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Don d’organes : une belle « aventure » libanaise menacée...

Le modèle espagnol, « une marque de qualité dans le monde »

Le Dr José Ignacio Sanchez Miret : « En Espagne, le citoyen a confiance dans le système de santé et dans le processus de la donation et de la transplantation. »

L’Espagne occupe la première place au monde en matière de don d’organes avec plus de 35 donneurs par million d’habitants. Pourtant, ce n’était pas le cas il y a deux décennies. À la fin des années 1980, le don d’organes se faisait encore rare.
« Ce qui a déclenché la réforme du système de don d’organes en Espagne a été une grève observée par les patients souffrant d’insuffisance rénale, explique le Dr José Ignacio Sanchez Miret, coordinateur régional de transplantation à Aragón en Espagne. En 1987, des patients souffrant d’insuffisance rénale ont organisé une manifestation appelant le gouvernement à œuvrer de manière à changer les choses. »
Il a fallu attendre 1991 pour commencer à ressentir le changement. « En cette année, l’Organisation nationale de transplantation (ONT) a été fondée avec pour principale mission de coordonner le travail entre les différentes organisations locales et régionales qui œuvraient chacune de son côté », poursuit José Ignacio Sanchez Miret, dans une interview accordée à L’Orient-Le Jour, en marge des travaux du premier congrès national sur le don d’organes. Il indique que l’unification et l’encadrement du processus du don d’organes sur l’ensemble du territoire depuis l’identification des donneurs jusqu’au prélèvement des organes ont permis à l’Espagne de progresser dans ce domaine.
La stratégie adoptée par l’Espagne fait d’ailleurs l’objet d’un enseignement transmis à d’autres pays dans le cadre du programme Transplant Procurement Management (TPM), qui a pour vocation d’entraîner les professionnels à tous les aspects du don d’organes.
« Le modèle espagnol constitue une marque de qualité dans le monde. À ce jour, nous avons formé plus de 6 000 médecins et infirmiers dans le monde », s’enorgueillit le Dr José Ignacio Sanchez Miret, qui ajoute : « Dans le don d’organes, la motivation personnelle est essentielle. Il faut être convaincu qu’après la mort, il existe des opportunités pour d’autres patients. »
« Grâce à une loi progressiste, efficace et claire, à un système de formation pour les professionnels et à la collaboration avec les médias, nous avons réussi à créer un système de confiance avec la population qui est la base de tout le processus, affirme José Ignacio Sanchez Miret. Le don d’organes est plus facile en Espagne que dans d’autres pays, tout simplement parce que le citoyen a confiance dans le système de santé et dans le processus de la donation et de la transplantation. Les médias ont eu et continuent à avoir un grand rôle à jouer dans ce sens. En Espagne, nous avons établi un système de communication continue avec les journalistes pour qu’ils aient accès à l’information à n’importe quelle heure. Nous maintenons avec eux une relation sincère et transparente. Toutes les informations sur le don d’organes et les transplantations doivent être confirmées, avant publication ou diffusion, par les parties concernées. On ne peut pas jeter en l’air des informations non vérifiées qui peuvent avoir de graves conséquences. Et cela les journalistes espagnols l’ont bien compris. »

Trouver plusieurs solutions
Se penchant sur les problèmes rencontrés au Liban au niveau du don d’organes, José Ignacio Sanchez Miret constate que les difficultés ne sont pas les mêmes dans les hôpitaux chrétiens et musulmans, privés et gouvernementaux, universitaires et non universitaire, etc. « Plusieurs mesures doivent être envisagées, note-t-il. Il s’agit en premier lieu de former tous les professionnels de la santé dans les universités, les hôpitaux et les dispensaires. Cela est une responsabilité du ministère de la Santé. Il faudrait également développer un système de formation continue pour familiariser les professionnels avec la mort cérébrale. Mais le plus important est de faire comprendre à toutes les parties concernées que le Comité national pour le don et la greffe des organes et des tissus (NOOTDT) est l’organisation nationale qui coordonne tout le travail. »
Au niveau social, José Ignacio Sanchez Miret note qu’un travail doit être effectué à plusieurs niveaux. « Dans les écoles, il faut parler avec les enfants de la mort et de l’après-mort, non pas d’un point de vue religieux, mais biologique, insiste-t-il. Après la mort, le corps est décomposé. Si on fait don de ses organes, on peut alors donner la vie à d’autres patients. La question du don d’organes doit être aussi évoquée dans la société par le biais de leaders du monde artistique, sportif, etc. qui aideront à faire véhiculer le message. »
Sur le plan religieux, « toutes les communautés s’entendent sur le fait que la vie est la principale valeur de l’homme ». « Les chefs religieux doivent donc aider à promouvoir le don d’organes, affirme-t-il. Il faut qu’ils en parlent ouvertement et publiquement. En Espagne, nous avons des discussions dans ce sens avec les chefs religieux musulmans. Il y a eu des fatwas favorables au don d’organes. Cela a même été dit dans les mosquées. Au Liban, je pense qu’une confusion sur le don d’organes persiste encore au sein d’une même communauté. Il faudrait envisager l’organisation d’un congrès qui réunirait tous les chefs religieux pour discuter de la manière de faire parvenir le message. »
L’Espagne occupe la première place au monde en matière de don d’organes avec plus de 35 donneurs par million d’habitants. Pourtant, ce n’était pas le cas il y a deux décennies. À la fin des années 1980, le don d’organes se faisait encore rare.« Ce qui a déclenché la réforme du système de don d’organes en Espagne a été une grève observée par les patients souffrant...