Rechercher
Rechercher

Liban - Éclairage

Deux agressions... un même résultat

Le Liban et les Libanais l’ont échappé belle. Dimanche soir et même dans la soirée de lundi, le pays était à deux doigts de basculer dans la discorde tant honnie. Mais la réaction rapide des responsables chiites et sunnites ainsi que celle de l’armée ont permis d’éviter le pire. Officiellement, il s’agirait donc de voyous « récidivistes » qui s’adonnent à la drogue et qui sont connus dans leurs quartiers pour provoquer des rixes. Ils auraient donc décidé de leur propre chef d’agresser des cheikhs sunnites. En ce qui concerne l’incident de Khandak al-Ghamik, Hassan Hammoud, un « abadaye » de près de deux mètres qui était dans l’armée et qui en a été expulsé pour mauvais comportements (il a donc un dossier auprès des services de sécurité), aurait guetté les deux cheikhs dans une ruelle sombre et non habitée. Avec l’aide du coiffeur Hassan Baalbacki, il aurait décidé de les rouer de coups et de leur raser la barbe. Ce qui a nécessité leur transport à l’hôpital des Makassed.


Khandak al-Ghamik est une région mixte (peuplée de sunnites et de chiites) comme il y en a (heureusement) encore à Beyrouth. Mais deux éléments donnent toute sa gravité à l’incident : d’une part, les agresseurs sont chiites alors que les victimes sont sunnites, et, d’autre part, les agressés sont des cheikhs sunnites membres de Dar el-Fatwa. Presque au même moment, deux cheikhs sunnites faisaient aussi l’objet d’une agression dans le quartier de Mar Mikhaël dans la banlieue sud. Mais il s’agirait d’un échange d’insultes, suite à une conversation un peu vive. Les cheikhs auraient donc été pris à partie, sans être agressés physiquement. Là aussi, les agresseurs ont été rapidement identifiés comme étant des fauteurs de troubles et des consommateurs de drogue.

 

(Lire aussi : Les chefs religieux sont unanimes : le risque de discorde guette le pays)

 

Très vite, les responsables d’Amal et du Hezbollah ont pris conscience de la gravité de ces deux incidents et, selon des informations sécuritaires, ils seraient descendus dans la rue pour aider les unités de l’armée rapidement déployées sur les lieux des incidents à circonscrire les conséquences éventuelles de ces agressions. Dans un communiqué clair, les commandements d’Amal et du Hezbollah ont condamné les deux agressions, tout en levant toute couverture politique et confessionnelle sur les agresseurs qui ont d’ailleurs été arrêtés par l’armée. En même temps, le mufti sunnite Mohammad Rachid Kabbani a rapidement réagi en appelant au calme, dans une réaction sage et posée qui a dénoncé les discours incitateurs à la discorde prononcés par certaines personnes dans les deux camps rivaux. Même réaction du côté des dirigeants du courant du Futur et de certains cheikhs salafistes de Tripoli, alors que de Rome où il se trouve, le Premier ministre a suivi de près les développements sur le terrain.


À ce stade de l’enquête, des sources bien informées affirment qu’il n’existe aucun lien entre les deux agressions, et qu’il faudrait donc écarter l’hypothèse de l’existence d’un plan visant à susciter simultanément des troubles confessionnels dans plusieurs quartiers de la capitale. Les mêmes sources précisent toutefois que si l’agression de Mar Mikhaël est un incident fortuit, provoqué par un échange de propos un peu vifs, celle de Khandak al-Ghamik est plus suspecte, les motivations des agresseurs étant plus vagues. Elles ajoutent qu’aujourd’hui, 40 % des jeunes Libanais sont au chômage, alors que près de deux tiers de la population aurait moins de 25 ans. C’est dire que dans un tel contexte, il est très facile d’enrôler des jeunes pour leur faire exécuter des missions ponctuelles moyennant un peu d’argent.

 

(Lire aussi : Sleiman de Lagos : Le Liban connaîtra le salut en dépit de tout)


Et c’est là justement que le bât blesse. Car la volonté des autorités de clore le double dossier, tout en déférant les coupables devant la justice, est certes louable, mais elle ne répond pas à toutes les questions. Et la plus importante d’entre elles est la suivante : qui veut pousser le Liban vers le chaos ? Plusieurs explications sont aujourd’hui données.
Pour certains, contrairement à leurs dénégations, le Hezbollah et Amal auraient voulu, à travers ces agressions, donner une leçon aux sunnites, dont les leaders ne cessent de les provoquer et de les insulter, du nord au sud, en passant par Ersal et Saïda. Pour d’autres, c’est le régime syrien qui, coincé, veut étendre le champ de bataille au Liban pour desserrer l’étau qui commence à l’étouffer. Pour d’autres encore, certains pays de la région veulent pousser le Liban dans le chaos pour que l’opposition syrienne et ses alliés libanais puissent y avoir les coudées franches et intervenir directement dans le cours des combats en Syrie. Enfin, certains pensent plutôt que le poison de la discorde confessionnelle est en train de s’étendre dans les artères des Libanais à cause des discours enflammés de certains leaders et bientôt on ne pourra plus enrayer le mal.


Quelle que soit la version choisie, la réalité reste la même et elle se résume ainsi : l’heure est grave pour le Liban. Les Libanais sont donc appelés à faire preuve, une fois n’est pas coutume, de sens des responsabilités pour éviter de glisser vers une nouvelle guerre civile qui pourrait être dans l’intérêt de certaines parties régionales, mais serait forcément terrible pour eux.

 

 

Lire aussi

« Policiers » anticonfessionnels sur Facebook, le clic de Rania Massoud

Le Liban et les Libanais l’ont échappé belle. Dimanche soir et même dans la soirée de lundi, le pays était à deux doigts de basculer dans la discorde tant honnie. Mais la réaction rapide des responsables chiites et sunnites ainsi que celle de l’armée ont permis d’éviter le pire. Officiellement, il s’agirait donc de voyous « récidivistes » qui s’adonnent à la...

commentaires (4)

Ce qui est incroyable dans cette histoire, c'est que n'importe quel Libanais de base sait bien que c'est une foutue provocation...et que "certains" cherchent à toute force à lancer les chiites contre les sunnites et vice et versa...nos hommes politiques ont une fois de plus merdé...avec leurs paroles totalement irresponsables, leurs agitations de matamores et leurs calculs perfides...quand je pense que les trois têtes de l'état libanais se sont retrouvées à l'étranger ,en même temps! C'est complètement fou, non?

GEDEON Christian

11 h 13, le 20 mars 2013

Tous les commentaires

Commentaires (4)

  • Ce qui est incroyable dans cette histoire, c'est que n'importe quel Libanais de base sait bien que c'est une foutue provocation...et que "certains" cherchent à toute force à lancer les chiites contre les sunnites et vice et versa...nos hommes politiques ont une fois de plus merdé...avec leurs paroles totalement irresponsables, leurs agitations de matamores et leurs calculs perfides...quand je pense que les trois têtes de l'état libanais se sont retrouvées à l'étranger ,en même temps! C'est complètement fou, non?

    GEDEON Christian

    11 h 13, le 20 mars 2013

  • Le mal est dans les déclarations enflammées certes. L'Un a déclaré sur les TV qu'il y a un plan déjà préparé pour détruire la moitié de la Ville de Tripoli et la réduire en deuxième HOMS. L'autre a repris de son perchoir Tripolitain les mêmes menaces exactement. OSONS LES NOMMER ! Soyons Impartiaux... puisqu'on nomme dans tous nos articles le ASSIR...

    SAKR LEBNAN

    10 h 52, le 20 mars 2013

  • Ah, la DROGUE ! et CEUX qui GOBENT de telles balivernes. LES SOURCES ! Toujours CES MÊMES SOURCES ! Elles ont confirmé qu'il n'y a pas de relation entre ces deux agressions, en même temps, et contre des religieux appartenant à une même communauté. Ces SOURCES de Confiance n'ont-elles pas chuchoté qu'il y a encore des PARDONNEURS qui circulent librement dans le pays... avec de " bonnes " intentions qui sourdent des MÊMES SOURCES ?

    SAKR LEBNAN

    09 h 08, le 20 mars 2013

  • La phrase de cet Eclairage de Mme Haddad la plus significative et expressive de la réalité est la suivante : "Certains pensent plutôt que le poison de la discorde confessionnelle est en train de s'étendre dans les artères des Libanais à cause des discours enflammés de certains leaders et bientôt on ne pourra plus enrayer le mal". Je me permets de répéter ce que je disais hier : Ce sont les discours irresponsables de chefs et hommes politiques qui "droguent" ces agresseurs.

    Halim Abou Chacra

    05 h 52, le 20 mars 2013

Retour en haut