Rechercher
Rechercher

Liban - Conférence

La main-d’œuvre domestique étrangère au Liban toujours dans l’attente d’une loi

Le projet de loi réglementant le travail de la main-d'œuvre étrangère domestique, présenté par le ministre du Travail Boutros Harb, attend toujours d'être transmis au gouvernement. Loin d'être parfait, il est toutefois considéré comme une avancée par les associations des droits de l'homme.
Les difficultés et les défis de la main-d'œuvre migrante au Liban ont été au cœur d'une conférence-débat organisée hier par l'association Insan, en partenariat avec la faculté de droit de l'Université La Sagesse et l'Agence espagnole pour le développement et la coopération (Aecid). Un dossier toujours brûlant, en l'absence d'une loi qui régit le travail de la main-d'œuvre domestique, à l'heure où se poursuivent, au quotidien, les atteintes aux droits des employées de maison étrangères.
Un bémol, pourtant, à l'événement qui a vu la présence du ministre du Travail, Boutros Harb, de l'ambassadeur d'Espagne, Juan Carlos Gafo, et du recteur de l'Université La Sagesse, Mgr Joseph Merhej : l'absence des étudiants, ces avocats et juges de demain, qui ne manqueront pas d'être un jour confrontés au dossier. Et pourtant, les droits de l'homme et ceux de la main-d'œuvre étrangère figurent dans les programmes de l'institution, comme l'affirme le doyen de la faculté de droit, Maroun Boustani. D'autant que « la violation de ces droits constitue un grave problème de la société libanaise », insiste-t-il, dénonçant « la maltraitance » pratiquée par certains employeurs et « qui nuit à la réputation du pays ».

Un pas de géant
C'est autour du projet de loi réglementant le travail de la main-d'œuvre domestique, présenté en février dernier par le ministre du Travail, qu'a tourné la première partie de la conférence. « Le Liban compte beaucoup sur la main-d'œuvre étrangère, et pourtant, il n'a mis en place aucune loi qui réglemente le travail de la main-d'œuvre domestique, essentiellement étrangère, dont le chiffre atteint 250 000 personnes pour une population de 4 millions d'habitants », déplore le représentant d'Insan, Charles Nasrallah. Saluant le projet du ministre Harb, il le qualifie de « premier projet sérieux jusque-là », voire de « pas de géant » au niveau du respect des droits de l'homme. « Au cas où il est adopté, ce sera une première dans l'histoire du pays », souligne-t-il.
Si l'ensemble de la société civile ainsi que les associations de lutte pour le respect des droits de l'homme ont décidé de soutenir le projet de loi du ministre du Travail, comme l'indique M. Nasrallah, ces associations, notamment Kafa, HRW, Amnesty international, Insan et l'USJ, n'en appellent pas moins Boutros Harb à « lire attentivement leurs remarques » et à « les prendre en considération ».
Le ministre Harb a fait part, à son tour, du caractère « anormal » de la maltraitance de la main-d'œuvre domestique au Liban et de « sa répercussion négative » sur la réputation du pays du Cèdre, qui est pourtant l'un des initiateurs de la Déclaration universelle des droits de l'homme. « Après avoir mené ma propre enquête, j'ai réalisé que la maltraitance existe réellement envers la main-d'œuvre domestique étrangère. C'est là où j'ai décidé de réagir, à la lumière de contacts avec la société civile, d'abord pour comprendre les raisons de la maltraitance et ensuite pour mettre en place une stratégie pour résoudre le problème », explique-t-il. « D'où la nécessité de mettre en place une loi qui soit à la fois applicable et acceptée par la société libanaise », observe-t-il.
Conscient du fait que le projet de loi qu'il a présenté « n'a pas répondu aux aspirations de la société civile » qui milite pour la liberté absolue de la main- d'œuvre domestique, Boutros Harb tient à préciser que ce projet n'a pas non plus répondu à ses propres ambitions. « Ce n'est pas un programme global, juste un pas sérieux, dit-il. Mais il est essentiel que cette loi passe en Conseil des ministres », poursuit-il, invitant la société civile « à ne pas massacrer ce projet de loi ». Projet qui devra être accompagné « d'une campagne de sensibilisation de la société libanaise », conclut M. Harb.

Habilitation et inclusion sociale
En réponse à une question de L'Orient-Le Jour sur le maintien du système du garant qui est à la base des violations des droits des employées de maison étrangères, le ministre indique que ce système réglemente l'ensemble du travail de la main-d'œuvre étrangère au Liban. « Pour le moment, nous n'envisageons pas d'annuler ce système qui n'a pas que des aspects négatifs », fait-il remarquer.
De son côté, l'ambassadeur d'Espagne, Juan Carlos Gafo, affirme que l'amélioration des conditions des femmes migrantes est au cœur de son dialogue avec les autorités libanaises. « Nous attendons cette loi qui changera les conditions des femmes migrantes domestiques », observe-t-il. Et d'ajouter que « les mesures déjà mises en place, de même que les campagnes de sensibilisation, sont un pas positif » mais sont « loin d'être suffisantes ».
C'est sur le projet d'habilitation et d'inclusion sociale de la main-d'œuvre domestique migrante au Liban qu'a porté la seconde partie de la conférence. Un projet mis en place par Insan en partenariat avec l'organisation espagnole Aida, grâce au financement de l'Agence espagnole pour le développement et la coopération. Ce projet apporte un soutien social, éducatif, psychologique et légal aux femmes étrangères qui travaillent comme femmes de ménage à mi-temps, ainsi qu'à leurs enfants. Il faut dire que ces enfants qui vivent dans des conditions de grande précarité sont mal logés et sont souvent livrés à eux-mêmes en l'absence de leurs parents. Sans papiers, ils ne peuvent être scolarisés et ne bénéficient d'aucune couverture médicale. À cause de la couleur de leur peau, ils sont aussi victimes de discrimination. Dans l'objectif d'insérer ces enfants à l'école, Insan a également créé des classes à leur intention. Aujourd'hui, 30 % environ des 80 enfants déjà soutenus par le projet d'Insan peuvent espérer être admis dans une classe classique, au sein d'une école.
Une initiative louable, dans l'attente que l'État réglemente le travail des employées de maison.
Les difficultés et les défis de la main-d'œuvre migrante au Liban ont été au cœur d'une conférence-débat organisée hier par l'association Insan, en partenariat avec la faculté de droit de l'Université La Sagesse et l'Agence espagnole pour le développement et la coopération (Aecid). Un dossier toujours brûlant, en l'absence d'une loi qui régit le travail de la main-d'œuvre...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut