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Liban

Le récit poignant du rapatriement du corps d’un secouriste syrien

Une copie d’une partie du communiqué du Croissant-Rouge syrien indiquant explicitement que les tirs contre l’ambulance provenaient d’une « source sécuritaire ou militaire ».


La terreur et la barbarie dont témoigne la population syrienne au quotidien n’ont d’égales que les films de science-fiction et d’horreur. Outre la répression violente des manifestants, les méthodes de torture que les forces de sécurité syriennes s’ingénient à rendre encore plus cruelles et atroces, le régime semble maintenant décidé à élargir son cercle infernal en matière de violence en s’acharnant sur le Croissant-Rouge syrien.
Les faits se sont déroulés il y a deux semaines à Homs, une ville qui s’obstine à poursuivre son mouvement de contestation contre le régime baassiste.
Lors d’une rafle dans l’un des quartiers de Homs, au cours de laquelle un jeune activiste est blessé par balles, le Croissant-Rouge syrien est appelé d’urgence pour venir secourir le blessé. Sur le chemin de retour, et alors que l’ambulance avait récupéré le jeune blessé en vue de le transporter à l’hôpital, le véhicule essuie des rafales de tirs des quatre côtés. Quatre volontaires du Croissant-Rouge sont blessés, dont l’un très grièvement, en plus du blessé secouru qui reçoit 6 autres balles. Le chauffeur, qui, lui, n’a pas été touché, poursuit sa course folle jusqu’à l’hôpital pour secourir les cinq blessés. L’un d’entre eux, al-Hakam Dourrak Soubai, un jeune volontaire dont le corps a été criblé de balles, subit immédiatement sur place deux opérations qui s’avèrent inutiles. Affolés, ses parents décident de l’acheminer d’urgence vers un grand hôpital très connu de Beyrouth. Comme on pouvait s’y attendre, allant à l’encontre de la loi qui interdit aux hôpitaux de refuser l’admission d’un blessé d’urgence et en dépit des multiples mises en garde de l’actuel ministre de la Santé, Ali Hassan Khalil, le « grand hôpital » refuse d’admettre le blessé grave et requiert de la famille le dépôt d’une somme de 8 mille dollars. Le temps de rassembler l’argent, la famille et les amis parviennent enfin à le faire admettre en urgence.
Le jeune homme décède quelques heures plus tard. Mais la série de malheurs de ses parents se s’arrête pas là. Sitôt le décès annoncé, la famille se présente à l’ambassade de Syrie au Liban pour obtenir l’autorisation de rapatrier le corps. « L’ambassade refuse de leur délivrer le corps à moins que la famille ne présente un rapport du médecin légiste attestant que le jeune homme a essuyé les tirs d’un groupuscule terroriste armé », témoigne Mohammad, l’un des volontaires du Croissant-Rouge de la branche de Homs, en visite express au Liban.
Or, précise Mohammad, le Croissant-Rouge avait fait paraître au lendemain de l’incident un communiqué officiel dans lequel il précise que « l’intensité des tirs essuyés par l’ambulance, le fait qu’ils provenaient de plusieurs directions, ainsi que la nature des douilles qui s’élèvent à 31 montrent que les coups de feu tirés en direction du véhicule provenaient d’une source sécuritaire ou militaire ».
D’ailleurs, « aucun des médecins légistes libanais n’a accepté la condition imposée par l’ambassade de Syrie », témoigne encore Mohammad. Suite à des contacts multiples, les parents réussissent enfin à trouver un compromis avec l’ambassade – à savoir « un rapport stipulant que les tirs provenaient d’une source inconnue ». L’ambassade accepte enfin de donner à la famille l’autorisation de rapatrier le corps.
Mohammad explique que « ce n’est pas la première fois que des tirs atteignent les véhicules du Croissant-Rouge, mais c’est certainement la première fois que les tirs sont aussi directs et d’une telle intensité ».
« Les forces de sécurité syriennes qui nous avaient arrêtés à un barrage savaient d’ailleurs parfaitement que nous étions en mission de sauvetage, puisque ce sont elles qui nous ont donné le feu vert pour accéder au quartier en vue de récupérer le blessé », poursuit-il.
Pour Mohammad, « le communiqué publié par le Croissant-Rouge syrien pour dénoncer cet acte et ceux qui en sont responsables est d’autant plus audacieux qu’en Syrie, cette organisation, censée être une ONG indépendante, est chapeautée par un ministre d’État, une situation exceptionnelle dans le monde ». Une fois chez eux, les parents sont soumis à des pressions monstres de la part des autorités locales, qui refusent que le fils soit enterré dans la mosquée du quartier, leur assignant une autre mosquée loin de leur lieu de résidence. L’enterrement a eu lieu sous la surveillance de 2 000 militaires qui ont encerclé les lieux.
Mohammad semble en tout état de cause déterminé à retrouner chez lui. À la question de savoir s’il comptait reprendre son travail de volontaire à son retour à Homs suite à cette tragédie et après la perte d’un de ses amis, il répond, l’air épuisé : « Si ce n’était que ça ! Lorsque je revois devant moi des enfants de 7 ou de 8 ans criblés de balles, ou cette fille de quatre ans dont on vient d’amputer la jambe à cause des tirs dans les rues, l’incident du Croissant-Rouge paraît futile. » Et de conclure : « Vous savez, ce n’est plus la mort que l’on craint. C’est la manière dont nous préférons mourir. Les jeunes en sont arrivés au point de souhaiter périr par balles plutôt que sous la torture. »
La terreur et la barbarie dont témoigne la population syrienne au quotidien n’ont d’égales que les films de science-fiction et d’horreur. Outre la répression violente des manifestants, les méthodes de torture que les forces de sécurité syriennes s’ingénient à rendre encore plus cruelles et atroces, le régime semble maintenant décidé à élargir son cercle infernal en matière...

commentaires (2)

La nausée rien que la nausée ne peut que caractériser ce tableau maussade vécu au quotidien en Syrie dans un pays ou la mort est devenue si gratuite et l’ homme une vraie bête humaine. Nazira.A.Sabbagha

Sabbagha A.Nazira

05 h 18, le 24 septembre 2011

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Commentaires (2)

  • La nausée rien que la nausée ne peut que caractériser ce tableau maussade vécu au quotidien en Syrie dans un pays ou la mort est devenue si gratuite et l’ homme une vraie bête humaine. Nazira.A.Sabbagha

    Sabbagha A.Nazira

    05 h 18, le 24 septembre 2011

  • Les horreurs de ce qui est devenu une quasi guerre civile,nous les avons connues,et plus souvent qu'à notre tour.la cruauté d'un régime qui joue son va tout est épouvantable et fait regretter d'autant plus le manque de clairvoyance de Bachar el Assad,et le fait qu'il ait laissé passer le momentum où il pouvait agir pour éviter ce drame.mais,messieurs dames,ce qui est carrément atroce,c'est cet"hopital"(je mets des guillemets car ces gens ne méritent pas le nom d'hopital,ces boutiquiers qui vendent le prix de la vie humaine à 8000 dollars).Ainsi donc et depuis tout ce temps,rien n'a changé.Mon professeur d'anglais,M.Davor,est mort à la porte de l'hopital il y a longtemps déjà...et dans les mêmes conditions...à part que lui n'avait pas été blessé.Il avait été victime d'une crise cardiaque.Et les boutiquiers de l'époque l'avaient laissé crever comme un chien parcequ'il n'avait pas le liquide sur lui.Ainsi donc,et malgré l'horreur déjà subie par le blessé syrien,les boutiquiers qui se prétendent médecins ont attendu le paiement de 8000 dollars.Dans l'au-delà,il leur en sera réclamé beaucoup plus.Il leur sera réclamé leur sale âme.Et s'ils devaient se réincarner ,ce serait quelque part entre le cafard et le scorpion

    GEDEON Christian

    20 h 21, le 23 septembre 2011

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