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Moyen Orient et Monde - Reportage

À Ramallah, une activité économique en demi-teinte

Au-delà de la forte croissance et d'une certaine frénésie immobilière, l'économie palestinienne reste tributaire de l'aide internationale et des restrictions israéliennes.
Le retour des beaux jours à Ramallah s'accompagne de l'ouverture - ou réouverture - de nombreux bars-restaurants, à l'instar du Snober. Avec le retour des températures estivales, ce bar en plein air accueille, en soirée et en journée, Palestiniens et étrangers. À l'ombre des pins, une piscine, des canapés, un écran géant pour les amateurs de ballon rond et une piste de danse enflammée tous les jeudis et vendredis soir. Beit Hanisa, Zan, Orjuan, Azure, Pronto... La liste des endroits où sortir, danser, dîner à Ramallah ne cesse de s'allonger.
À chaque coin de rue, les marteaux-piqueurs s'activent matin et soir. La frénésie immobilière recouvre les collines du siège de l'Autorité palestinienne. Dans cette commune de 40 000 habitants, immeubles d'habitation et bureaux poussent comme des champignons, illustrant les efforts de Salam Fayyad, le Premier ministre palestinien, qui vise l'établissement d'un État palestinien « indépendant et viable » d'ici à 2011. En 2009, la croissance économique des territoires palestiniens a atteint 7 % du PIB, selon le Fonds monétaire international. Selon Salam Fayyad, elle serait de plus de 10 % en Cisjordanie.
Mais l'économie palestinienne reste tributaire de l'aide internationale et des restrictions israéliennes sur les mouvements des personnes et des marchandises. Par rapport à 2000, le PIB palestinien a décliné de 13 %. Pour l'année 2009, la part de l'aide dans le PIB palestinien a certes reculé, mais elle y compte toujours pour près de 18 %, contre quelque 30 % en 2008. En 2009, selon le FMI, les pays donateurs ont débloqué 1,5 milliard de dollars à l'Autorité palestinienne afin de lui permettre de financer son budget ainsi que des programmes de développement.
« Ce n'est pas un boom économique, seulement de l'activité économique », nuance Sam Bahour, un consultant américano-palestinien installé à Ramallah depuis 10 ans. « L'activité économique est importante, mais cela n'a rien à voir avec une économie en développement », poursuit-il, avant d'ajouter : « Il y a 10 ans, il me fallait 20 à 25 minutes pour me rendre à Bethléem depuis Ramallah. Maintenant, il me faut plus de deux heures à cause du mur, et nous sommes obligés de passer par des routes sinueuses et dangereuses. J'utilise donc plus d'essence, je me rends plus souvent chez mon garagiste. Tout cela est bon pour le PIB ! »
Selon un rapport du FMI, les restrictions israéliennes « entravent toujours l'activité économique intérieure et le commerce extérieur », les importations ou exportations, l'accès à l'eau, les frontières, le tourisme... Même si de nombreux checkpoints ont été levés par les Israéliens facilitant l'accès à certaines communes comme Naplouse, au nord de la Cisjordanie, les restrictions de mouvements sont toujours présentes. Le mur sépare des fermiers de leurs terres et des commerçants de leur clientèle. Les territoires palestiniens, Cisjordanie et Gaza, ne possèdent ni port ni aéroport.
« Notre économie est sur pilotis. Les constructions d'immeubles et les restaurants ne sont que des façades, mais les Israéliens contrôlent tout. C'est comme une bulle qui peut exploser à tout moment », ajoute Ibrahim, un entrepreneur de Jéricho résidant dans la ville siège de l'Autorité palestinienne. « C'est une économie de survie », renchérit Sam Bahour, qui fut l'un des fondateurs de la compagnie téléphonique palestinienne Palnet.
Après les deux premières intifadas en 1987 et en 2000, nombreux ont été les Palestiniens à avoir quitté le territoire. Grâce à cette activité économique plus ou moins importante, des emplois sont créés dans de nombreux secteurs, même si le taux de chômage atteint toujours 18 % en Cisjordanie et 37 % à Gaza.
« Ramallah ne représente pas la Palestine, c'est une exception. Une bulle », déclare Mohammad tout en sirotant une bière au Beit Haneesah, un bar-restaurant qui a ouvert en avril dernier. Ramallah est une oasis en Cisjordanie. Les soldats israéliens patrouillent rarement dans la ville, contrairement à Hébron, située au sud de la Cisjordanie. Les colons, situés non loin, sont moins agressifs qu'à Naplouse, au nord, ou Hébron, ville coupée en deux dont la moitié est sous contrôle israélien, selon les accords de paix d'Oslo signés en 1993. Des immeubles de luxe sont en construction alors qu'à Jérusalem-Est, nombreux sont les Palestiniens qui ne savent pas si leur maison sera encore debout en rentrant le soir.
« Mais ce n'est pas parce qu'on va au restaurant qu'on a une vie agréable. On ne peut pas sortir d'ici. Il faut un permis pour aller à Jérusalem, un passeport pour passer Allenby (seule frontière que les Palestiniens sont autorisés à traverser pour se rendre en Jordanie et accéder à un aéroport, NDLR). Et beaucoup paieraient pour obtenir un passeport et s'envoler pour l'Europe ou les États-Unis, constate Ibrahim. Mais on a le droit d'essayer de vivre normalement, non ? »
Le retour des beaux jours à Ramallah s'accompagne de l'ouverture - ou réouverture - de nombreux bars-restaurants, à l'instar du Snober. Avec le retour des températures estivales, ce bar en plein air accueille, en soirée et en journée, Palestiniens et étrangers. À l'ombre des pins, une piscine, des canapés, un écran géant...

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