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Culture - Installation

Éric Baudelaire tourne à Beyrouth et expose ses rushes au BAC

Jusqu’au 6 avril, le Beirut Art Center (en partenariat avec l’Institut français) mettra en scène, au jour le jour, les rushes du tournage d’un film expérimental que développe à Beyrouth l’artiste et réalisateur français Éric Baudelaire. Et cela à partir des fragments de scripts que lui envoie quotidiennement le cinéaste japonais Masao Adachi depuis... Tokyo. Clap à suivre !

Éric Baudelaire et May Shigenobu au Beirut Art Center le soir de l’inauguration.

C’est un travail artistique complexe mais passionnant auquel se livre, quasiment sous le regard des visiteurs du BAC*, Éric Baudelaire. Un projet de réalisation inédit et atypique qui repose sur un processus expérimental de tournage à l’aveugle. À partir de fragments de scripts que lui envoie quotidiennement le cinéaste japonais Masao Adachi de Tokyo, l’artiste et réalisateur français Éric Baudelaire développe un film dont il réalise le tournage à Beyrouth.
Intitulé Enigma Of Memory, ce projet de réalisation (à la production prise en charge par le mécénat culturel des «Audi Talents Awards»**, dont Éric Baudelaire a été le lauréat de la catégorie Art contemporain en 2012) se présente donc sous forme d’installation. Baptisé «Now Here Then Elsewhere», il est composé de 4 écrans diffusant les premiers rushes tournés à Beyrouth et d’un accrochage des copies de scripts envoyées, au jour le jour, par e-mail, par Masao Adachi retenu à Tokyo en raison de son implication avec l’Armée rouge.


Pour saisir le sens et la portée de l’œuvre en cours, il faut d’abord s’arrêter sur la précédente installation documentaire expérimentale d’Éric Baudelaire baptisée «L’Anabase de May et Fusako Shigenobu, Masao Adachi et 27 années sans images». Également exposée au BAC, elle est composée d’un film de 66 mn, de 9 sérigraphies sur papier et de reproductions monochromatiques d’images tirées de l’univers cinématographique, médiatique et personnel des protagonistes. L’ensemble accompagné d’un livret explicatif.
Dans ce travail réalisé en 2011, Baudelaire retrace l’itinéraire sur trente ans d’une frange radicale de la gauche nippone qui, dans les années 70, s’était impliquée dans différents mouvements révolutionnaires, dont le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP).


Le film livre, sur fond de paysages urbains alternant des vues de Tokyo et de Beyrouth, les récits en voix off du fameux Masao Adachi et de May, la fille de Fusako Shigenobu, la fondatrice de l’Armée rouge, née d’une relation de cette dernière avec un militant palestinien. Le premier, figure légendaire de la nouvelle vague nippone, réalisateur de films érotico-militants ainsi que des films de propagande pour l’Armée rouge et la guérilla palestinienne au Liban, a été arrêté et emprisonné à Beyrouth avant d’être expulsé au Japon. La seconde a partagé avec sa mère 27 ans de vie clandestine au Liban avant de rejoindre, à l’arrestation de sa mère, son pays d’origine puis de retourner, il y a quelques mois, vers sa terre natale. D’ailleurs, elle était présente au BAC le soir du vernissage pour répondre, auprès d’Éric Baudelaire, aux questions de Diane Dufour, curatrice, directrice du BAL, qui introduisait au public l’œuvre de ce dernier.

Beyouth-Tokyo-Beyrouth : « L’Anabase... »
Allégorie politique sur le retour des révolutionnaires, cet «Anabase...» («qui désigne un mouvement vers “chez eux” de gens égarés, hors lieu et hors la loi», dixit le livret de l’exposition) explore l’ère du radicalisme post-68 et la présence de groupuscules terroristes japonais dans les camps palestiniens au Liban.
S’appuyant notamment sur la «théorie du paysage Fûkeiron» initiée par... Adachi, celle de «la caméra tournée vers les lieux du quotidien pour chercher à y déceler les structures du pouvoir qui conditionnent les gestes des hommes», Éric Baudelaire ouvre dans ce film «des espaces de fiction au sein d’une approche documentaire», dit-il. C’est, par contre, exactement le processus inverse qu’il suit dans Enigma Of Memory, l’œuvre qu’il filme à Beyrouth. Et dans laquelle il creuse, à partir des constructions de fiction, la question du réel.


Dans les deux cependant, film et installation, comme dans la plupart de ses œuvres – dont certaines sont au Whitney Museum of American Art, au Centre Pompidou ou encore au Fonds national d’art contemporain –, l’artiste questionne le processus de production, l’espace entre scénario et tournage, entre mémoire et fiction et, surtout, s’interroge sur ce «Que peut une image?».


Une question à laquelle une visite de l’exposition au BAC peut apporter une ébauche de réponse... Selon le regard de chacun.

* Jisr el-Wati. Horaires d’ouverture du lundi au samedi, de 12h à 20h. Tél. 01-397018.
**Rendez-vous incontournables de la création artistique française, les « Audi Talents Awards » visent à faire émerger de jeunes talents dans les domaines du cinéma, de la musique, de l’art contemporain et du design.

C’est un travail artistique complexe mais passionnant auquel se livre, quasiment sous le regard des visiteurs du BAC*, Éric Baudelaire. Un projet de réalisation inédit et atypique qui repose sur un processus expérimental de tournage à l’aveugle. À partir de fragments de scripts que lui envoie quotidiennement le cinéaste japonais Masao Adachi de Tokyo, l’artiste et réalisateur...

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