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Liban - Protestation

Les Arméniens dans la rue pour marquer leur refus du protocole Erevan-Ankara

C'est par centaines que les Arméniens du Liban sont descendus dans la rue à l'appel de leurs trois principaux partis pour marquer leur refus du protocole devant être signé entre Erevan et Ankara le 10 octobre. Ils s'étaient regroupés devant l'hôtel Habtoor où est arrivé le président arménien Serge Sarkissian, pour une courte visite au Liban.
La tension était palpable hier sur les visages des manifestants devant l'hôtel où séjourne le président de l'Arménie. Ils étaient venus à pied de Bourj Hammoud et il était clair que pour eux, l'enjeu est énorme : même si tous, pratiquement, sont nés au Liban et n'ont pu connaître l'époque du génocide, ils se considèrent comme « le fruit de cet exil ». Le « non » au protocole devant initier une normalisation des relations entre la Turquie et l'Arménie sonnait fort pour bien parvenir aux oreilles du président arménien. La tension a atteint son comble quand un clash a eu lieu entre certains manifestants et les troupes antiémeute des Forces de sécurité intérieure (FSI). Il faut dire que les forces de l'ordre, FSI et armée, étaient déployées en grand nombre sur les lieux.
Les slogans sur les banderoles (en arménien, anglais ou arabe) invoquaient tantôt la nécessité d'un changement au niveau de la politique arménienne, invitant le président Sarkissian à « négocier avec les Turcs pour qu'ils reconnaissent le génocide », tantôt étaient d'un ton plus ferme, « Ararad appartient à l'Arménie » ou encore « L'histoire arménienne n'est pas à vendre », ou encore franchement hostile, « Si vous ouvrez les frontières, vous verrez les bombes ». Dans la foule, on entonne l'hymne national arménien et des chants patriotiques dans cette langue, mais aussi l'hymne national libanais.
Les sentiments exprimés par les manifestants étaient très similaires. Le jeune Krikor, venu de Bourj Hammoud, n'hésite pas à qualifier le président Sarkissian de « traître ». « Si ce protocole passe, les dernières 90 années auront été en vain », ajoute-t-il. Marie, une dame venue d'Antélias, ne trouve pas les mots pour qualifier ce qu'elle a ressenti quand elle a appris la nouvelle. « J'espère qu'il nous entendra », dit-elle.
Dikran et Krikor pensent qu'il s'agit surtout d'une question de « droit ». « Avec un million et demi de martyrs, il nous faut le prix du sang, et ce prix, c'est la reconnaissance du génocide, disent-ils. Et puis il y a tous ces terrains qui appartiennent à l'Arménie, ces régions dont nous sommes originaires. Comment concevoir de conclure un accord avec les Turcs sans qu'ils nous les restituent ? » Pour les deux jeunes hommes, la Turquie fait une manœuvre pour être intégrée plus facilement à l'UE, et les autorités arméniennes recherchent l'intérêt économique du pays. « Mais les Turcs noieront le marché arménien de produits bon marché, et la situation économique empirera », affirment-ils.
Le député Hagop Pakradounian était là, ainsi que d'autres personnalités politiques et religieuses de la communauté. À un certain moment, M. Pakradounian a exhorté la foule, en arménien, au calme et à ne pas huer le convoi du président Sarkissian. Avec le secrétaire général du parti, Hovig Mekhitarian, et les autres, il a été reçu par le président arménien, pour lui transmettre la position de la communauté au Liban, mais aussi dans les pays environnants.
Alice Boghossian, membre du comité de la défense des droits des Arméniens et responsable du bureau de presse du parti Tachnag, assure que les trois partis arméniens principaux - avec le Henchag et le Ramgavar - sont unis dans cette protestation. Elle explique que le refus d'un tel protocole vient du fait que l'Arménie, tout autant que la diaspora, n'y trouvent pas leur compte, puisque la question des terres occupées et la reconnaissance du génocide n'ont pas été évoquées. « Des mouvements de protestation similaires ont éclaté à Paris, à New York, à Los Angeles, dit-elle. Les gens sont mécontents en Arménie également. »
Mme Boghossian dit comprendre que les intérêts priment en politique, « mais les intérêts ne doivent pas aller à l'encontre de la mémoire d'un peuple ». Pense-t-elle que de telles protestations pourraient faire échouer la signature du protocole ? « Je ne sais pas, mais il faut maintenir la pression. » Le protocole nuira-t-il à la cause comme le craignent les manifestants ? « Une cause ne meurt pas tant qu'il y a quelqu'un pour la défendre », assure-t-elle.
C'est par centaines que les Arméniens du Liban sont descendus dans la rue à l'appel de leurs trois principaux partis pour marquer leur refus du protocole devant être signé entre Erevan et Ankara le 10 octobre. Ils s'étaient regroupés devant l'hôtel Habtoor où est arrivé le président arménien Serge Sarkissian, pour une...

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