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Moyen Orient et Monde - Le point

La guerre des chiffres

En marge de l'opération « Shock and Awe » lancée au mois de mars de l'an 2003 par un George W. Bush soucieux, disait-il, de découvrir l'arsenal d'armes de destruction massive constitué par Saddam Hussein, une autre guerre est en cours depuis quelque temps, opposant le commandement militaire US aux grands journaux du pays et portant, celle-là, sur le total des victimes. La semaine dernière, les militaires ont contesté le bilan avancé par une agence de presse sur la foi des statistiques des départements de la Santé et de l'Intérieur qui parlaient de 535 morts en juillet, soit nettement plus que le chiffre du département de la Défense (222 tués). La baisse est de 50 ou de 25 pour cent par rapport à 2009, suivant que l'on fasse confiance aux calculs des généraux ou des civils. Ray Odierno, le plus haut gradé yankee sur le terrain, a mis un terme l'autre jour à la querelle : « Je ne vais pas discuter chiffres, a-t-il lancé aux journalistes. Je me contenterai de relever qu'aujourd'hui, cela va mieux qu'hier. » Fermez le ban ! Sauf que, pour les stratèges en chambre, tout le débat ne fait qu'épaissir ce que l'on appelle le brouillard de la guerre. Et aussi, sauf qu'en plus de sept ans, le bilan s'inscrit à 4 413 morts et 31 902 blessés graves.
Macabre arithmétique, puisqu'il est question de décès, mais qu'il convient de situer dans la perspective du retrait imminent du gros du contingent américain. Devant un groupe de vétérans, Barack Obama s'est engagé l'autre jour, « comme promis et suivant notre programme », à rappeler le gros des effectifs engagés dans une expédition qu'il avait qualifiée jadis de « stupide » (« dumb »). Simple coïncidence ? Le même jour, un sondage pour le compte de l'USA Today indiquait une nette baisse de l'indice de popularité de l'actuel locataire de la Maison-Blanche. Ceux qui lui font confiance pour la conduite de cette guerre ne représentent plus que 36 pour cent, au lieu de 48 pour cent en février ; et 43 pour cent pensent que toute l'affaire, déclenchée après les attentats du 11-Septembre, fut une lamentable erreur.
La décision présidentielle signifie qu'au 31 août, il ne restera plus sur les bords de l'Euphrate que 50 000 hommes de troupe contre 144 000 actuellement. Et encore, la tâche des brigades laissées sur place sera de « conseiller et seconder » (« advise and assist ») les forces de sécurité irakiennes, de protéger le personnel et les installations américaines et de lancer des opérations antiterroristes. Même leur mission changera de nom : d'« Opération liberté irakienne », elle deviendra « Opération nouvelle aube ». Enfin, le dernier GI devra avoir fait son barda à la fin de 2011, conformément à un calendrier défini par Bush fils.
Il faut compter sur les républicains pour ressortir, en cette période préélectorale, des chiffres tout aussi éloquents aux yeux de l'homme de la rue. L'irruption yankee en terre mésopotamienne aura opéré une ponction de 900 milliards de dollars dans la poche du contribuable, ce qui signifie, selon le leader de la majorité au Sénat Harry Reid, 5 000 dollars par seconde au 5 mai 2008. En outre, est-il précisé, chaque soldat coûte à l'Oncle Sam quelque 390 000 dollars par an. Ou encore, pour les férus de comptabilité, ceci : 9 milliards se sont évaporés dans la nature, ainsi qu'un milliard représentant le prix de tracteurs et d'équipement divers livrés aux forces de sécurité locales, 10 milliards de dollars perdus sous forme de mauvaise gestion ou de pertes (chiffres cités lors d'auditions par le Congrès), 1,4 milliard de majoration de factures pour le compte de Halliburton. Commentaire du Pentagone sur ce dernier point : « Unreasonable and unsupported »...On appréciera d'autant plus que l'honorable firme, héritage laissé par l'ancien vice-président Dick Cheney qui en fut le PDG, a opéré un curieux montage lui permettant de créer un sous-traiteur, la société KBR, qui a obtenu des commandes pour un montant de 20 milliards destinés à financer la fourniture de nourriture, de carburant, d'habitations, etc.
Devant les anciens combattants, le chef de l'exécutif a tenu à rappeler sa promesse, lors de la campagne présidentielle, de mettre fin « de manière responsable » à cette guerre, puis, après son entrée en fonctions, de confier aux Irakiens la direction de leur pays. Étrange que, dans tout cela, nulle part il ne soit fait mention de démocratie. Simplement, il est question de « clore un chapitre », comme si l'on se contentait de points de suspension au lieu d'un grand point final. Encore une fois, « mission inachevée ».
En marge de l'opération « Shock and Awe » lancée au mois de mars de l'an 2003 par un George W. Bush soucieux, disait-il, de découvrir l'arsenal d'armes de destruction massive constitué par Saddam Hussein, une autre guerre est en cours depuis quelque temps, opposant le commandement militaire US aux grands journaux du pays et portant,...

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