolution des Nations unies ». Mais quelques heures plus tard, le chef d'état-major de l'armée britannique, le général David Richards, a totalement écarté l'idée de frappes visant Kadhafi.
(Source : agences)
Trois après le lancement de l'offensive internationale en Libye, les combats entre pro et anti-Kadhafi se sont poursuivis hier, faisant au moins 40 morts et 300 blessés à Misrata, selon un porte-parole des rebelles dans la ville et une source médicale. Selon le porte-parole, des forces du colonel Mouammar Kadhafi ont pénétré dans la ville - située à environ 200 km à l'est de Tripoli -...

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