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Liban - La situation

Mikati, à son tour, lève le petit doigt face à Damas

Le Premier ministre charge l’ambassadeur du Liban à Damas de notifier les autorités syriennes de la poursuite des violations frontalières.

Le Premier ministre recevant l’ambassadeur du Liban à Damas, Michel Khoury. Photo Dalati et Nohra

Lentement mais sûrement, l’État libanais s’émancipe de l’emprise que continuait à exercer sur lui le régime de Damas, même après le retrait fracassant des troupes syriennes du territoire libanais, en avril 2005.


Les deux têtes de l’exécutif libanais paraissent désormais disposer, en effet, d’une marge de manœuvre minimale leur permettant non seulement de ne pas obtempérer aux diktats syriens, mais aussi de donner de la voix lorsque les intérêts du Liban sont mis à mal par le comportement du régime voisin.
De plus en plus franche et déclarée chez le président de la République, Michel Sleiman, cette émancipation reste bien sûr prudente et même timorée chez le Premier ministre, Nagib Mikati. Mais elle n’en est pas moins réelle, comme le donne à penser l’initiative qu’a prise hier le chef du gouvernement.


Recevant l’ambassadeur du Liban à Damas, Michel Khoury, qui se trouve actuellement en vacances à Beyrouth, M. Mikati l’a chargé de « remettre une lettre en urgence au ministère syrien des Affaires étrangères l’informant que des positions syriennes continuent de bombarder des localités libanaises frontalières », indique un communiqué du bureau du Premier ministre.
« Ces violations pourraient avoir des répercussions négatives (...) sur la stabilité et le calme à la frontière » en dépit « des mesures de sécurité prises par l’armée libanaise », a poursuivi M. Mikati, affirmant que son gouvernement est « soucieux de protéger les Libanais résidant près de la frontière ».


Certes, il n’est pas question à proprement parler de « protestation » dans cette initiative du chef du gouvernement, et nombreux pourraient reprocher à son message de maintenir une tonalité encore trop courtoise par rapport à l’événement dont il est question, mais on est tout de même sorti de la période où les violations syriennes à la frontière libanaise ne suscitaient aucun commentaire de la part du gouvernement, voire étaient parfois justifiées par certains de ses membres alors que le Premier ministre gardait le silence.


Depuis le début de la révolte en Syrie, la chute d’obus à partir du territoire syrien et les échanges de tirs sont quasi quotidiens, notamment à la frontière nord du Liban.
Damas, qui a placé des mines le long de la frontière, affirme régulièrement avoir déjoué des tentatives d’infiltration d’hommes armés à partir du Liban et accuse l’opposition libanaise, qui soutient la révolte syrienne, de faire passer des armes aux insurgés.
Le 23 juillet, le président Sleiman a protesté pour la première fois contre les violations syriennes du territoire libanais, chose inédite depuis le retrait des troupes de Damas du Liban. Depuis, le ton présidentiel va crescendo, le point de quasi-rupture ayant été atteint avec l’affaire Michel Samaha.
Visiblement, Damas attendait du chef de l’État qu’il s’efforce d’escamoter cette affaire ou, du moins, qu’il n’en ressorte pas les aspects liés à la Syrie. La « petite phrase » du président, affirmant attendre un coup de fil du président Bachar el-Assad à ce sujet, a suscité le violent courroux du régime syrien, lequel l’a fait savoir à l’intéressé la semaine dernière par visiteurs et autres alliés de Damas interposés.

La riposte présidentielle
À ce sujet, on apprend que le président de la République a eu l’occasion, ces jours derniers, de rendre aux dirigeants syriens la monnaie de leur pièce en marge du sommet des non-alignés qui s’est tenu à la fin de la semaine dernière à Téhéran.
L’incident s’est produit juste après la fulgurante attaque menée par le président égyptien Mohammad Morsi contre le régime syrien. Passant à côté du président libanais, les trois représentants de Damas, le Premier ministre Waël el-Halki, le ministre des Affaires étrangères Walid Moallem et son adjoint Fayçal Mokdad, se sont adressés à lui en termes amicaux. « Vous nous avez manqué », lui a dit l’un des membres de la délégation, probablement M. Moallem.
La réponse de M. Sleiman a été nettement moins amicale. « Je vous ai manqué ? » a-t-il lancé, leur demandant comment ils pouvaient dès lors expliquer les flots de critiques déversés contre lui ces derniers temps.
Il a notamment dit qu’il n’avait fait qu’exprimer le souhait que le président syrien se mette en contact avec lui après les terribles révélations faites à la justice par l’ancien ministre Michel Samaha, tout comme il était lui-même entré en contact avec M. Assad lorsque la justice syrienne avait émis des mandats d’amener contre des personnalités libanaises, il y a quelques années.


Et puis le chef de l’État s’est insurgé contre le fait qu’on lui a reproché d’avoir reçu le directeur général des FSI, le général Achraf Rifi, et le chef des SR des FSI, le brigadier Wissam el-Hassan, après l’arrestation de M. Samaha. Il a ajouté qu’il n’avait pas à demander une autorisation de quiconque pour recevoir des fonctionnaires de l’État libanais et qu’il est tout à fait naturel qu’il suive de près une affaire qui a failli avoir de lourdes conséquences sur la sécurité nationale.
Les trois délégués syriens ont tenté de minimiser l’impact de la brouille en assurant M. Sleiman des bonnes intentions du régime syrien à son égard et en affirmant que ce sont les alliés de Damas au Liban qui ont fait de la surenchère en ce domaine. Mais le chef de l’État est, semble-t-il, resté de glace et a continué à répliquer aux critiques qui lui avaient été adressées.
L’attitude des délégués syriens à Téhéran paraissait d’autant moins crédible que pour nombre d’observateurs, la chute d’obus syriens sur des villages chrétiens du Akkar ces jours derniers pouvait être considérée comme une réponse à la position du président. 

La mobilisation du 14 Mars
Cependant, si le président de la République et maintenant le Premier ministre ont commencé sérieusement à prendre leurs distances à l’égard du régime syrien et de ses agissements au Liban, on est encore loin de la phase où le gouvernement, dominé comme on le sait par le 8 Mars, mettrait au point une stratégie globale pour contrer les débordements du conflit syrien en territoire libanais. Or ces débordements inquiètent sérieusement la communauté internationale.


Cette inquiétude est partagée par le 14 Mars, qui s’apprête à lancer une stratégie nouvelle prenant en compte les derniers développements sur la scène libanaise en relation avec la crise en Syrie. Une réunion a été convoquée à cet effet demain mercredi à Meerab, QG des Forces libanaises et résidence de Samir Geagea. Une centaine de piliers, de responsables et de députés de l’opposition devraient y prendre part. 
De façon plus ponctuelle, et à en croire la LBC, le 14 Mars a déjà mis au point un mémorandum qui serait très prochainement transmis au chef de l’État et qui réclamerait le déploiement de la Finul à la frontière libano-syrienne, en particulier dans le Nord. Le but serait d’aider l’armée libanaise à contrôler les flux à la frontière.
Vendredi dernier, le secrétaire général adjoint du Hezbollah, cheikh Naïm Kassem, s’était formellement opposé à un tel déploiement, le décrivant comme servant le « projet américano-israélien ».

 

 

Pour mémoire

Frontières : Sleiman brise le silence et décide la convocation de l’ambassadeur de Syrie

 

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Lentement mais sûrement, l’État libanais s’émancipe de l’emprise que continuait à exercer sur lui le régime de Damas, même après le retrait fracassant des troupes syriennes du territoire libanais, en avril 2005.
Les deux têtes de l’exécutif libanais paraissent désormais disposer, en effet, d’une marge de manœuvre minimale leur permettant non seulement de ne pas obtempérer...

commentaires (8)

Pardon, lire svp: Apprenons à regarder la poutre dans notre œil...

Ali Farhat

05 h 12, le 05 septembre 2012

Tous les commentaires

Commentaires (8)

  • Pardon, lire svp: Apprenons à regarder la poutre dans notre œil...

    Ali Farhat

    05 h 12, le 05 septembre 2012

  • Ben le PM fait son travail et je suppose que les Syriens auront une réponse à nous donner à ce sujet! Nous oublions que ce sont les Libanais de la minorité et à leur tête une certains confession qui se reconnaitra (pas toute bien entendu) qui collaborent avec les terroristes Syriens de tous bords en faisant passer fanatiques, armes, journalistes clandestins méprisants, services secrets étrangers, matériels de guerre de communication et d'espionnage etc. vers la Syrie. Apprenons à regarder la petite paille dans notre œil...

    Ali Farhat

    16 h 55, le 04 septembre 2012

  • La réponse de Damas à Mikati sera aussi le lever de doigt.

    Daniel Lange

    10 h 45, le 04 septembre 2012

  • Nous savons a present qu'il a un petit doigt, plus est, il l'a bouge!!! Pas trop mais un tantinet! C'est peut etre la seule realisation de ce gouvernement: Mikati a bouge son petit doigt! Qu'il n'en fasse pas trop quand meme avec la crise c'est encore le contribuable qui devra le soigner!

    Pierre Hadjigeorgiou

    07 h 11, le 04 septembre 2012

  • Son petit doigt? Pourquoi? Il sirotait une tasse de thé à la manière des précieux? Ah, j'y suis, son petit doigt a du lui souffler quelque chose...Index ou auriculaire, l'important c'est qu'il ne dise pas :Pouce!

    Tina Chamoun

    01 h 57, le 04 septembre 2012

  • et le ministre des AE? toujours en place?......bizarre

    Tzebaras Georges

    01 h 46, le 04 septembre 2012

  • C'est comme celui qui tourne sa main droite autour de son cou pour toucher son oreille droite. Au lieu de convoquer l'ambassadeur syrien et de protester énergiquement contre les violations et incursions syriennes, notre P.M. MIKATI charge notre ambassadeur en Syrie de porter, à qui? , un tout petit reproche bien fraternel.

    SAKR LEBNAN

    00 h 58, le 04 septembre 2012

  • Les attitudes fermes et tant attendues du Président de la République et à un degré moindre du Premier Ministre, bien que tardives, constituent, il faut l'espérer, un préambule à un désengagement plus marqué à l'égard de cette encombrante "Syrie-soeur" et à des relations enfin n-o-r-m-a-l-e-s entre les deux pays, et non "privilégiées", où le privilège a toujours été à sens unique (inique).

    Paul-René Safa

    00 h 21, le 04 septembre 2012

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