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Liban - Coopération

Wanda Diebolt, secrétaire générale de l’AUF, partage le respect du passé et la foi en l’avenir de la francophonie

De passage au Liban, Wanda Diebolt a participé à la 5e réunion des recteurs du Moyen-Orient et au lancement d’un nouveau projet d’insertion professionnelle pour les étudiants. Agrégée de lettres et énarque rigoureuse, elle croit en l’expansion de la francophonie grâce à ses valeurs.

Wanda Diebolt.

Caressant, au fil de ses responsabilités administratives, la bohème d’un passé qu’elle continue de visiter, Wanda Diebolt, actuelle secrétaire générale de l’Agence universitaire de la francophonie (AUF), de passage au Liban, insiste sur l’importance de « changer en respectant son passé ». Cette formule, elle la puise dans son expérience au sein du ministère de la Culture en France, où elle a notamment occupé le poste de sous-directrice de l’archéologie de 1992 à 1996, puis de directrice de l’architecture et du patrimoine de 2000 à 2003. Dans l’intervalle 1997-2000, elle a été administratrice générale du musée du Louvre.

Sauvegarder le passé
Ces diverses responsabilités, où Mme Diebolt a été en charge « de la sauvegarde ainsi que du financement de la restauration du patrimoine français », lui auront permis de cerner les nuances de la modernisation, inévitablement liée à l’histoire. « Il est très important de préserver les traces du passé, sans que cela ne véhicule une vision conservatrice ou passéiste », confie-t-elle à L’Orient-Le Jour. « Au contraire, le patrimoine est un élément très important dans le dynamisme économique d’une vie et d’un pays », ajoute-t-elle, en tentant de trancher le débat, toujours très vif au Liban, sur l’enjeu de conserver les anciennes demeures, plutôt que de donner libre cours à l’expansion imposante des nouvelles tours. Rappelant que « le paysage et la richesse du patrimoine sont un facteur d’attractivité économique très important pour un pays », Mme Diebolt estime en même temps que « la ville n’est pas figée et doit évoluer ». Ces deux considérations guident sa conclusion vers un juste milieu, qui sied parfaitement au terrain libanais, même si elle n’a « aucune intention de formuler un jugement sur ce pays au passé riche et fier ». Cette conclusion est celle d’éviter « la politique de la table rase, dévastatrice pour tous les habitants ». Mme Diebolt explique que « dans un monde qui change à une vitesse stupéfiante, l’homme a besoin de racines et de repères, d’où la nécessité de sécuriser les gens, à travers un cadre qui leur offre ce sentiment d’être liés au passé et d’être donc plus confiants pour l’avenir ».

La volonté et le travail
Une pareille confiance ressurgit de la sereine sobriété de ses propos, sous-tendant une « rigueur » de travail qu’elle a optimisée au moment de son agrégation de lettres classiques en 1974. « Même si, a priori, les études de latin et de grec n’ont rien à voir avec les préoccupations du monde d’aujourd’hui, elles sont une formidable préparation pour une carrière ancrée dans la réalité contemporaine », grâce à la solide culture générale qu’elles offrent, affirme-t-elle. C’est d’ailleurs « sur cette base que j’ai pu préparer et réussir le concours de l’École nationale d’administration » (1981-1983), ajoute-t-elle, qualifiant cette expérience de « difficile, mais faisable », sur un ton qui loue « la volonté et le travail ». Là aussi, elle envoie un petit clin d’œil à la jeunesse libanaise, qu’elle encourage à se présenter pour l’ENA, « garantie d’une fonction publique solide, intègre et performante ». En réponse à L’OLJ, elle évoque « la possibilité de partenariats intéressants entre les universités libanaises et l’ENA, cette dernière étant d’ailleurs un membre associé de l’AUF ».

L’AUF et « la force » académique
Forte d’un rationalisme fécond, à travers lequel elle valorise, dans un éclatant paradoxe, sa sensibilité aux mots et son rapport enluminé à l’évolution, Mme Diebolt dédie désormais toute son expérience à l’AUF, dont le réseau international relie actuellement 774 établissements universitaires dans 91 pays. Cette association, qui est également l’opérateur de la francophonie depuis 1989, propose plusieurs programmes de coopération visant notamment à soutenir la recherche et l’enseignement supérieur en français. Dans ce cadre, elle met l’accent sur « cette belle force » que dégagent les enseignants, chercheurs et étudiants. C’est une dynamique qui permet de « dépasser toute forme de consternation », régionale ou autre, estime-t-elle, écartant la possibilité que les révolutions arabes freinent l’avancement de la francophonie. « La beauté du milieu universitaire, tel que le soutient l’AUF, provient de la mise en contact de scientifiques, qui dépassent certaines difficultés et changements et continuent à travailler ensemble dans un esprit de paix et de quiétude ».

La Confremo
Un exemple de cette assiduité silencieuse, la Confremo, ou Conférence des recteurs de la région du Moyen-Orient, créée en 2007 à Alep en Syrie, dans le but de « promouvoir, au niveau régional, le débat, la réflexion et l’action dans l’enseignement supérieur ». Cette conférence est formée actuellement de 43 recteurs et directeurs d’université issus de douze pays du Moyen-Orient et membres de l’AUF. La visite de deux jours de Mme Diebolt à Beyrouth lui a permis de prendre part à la 5e rencontre de la Confremo, qui a prévu plusieurs conférences et tables rondes pour débattre de gouvernance et de pédagogie universitaire.

Nouveau projet Tempus
Cette rencontre a coïncidé par ailleurs avec le lancement du nouveau projet Tempus, qui vise cette fois l’Orientation et l’insertion professionnelle dans les universités du Liban, d’Égypte et de Syrie (Oipules). Soutenu par la Confremo, ce projet est financé par l’Union européenne à hauteur de 1,205 million d’euros, et profite aux principales universités francophones du Liban. Encadré par l’AUF, il bénéficie du partenariat de trois prestigieuses universités européennes, de Poitiers, du Portugal et de Roumanie, qui partageront leur expérience en matière d’insertion professionnelle des étudiants. « La coopération scientifique francophone est au cœur de nos activités », résume Mme Diebolt, qui qualifie de « parfaitement normal » le lancement d’un nouveau projet, dans un contexte régional critique, puisqu’il tente de rapprocher les étudiants de la réalité, professionnelle et sociale. « Plusieurs professeurs sont d’ailleurs venus de Syrie pour prendre part à la réunion de la Confremo », ajoute-t-elle, soulignant en outre l’émergence de nouveaux pays partenaires de la francophonie dans le monde, comme le Yémen, la Chine et le Brésil.

Francophonie et multilinguisme
« Les raisons derrière l’intérêt accru des gouvernements et des universités pour la francophonie sont des raisons de fond, liées à la volonté d’ouverture sur un monde de plus de 220 millions de locuteurs, à la volonté de ne pas miser seulement sur l’univers anglo-saxon et, enfin, à une réceptivité aux valeurs francophones. » Toutes ces considérations amènent Wanda Diebolt à conclure, sur une note « optimiste », à la continuelle « expansion de la langue française (...) indépendamment des régimes en place ». Loin de vouloir prendre « la défense frileuse de la langue française », elle estime que l’intérêt porté à celle-ci est le fruit d’une constante « recherche multilingue, consacrant ce droit de s’exprimer dans la langue de son choix, et cette diversité culturelle est justement celle de la liberté de penser ».
Caressant, au fil de ses responsabilités administratives, la bohème d’un passé qu’elle continue de visiter, Wanda Diebolt, actuelle secrétaire générale de l’Agence universitaire de la francophonie (AUF), de passage au Liban, insiste sur l’importance de « changer en respectant son passé ». Cette formule, elle la puise dans son expérience au sein du ministère de la Culture en...

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