Au Poste decontrôle (PC) du « Battle Group Bison », installé sous une toile de tente sur les hauteurs de la vallée, la tension monte. Le niveau sonore aussi. Commandant des 800 soldats français déployés dans le district de Surobi, le colonel Jérôme Goisque réagit calmement : « Autorisation de tir », « refus », les ordres fusent. À l'ancienne, des officiers déplacent des punaises colorées sur un fond de carte, bleues pour les positions « amies », rouges pour les groupes insurgés et les tireurs embusqués.
« Tirs de sniper en provenance de 43 delta unité », lance un soldat à la radio. Des snipers embusqués, armés de fusils soviétiques Dragonov, visent les Français. Les tirs résonnent autour du PC. Les guetteurs baissent la tête quand les balles sifflent.
L'assaut sur la « zone verte » de la vallée de Tagab a commencé dimanche. L'objectif est une bande de terrain de 400 à 1 500 mètres de large sur 10 kilomètres de long, de part et d'autre de la rivière Tagab, un oued quasiment asséché. Les Français l'ont rebaptisé le « nid de frelons », la « green zone » ou la « jungle ». Au départ, l'objectif était de « prendre contact avec la population » mais le contact est glacial et l'opération tourne au coup de pied dans la fourmilière. Abrités par une végétation dense et luxuriante, les insurgés ont posé un verrou infranchissable sur l'axe Vermont, une route stratégique Nord-Sud qui emprunte la vallée de Tagab. Un jour ou l'autre, les forces françaises comptent bien faire sauter ce verrou. Pour elles, il s'agira de rétablir la jonction entre leurs deux zones de responsabilité, la Surobi, au sud de la vallée de Tagab, et la province de Kapisa, au nord. La plupart des 3 750 soldats français déployés en Afghanistan y sont stationnés.
Pour les forces de la coalition, l'axe Vermont constituera une nouvelle voie d'approvisionnement logistique, entre Islamabad, au Pakistan, et Kaboul. Et pour les habitants de la vallée, dont les forces de l'OTAN tentent de gagner le soutien, ce serait un gage de développement économique. Mais en attendant, il faut braver l'adversité. Embusqués dans un dédale de pistes et de sentiers dont ils connaissent les moindres recoins, les insurgés - talibans locaux et pakistanais, jihadistes que l'on dit tchétchènes, arabes ou kosovars - ne s'en laissent pas conter. En témoigne la débauche de moyens déployés par la coalition pour reprendre deux ou trois kilomètres de terrain en deux jours sans faire de victimes collatérales ou subir des pertes.
Hervé ASQUIN (AFP)
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